la vicomté (III) : les vallées méridionales
De la Dordogne à Tulle
illustration : la Dordogne à Monceaux : le Malpas et la butte du Chastel vus depuis les hauteurs des Saulières
La partie la plus à l'ouest de la vicomté se situe sur un plateau dit de Sainte Fortunade, venant des hauteurs au-dessus de Tulle creusées au sud par la Souvigne et au nord par la Saint Bonnette et la Montana, et d'autre part sur le plateau venant d'Egletons dit de Clergoux, limité à l'Est par le Doustre.
Sur la "frontière" occidentale, aucun relief représentatif ne permet de distinguer les limites avec la vicomté de Turenne, les vallées constituant au sud une seule dépression notable alors qu'au nord-est elles morcellent les espaces et les rendent parfois confus et délicats à appréhender.
Ces terres sont largement pénétrées de l'influence de la vicomté du sud et des évêques de Tulle, même si les Ventadour imbriquent majoritairement en bien des endroits.
Au dessus de Monceaux apparaîssent des fiefs :
- à Sench Amand - Saint Chamant :
Saint Chamant se situe dans la douce et riante vallée de la Somenha ou Soumigne qui n'aurait jamais du s'appeler Souvigne en français !
L'actuelle route entre Argentat et Tulle détruit hélas son charme et son calme. La cité est fort ancienne, plus de mille ans, notée dès 930. Le bourg fut qualifié de ville dès 1281 par son seigneur
- le château de Saint Chamant, dont le fief devait hommage à Ventadour selon l'état des relevés de 1501, fut édifié au dessus du village avant le XIIIème siècle. C'était une des plus importantes seigneuries de la vicomté de Ventadour. Il se composait d'une enceinte en promontoire avec en son centre un donjon certainement antérieur au XVème siècle. Une salle anciennement en coupole démantelée, avec trois meurtrières dans un mur épais est au premier niveau du sol. Un escalier construit dans l'épaisseur, emmuré, conduit à la salle du premier étage, voutée avec plusieurs clefs. Les deux autres étages n'existent plus. Le reste dans la cour ne permet pas de voir un éventuel logis. Ce château fut pris vers 1375 par les routiers lors des guerres contre les Anglais. Pierre Foucaud était un des ces bretons qui ravageaient le bas Limousin et en particulier la vicomté. Il se saisit de Saint Chamant et lança ses attaques contre le Rouergue et le Quercy, certainement parfois avec Geoffroy Tête Noire, encore après 1391 si l'on en croit Froissard.
Les seigneurs de Saint Chamant sont notés dès le XIème siècle, ils ont droit de sépulture en l'abbaye de Tulle avant 1115. Ils partent en croisade, certainement avec leurs suzerains Ventadour, deviennent rapidement fort connus et obtiennent pour leur chatellenie le titre de baronnie au XVIème siècle, puis de marquisat sous Louis XIII au XVIIème s.. Parmi eux se retrouvent des abbés, des abbesses, un grand maître du temple, un grand maréchal de Saint Jean de Jérusalem, des gouverneurs et des généraux. Un première race donne lieu au mariage de la dernière héritière, Catherine, fille de Jean et de Marie de Gimel, début XVème siècle, avec Jean d'Orgnac, seigneur du Pescher. Leur fils Guy relève le nom et crée la seconde race. Son descendant, François, époux de Madeleine de Montal, baron de St Chamant, comptour de Scorailles et seigneur de Lissac, voit sa fille Jeanne épouser Alain de Hautefort en 1585. Cette troisième race se perpétue par une veuve (Marie Anne des Cars) qui adopte son neveu Marie François et lui transmet titre et droits après 1746. Il y eut co-seigneurie à Saint Chamand, aux Philippe de Saint Viance et aux Lestranges de Lapleau. Un autre château semble y avoir co-existé dans le bourg, sans plus aucune trace.
En 1607, à l'époque de la troisième race, un François de Hautefort, au caractère irascible, défraya la chronique en faisant battre et menacer le lieutenent général de la Sénéchaussée de Tulle, Pierre de Fénis, venu avec ses hommes poursuivre un de ses invités. Il fit enfermé le magistrat dans le château, mutiler son cheval sous ses yeux, avant de le battre et menacer de l'occire ainsi que ses hommes. Il fallut que 800 hommes armés venus de Tulle attaquent la forteresse, avec des combats et des blessés, pour que le lieutenant général ne soit délivré. Le seigneur fut décolleté en effigie à Tulle sur ordre de Henri IV vers 1608. La tour fut arrasée au 1er étage à cette occasion et jamais reconstruire. Ses bois furent tous coupés bas. La révolution ne semble avoir épargné le château de Saint Chamant. Il est à noter que André Malraux et Josette Clotis s'installèrent en 1942 dans le château moderne construit à côté de la tour, en surplomb de la rue Principale. Ils le quittèrent ensuite en 1944 pour le château de Castelnaud après l'arrestation des deux frères d'André Malraux, résistants. Il s'implique dès lors eux également dans la Résistance même si André s'est marié entre temps. Josette Clotis lui donne deux fils et revient à Saint Chamant chercher sa mère en novembre 1944. Heurtée par le dernier wagon du train dont elle descend en marche, elle a les jambes fracassées; transportée à Tulle, elle y décédera quelques jours après. Privé ne se visite pas.
-le château de Soulage semblait faire hommage aux Saint Chamant (donc aux Ventadour) et aux Turenne. La famille Maffre originaire du Quercy possède la terre de Soulages, membre de celle de Saint Chamant. En 1488, noble Simon Maffre, seigneur, épouse Jeanne de Beaufort (famille des Papes limousins). En 1561, noble François Maffre fait hommage à François de Saint-Chamant. En 1623, le château est vendu à François Dumas de Neuville (la famille prend le titre de Dumas de Soulages), président au Présidial de Brive. Il reçoit le Roi Louis XIII à Brive en 1632; son fils, François II, hérite des charges de son père en 1660, habite l'Hôtel Labenche, à Brive ; il a pour épouse Marguerite de Nicolas. En 1762, la demeure est à messire Gabriel Dumas, seigneur de Soulages, écuyer, brigadier de la 2e compagnie des mousquetaires du roi. En 1792, Louis Dumas, dit Maffre de Soulages, émigre et sert dans l'armée des Condé père, fils et petit fils, les derniers ducs de Ventadour. Louis XVIII l'élève au grade de capitaine et lui donne le titre de marquis de Soulages. Il est maire de Saint-Chamant, marié avec Marie Sahuguet d'Amarzit. Sa fille épouse Jean de Lasteyrie. Elle porte Soulages à la famille de La Veyrie. Le château a conservé une tour de défense talutée octogonale datant du XIIIe siècle, à couronnement hourdé, percée d'archères. L'aile sud est ouverte de jolies fenêtres au XVe siècle. La tour octogonale d'escalier s'ouvre pour laisser place à une porte sculptée blasonnée et à des fenêtres superposées. Blasons sculptés à l'intérieur sur les murs de l'escalier. Dans ce qui fut la cour d'honneur, un oratoire style XVIIIe siècle. Ne se visite pas
- à Ménoire :
l'église de la paroisse est ancienne , du XIIème s., et une bulle pontificale de 1165 l'attribue à l'abbaye de Bonnesaigne près Ventadour ! Peut-on en tirer conclusion d'une influence des vicomtes ? Une motte y fut aménagée sur le puy de Chastellux (Chatel Luc?) à 800m et 90m au dessus du bourg, avec enceinte et fossés doubles concentriques. Ce Luc potentiel est-il à lier avec les Luc de Neuville et Saint-Cirgue ? Cela nous rattacherait à Ventadour indubitablement...
- à Nauvilla - Neuville :
Le cartulaire de Tulle recensait en 931 une chapelle à Neuville (Nova Villa). Datant du XVème siècle, l'église de Neuville a remplacé une ancienne église qui datait d'avant 1115 et construite sur l'actuel emplacement. Situé en face de l'église, en allant sur La Valette et Le Mons, se trouvait le château de Neuville — également nommé la « tour de Neuville » —, qui est aujourd'hui ruiné. En 1836, il appartient au notaire de la ville, M. Bros. En 1880, on pouvait encore voir cette tour qui dominait les lieux. Le dernier propriétaire, dans les années 1920, était M. Duclos, rentier, originaire de Brive. Le château est donc ruiné par manque d'entretien et non par des révolutionnaires, comme il est dit faussement. La tour s'est effondrée en 1919.
En 1930, on pouvait encore observer les armoiries des Vigier sur la porte de la chapelle sud. Les Vigier, seigneurs des lieux, probablement barons (pour Albussac, on parle en effet de la baronnie des Neuville), sont certainement issus par alliances des seigneurs de Luc, famille ancienne de la région (de Saint-Cirgue) qui avait été précédée par la famille de Neuville mentionnée au XIIIème siècle. Un Géraud de Luc, vers 1422, alias Vigier, seigneur de Neuville, est cité comme occupant le château. Un Jean Vigier, « seigneur de Neuville » est cité en 1508 échangeant des terres avec Jean de Gibertès. Ce Jean de Neuville, seigneur du lieu, de Luc et Reygades, co-seigneur de Mercoeur et de Forgés, était conseiller et chambellan du Roi. Il fut nommé par Charles VIII Sénéchal du Rouergue entre 1495 et 1498. Le château, fief protestant, fut incendié par les armées de Coligny en 1569, puis reconstruit. Le dernier Vigier de Neuville, Antoine II, eut deux filles, l'aînée, Marguerite, grand-mère par mariage de Lascaris d'Urfé, évêque de Limoges, et la puînée, Marie, qui est l'arrière grand-mère par alliance de Fénelon. La propriété fut revendue en 1642 par les Salignac de La Mothe-Fénelon à François Dumas, président du présidial de Brive, qui devient seigneur de Neuville après être devenu celui de Saint Chamant. Vers 1653, durant la Fronde, il héberge pendant six mois en son château des troupes à ses frais. Le fief passe ensuite à la marquise de Conros après 1725, et fut revendu la veille de la Révolution, en septembre 1788, par Élisabeth de Combarel de Bellegarde, veuve Conros, à Étienne Dumilhac, originaire de Saint-Privat. Il rendait hommage aux Ventadour depuis l'origine, hommage renouvelé en 1584 peut après les attaques des réformés "château, maison et titres furent dévorés" est-il noté. Le fief de Neuville est décrit : plusieurs villages et de nombreuses terres commune d'Argentat (ce qui confirme bien que malgré leurs rodomondades les Turenne n'avaient pas toute la ville sous leur vassalité, mensonge communément repris encore aujourd'hui par les autorités publiques et touristiques - décidement Ventadour est volontairement ignoré depuis des siècles !), à Monceaux, à Albussac, à Chenalliers, la co-seigneurie à Lagarde.
Le chanoine Poulbrière donne une parfaite description de la demeure au XIXème siècle. Le château avait la forme d'un carré long, de plusieurs étages, divisé à l'intérieur par un mur de refend. Ce mur correspondait en façade à une belle tour encageant l'escalier. Au dessus de l'escalier, la tour, se flanquant d'un tourillon pour s'élever encore, présentait à hauteur de comble une salle pour l'observation. Tels quels, ces restes n'indiquent pas une époque antérieures au XVème s. Ainsi est confirmé l'incendie qui brûla le château lors des guerres de religion. illustration : la tour détruite cop.SHAV
- à Albussac :
- Roc de Vic fut un oppidum gallo-romain et certainement, plus vieux encore, celtique. C'est aujourd'hui un lieu de pélerinage et de tourisme qui offre une vue splendide sur le bas Limousin et la Haute Auvergne. Mais ce fut également un castrum médiéval attesté en 1191 par un don des Turenne à l'abbaye d'Obazine pour des dégâts commis par leurs hommes lors de la construction des défenses. Pouvons nous avancer que ce fort regardant Ventadour voulait empêcher l'avancée des cousins présents autour ou même leur soustraire la position ? Se visite
- la maison forte de Malbuisson avec des seigneurs de Malboysso semblant dépendre de l'abbaye de Tulle
- à Forgès :
fut de Saint Chamand après avoir été chef de seigneurie, d'où jusqu'en 1789 des Assisses de justice tournantes. Donnons la à Ventadour en dernier ressort, peut être partagé.
- à La Garda - Lagarde :
la co-seigneurie est assez complexe car alliée et remplacée au cours des siècles : dont les Lagarde, d'Estresses de Beaulieu, les Montagnac et les d'Ambert de Sérilhac (encore ceux de Ventadour) etc. En sort le cardinal Géraud de La Garde de Daumar (mort à Avignon, le 27 septembre 1343), Maître général de l'ordre des Prêcheurs en 1342, fils de Bernard Ier de La Garde (mort en 1327) seigneur de La Garde et de Daumar près de Tulle. Le Pape Clément VI disait qu'il était de son sang, donc un proche parent. Ceci explique cela. Son frère, Étienne de La Garde, a été nommé archevêque d'Arles en décembre 1350. Un autre frère, Guillaume de La Garde, a été archevêque de Braga. Aux temps féodaux, le seigneur de Lagarde, seul propriétaire des terres, hommage aux Ventadour sauf 3 villages à Turenne. A la fin du XIVe siècle, les coseigneurs du village se multiplient, ils sont marchands et magistrats de Tulle, anoblis. Les seigneurs de Lagarde, après de brillantes alliances, partent vers l'Auvergne et vendent l'édifice à la famille de Lauthonie chassés de leur château de Lafarge, à Sainte Fortunade, par un incendie. Mais cette famille est ruinée par la Révolution, et en 1830, une famille alliée, les d'Ambert de Serillac, achète le château. C'est au XVIIe siècle que la tour Ouest et le corps principal furent élevés par la famille de Lauthonie, et complétés en 1764 par la tour Est, construite par M. de Chaunac qui avait épousé une demoiselle de Lauthonie. Sur la tour Est du château on peut voir une pierre sculptée représentant les blasons des familles de Lauthonie et d'Ambert de Sérilhac... Ne se visite pas
- à Marc la Tour :
plus aucun vestige de ladite tour dont on ne sait rien sinon qu'elle aurait du être à Marc le vieux en raison de l'antériorité mais c'est à Marc la Tour que la toponymie nous invite à chercher sa motte. Ne serait-ce pas le puy de l'Hort surpomblant de 57m le petit bourg et où se place aujourd'hui la réserve d'eau ?
- à Sainte Fortunade
-de Lavaur :
Le site de la commune et M. Courteix donnent une synthèse de l'histoire locale. Le château comtal est édifié sur le promontoire d’une ancienne motte féodale bien visible depuis la ruelle du « Barry-Bas ». Une forte tour ronde de quatre niveaux couronnée de mâchicoulis est la partie la plus ancienne avec le logis attenant de l’ouest qui a perdu sa galerie défensive. Au XVe siècle fut adjointe l’aile rectangulaire flanquée de deux échauguettes ainsi que la tour qui encage l’escalier à vis, aux marches basses, permettant à un animal bâté de les gravir. L’intérieur, très restauré aux XVIIIe et XIXe siècles, garde des pièces monumentales aux plafonds à la française et aux volumes majestueux. Les cheminées de marbre du XIXe aux blasons sculptés dissimulent et remplacent celles des siècles précédents. La tour-escalier présente des encadrements de fenêtres ouvragés avec des éléments de remploi. Le blason des comtes orne son entrée. Le château, propriété communale depuis 1952, abrite les services de la Mairie et des salles d’exposition et de réunions.
Situé au dessus de la porte d’entrée principale du château, le blason des comtes peut se lire : « Au premier parti, d’azur à trois rocs d’échiquier d’or ; au second, d’or à un lion de sable couronné de même et lampassé de gueule ». L'hommage se faisait à Ventadour, Ebles VII donnait son consentement à une vente en 1294.
Les plus anciens seigneurs du lieu furent les chevaliers de Tulle, dont, vers 1400, Marie de Tulle épousa un Fouchier, co-seigneur de Sainte-Fortunade par les nombreuses possessions de sa famille. En 1560, Catherine Fouchier de Sainte-Fortunade épousera Bonnaventure de Souries de Lavaur d’une famille du village de Lavaur d’Espagnac, où subsiste la petite motte féodale origine du nom. La famille de Lavaur de Sainte-Fortunade, percepteur des impôts à Tulle, donna de puissants seigneurs au pays de Tulle. Ils s’illustrèrent particulièrement pendant les guerres de religion en défendant cette ville et en payant de leurs deniers la majeure partie de la rançon exigée par les protestants. Ils comptent parmi eux au fil des siècles, un secrétaire du roi trésorier général au XVIIIe, des chanoines de la cathédrale, un chevalier de Malte et trois gradés de l’armée qui s’illustrèrent pendant la guerre de 1870.
À la première devise aux références religieuses gravée sur la traverse basse du linteau «Voluntas mea est inte », succède « Fortis fortuna comes » que l’on peut traduire par « La chance est la compagne de la force ».
- Boussac : au dessus de Laguenne, face à Marc et Ladignac. Un pavillon quadrangulaire sur corps de logis et une tour à machicoulis sont ses éléments. Boussac rendait également hommage à Ventadour. Le repaire appartint aux Boussac, alliés aux Pouget, aux Lavaur et aux Lentilhac aux XVIème et XVIIème siècles. ne se visite pas
Une dizaine d'autres châteaux et maisons nobles peuplent le territoire de cette paroisse qui, avec ses 3.736 ha, est l'une des plus vastes de la Corrèze.
-Chabrignac fut un castel, non loin du bourg, aux nobles du même nom
- la Morguie, au-dessus de Mulatet, est remarquable à plus d'un titre. Construit en 1610 par Fénis de la Combes, le financier de la Manufacture d'armes de Tulle, il fut légué à l'évêché au XVIIIème siècle. Cette résidence d'été des prélats vendue en 1884, recèle, sur les murs de son salon, les armoiries un peu inexactes de tous les évêques de Tulle; et dans un bois proche, une des dernières glacières restant dans le département. ne se visite pas
Autre fortifications sur motte certainement à Puy Châtel, dominant la Corrèze, alors qu'à côté se trouvent ceux plus récents du Puy de la Place et de Nialat, Clairefage, plus loin celui de la Borde, la Vialatte dont un seigneur épousa en 1471, Delphine, fille du seigneur du Chambon de Neuvic et de Cécile de Roger de Beaufort (descendante de la famille des papes), et deux toponymies intéressantes avec la Tour Delbos et le Puy Templard.
En 1501 est répertorié un castel à Champagnac. Où se trouvait-il ?
- à Laguenne :
situation complexe de cette ville sur la Ganette, entre les évêques de Tulle (droits sur le vin) et hommage de certains (nombreux) fieffés aux Ventadour (en 1300).
Château de la Salvanie dans le bourg. (étude de Laguenne à venir)
- à Ladignac :
- Châteaufort : en hauteur de l'actuelle route de Tulle à Argentat et de la vallée de la Ganette qui vient de La Garde Enval. Des Chanac au XIVème s., finalement aux Soudeilles et aux Sclafer de Chaunac, seigneurs de Champagnac la Prune. Parions hommage aux Ventadour ! Notons le site de la "Combe aux Seigneurs" à la sortie du Bourg.
à Pandrinia - Pandrigne :
- les seigneurs de Pandrigne sont tracés dès le Xème siècle et jusqu'au XIIème mais leur château reste inconnu. Il passa en titre des de Chanac au XIVème à Louis de Soudeilles en 1555. Où était cette motte ? Après recherche, le puy s'élevant à plus de 80m juste au-dessus de Courbiat et de Pandrigne serait parfaitement conforme à un site fortifié. A sonder...
- le château de la Rochette, issu d'un fief appartenant autrefois à Espagnac et devenu baronnie. Il était bâti sur un versant qui domine la vallée de la St Bonnette et l'ancienne construction était inachevée avant sa destruction, dira au XIXème siècle M. Mongenc de Saint Avid. Attesté au XIIIème siècle à la famille des Rochettes, puis des Aimoin, puis au XVème des Chautard. On retrouve comme propriétaires les seigneurs de Chabannes (Madic) en 1696 puis après les de Borderie de Vernéjoux (Vernéjoux de Sérandon?) semblant indiquer une relation vassale ou familiale. Un castel a été reconstruit sur les vestiges de l'ancien. Accès par le Coudert d'Espagnac. Ne se visite pas
- à Espagnac :
la paroisse présente une forme un peu particulire en ce qu'elle constitue un plateau attaché à celui dit de "Clergoux" mais qu'elle s'enfonce dans la vallée de la Saint Bonnette qui nait d'ailleurs au sud de la commune de Clergoux et s'écoule vers Laguenne et Tulle avant de se jeter dans la Corrèze. La vallée se creuse après Espagnac et fort logiquement se trouvent divers sites au lieu de sa confluence avec le Salabert venant de Saint Martial de Gimel. Au lieu de cette confluence, 260m en dessous de sa source, la Saint Bonnette était surveillée par divers repaires :
-château de Puy de Val (Puydeval aujourd'hui) : M. Deroo a publié dans le bulletin municipal d'Espanac n°34 de 2011 une étude complète que nous nous permettons de reproduire car elle éclaire certains de nos sujets : "la seigneurie de Puy de Val ou tout au moins l’apparition d’une forteresse à Espagnac fait suite à un litige entre les chevaliers de Tulle et le peuple qui a sollicité la protection du monastère. Celui-ci fondé au VIIé siècle dédié à St Michel autour duquel se regroupe les habitants du pays, le premier monastère est détruit par les normands, puis reconstruit, il disparaît au XIe siècle. En 1095 une nouvelle construction est entreprise, la première pierre est posée en 1130, elle sera terminée deux siècles plus tard en 1317, l’abbatiale deviendra cathédrale. Au Xe siècle, le château de Tulle était donc aux mains d’un certain nombre de maisons de chevalerie (NB vassaux des Ventadour pour certains et des évêques pour les autres) : Chanac, Avaléna, Foucher et Rajaud, ces chevaliers exerçaient des droits seigneuriaux, non seulement dans l’enceinte mais aussi au-delà du périmètre de l’agglomération. Le peuple se révolta et se mit sous la protection du monastère. Les chevaliers n’acceptèrent pas cette domination, ils vendent leurs parts de seigneurie et les droits qu’ils percevaient sur la ville et partent se fixer à la campagne ; c’est probablement ainsi que Guillaume de Puy de Val dit « ALMOINS » semble être le premier personnage connu vers 1300. A Espagnac, de nombreuses justices fonctionnent indépendamment de celles des seigneuries ecclésiales et le seigneur de Puy de Val tient ses assises à Tulle au pont de la barrière où il a son pilier de justice. Les textes de René FAGE signalent que les repaires de ces chevaliers sont limités à un logis personnel, un jardin, une chènevière et une ou deux métairies. Les familles nobles sont les premières à avoir des noms bien établis. Elles prennent un nom de fief qui affirme leur noblesse : elles possèdent alors une terre noble qui donne des droits et peut produire des redevances payées par les paysans. Si les familles nobles avaient déjà un patronyme, elles peuvent ajouter un nom de terre. Elles peuvent aussi abandonner le patronyme initial. Un homme peut aussi prendre le nom de fief de sa femme. Ces notions sur les patronymes sont utiles pour comprendre ce qui suit : le premier Puydeval, Guillaume de Puydeval dit Almoins, apparaît en 1300, dans le tableau de filiation simplifiée. Ce Guillaume de Puydeval alias Almoins est marié à une Marguerite de Rajaud, ils ont un fils, Guy de Puydeval, qui épouse de Hélie de la Jugie. Elle est la fille de Jacques Judicis, anobli en 1338 et de Guillaumette Rogier, sœur du Pape Clément VI (son cousin germain Rogier-Beaufort devint lui aussi pape, sous le nom de Grégoire XI). Leur fils, Guillaume de la Jugie changea de nom et devint Guillaume de la Jugie. L'oncle de sa femme, Nicolas de la Jugie, baron de Rieux en Languedoc, naquit en Limousin au hameau de La Jugie, dans la paroisse d’Eyrein, près de Rosiers-d’Égletons. Il était le fils de Jacques de La Jugie et de Guillaumette Roger, sœur de Pierre, futur Clément VI. Nicolas devenu veuf de Delphine de Châteauneuf, étant sans héritier, épousa en secondes noces Éléonore de Mirepoix. Le mariage se fit, en 1368, dans le Vivarais puisque Nicolas est dit seigneur de Liviers dont le château domine Privas. Ce nouveau mariage ne lui ayant point donné l’héritier escompté, il testa le 26 mars 1374, léguant ses domaines à Guillaume de Puydeval, fils de de sa sœur Élise ou Hélie à condition que celui-ci reprenne son nom et ses armes".
La liaison entre le Vivarais et Ventadour ne date-t'elle pas de cette époque, lorsque les Rogier sont seigneur en Vivarais pour l'un et Pape en Avignon pour l'autre des deux frères ? Ne peut-on imaginer que c'est à cette époque que va naître la relation entre les trois maisons de Ventadour, de Beaufort et de Lévis ? Elle donnera le mariage de Louis 1er de Ventadour avec Catherine de Beaufort vers 1455 et de leur fille unique, Blanche, dernière des Ventadour de la 1ère race, avec Louis de Lévis vers 1460. Comme nul ne sait comment les Ventadour et les Lévis décidèrent d'unir l'influence de leurs maisons, on peut imaginer aisément que cela se fit par l'entremise de la parentèle des papes rosièrois. En deux mariages successifs se fit la jonction entre Beaufort et Lévis. Cette hypothèse probable présente le mérite d'offrir une réponse logique !
En 1615, la famille de La Jugie alliance avec les Noailles puis les Saint Martial, barons de Conros en Haute Auvergne. En 1647, Henri de Saint Martial de Puy de Val est aumônier du roi et prieur de Vedrenne d'Egletons et prévôt de Nantes. Sa famille alliée aux Pompadour vend la propriété en 1776 à François Darche, seigneur d'Ambrugeat, conseiller au Parlement de Bordeaux. Il est victime de la Terreur et exécuté le 4 avril 1794 ; son fils avait émigré. Le château de la Jugie est confisqué et revendu bien national. Après 1850, la demeure est habitée par la famille d'historiens et d'archéologues régionaux, les Fages dont René fera la description. Le château a été largement remanié. In fine Puydeval relevait-il pour partie de Ventadour ? Nous avons tendance à répondre par l'affirmative pour partie au moins. En tous cas, l'influence y était perceptible. ne se visite pas
- château de Lavaur : ancien repaire sur le versant sud presque face à Puy de Val. Il était totalement enruiné au XIXème siècle, seule une partie de tour de deux étages subsistait avant 1850. On n'en sait guère plus sinon que les Lavaur de Sainte Fortunade en sont certainement issus. En1560, Catherine Fouchier de Sainte-Fortunade épouse Bonnaventure de Souries de Lavaur. Ce dernier est dit originaire du village de Lavaur d’Espagnac.
- le Palissou : toponymie intéressante au pont sur la rivière suggérant une palissade, un lieu fermé et fortifié ancien (voir Palisse). Ancien point de péage ?
- le Charlu, rive droite du Salabert, juste avant la jonction avec la Saint Bonnette : puy dominant de 40m l'ajustan ; en double raison de la toponymie et de la topographie, un autre repaire ancien y est mentionné au début du XVIIème s. comme appartenant à Jean de Charlu, vicaire. Mais il date certainement de plus avant. Il domine la "vallée des pommiers", il s'agit de la paroisse de Saint Martial de Gimel mais à seulement quelques centaines de mètres du village de Saint Bonnet Avalouze et de Puy de Val. Ce beau repaire magnifiquement restauré se loue en gite - vous pouvez obtenir les informations sur www.charlu-correze.com illustration : le Charlu de St Martial
- à Saint Bonnet Avalouze : pas de maison forte
- à Chanac :
Là encore difficile de se retrouver entre droits féodaux des évêques de Tulle et des seigneurs de Ventadour. Nous dirons simplement que la seigneurie laïque de Chanac semble avoir donné des croisés cités dans le cartulaire de Tulle. On les retrouve à Chanac, Pandrigne, Ladignac mais surtout à Tulle où ils sont tôt partis et donnent nom à la tour et à la porte bien connues. Ils ont le château de Tulle dont ils sont seigneurs. Ils ont également moult biens dans plusieurs paroisses et diverses provinces. Ils iront s'établir à Allassac d'où sortiront nombre d'évêques, de cardinaux et même un patriarche d'Alexandrie au XIVème siècle, signe évident d'une bienveillance du Rosier papal limousin. Au XVIIème siècle, Chanac dépend de Gimel par les Lentilhac, barons de cette châtellenie qui s'étaient alliès aux Gimel. On sait leur hommage à Ventadour. Où était leur repaire disparu depuis longtemps à Cahnac ? Le puy des Druides se situe au dessus de bourg qu'il domine à l'Ouest de 56 mètres. Une pente à l'Est, en forme de véritable précipice, surplombe de 155m la Saint Bonnette. Nous y subodorons une motte, ce qui n'empêche pas les druides avant, bien au contraire. A sonder...
- à Gimel :
Ce bourg médiéval présente la particularité d'être un rocher construit sur une impressionante faille géologique dans laquelle se précipite le torrent dit de Gimel ou la Montana. Elle vient des hauteurs des montagnes des Monédières où elle nait à Saint Yrieix le Déjalat. A Gimel elle se jette entre deux rochers par trois sauts dans un précipice de plus de 140 mètres de haut. La Montana (ou Montane en français) conflue plus bas avec la St Bonnette à Laguenne avant de se jeter dans la Corrèze à Tulle.
Le bourg actuel de Gimel est cité dès 936 dans Cartulaire de Tulle avec son église dédiée à St Pardoux. Gimel possédait autrefois deux châteaux : le château-bas, ou de "la Roche-Basse", et le château-haut, ou de "la Roche-haute". Cette dualité de bourgs, d’églises, de châteaux, expliquerait pour certains et selon la tradition orale l’étymologie du nom Gimel, à savoir jumeaux "dzumel" en langue limousine, "gemella" en latin). Durant la période médiévale, Gimel s’inscrit déjà dans le vaste cadre du duché d’Aquitaine, à l’histoire mouvementée avec trois siècles de luttes entre monarchies anglaise et française.
Deux châtellenies avaient donc été crées de date ancienne. L'une est installée sur le rocher le plus haut de Gimel, à 440m d'altitude, dominant de plus de 30 mètres la boucle de la rivière qui est presque un cingle. La seconde, était en bas du bourg, la Roche basse, à côté du pont sur la Montana, à peu près 60m plus bas. Il englobait une ancienne église dans son enclos. Au XVème siècle, les guerres ruinèrent l'une et l'autre, aussi une nouvelle église fut construite plus haut avec pas mal de pierres de l'ancienne et du château abandonné. Le temps fini d'effacer les traces. L'évêque de Limoges obligea à ce que l'édifice religieux soit placé en dehors d'un château, sage précaution ! .....
L’origine d’un pouvoir seigneurial à Gimel et de la fondation des châteaux reste obscure ; les vicomtes d’AUBUSSON se trouvent possessionnés à Gimel dès le Xème siècle, mais ils ne sont plus cités à partir de la fin du XIème siècle. A Gimel bas ou Roche basse étaient seigneurs les Beaufort attestés en 1268 par le Parlement de Paris. Le chevalier Raoul avait été en conflit avec le sénéchal du Roi d'Angleterre en Limousin, la Roche avait été assiégé par les anglais et il dut capituler. Le roi de France lui rendit droit et ordonna que son château soit rendu en état antérieur. La réparation n'étant pas assurée, Raoul déposa nouvelle demande et un inventaire fut dressé. Il révèle la nature sommaire des biens d'une petite châtellenie : 25 pourpoints et autant de chapeaux de fer, 30 lances, 2 javelots, 4 boucliers, 6 arbalètes de corne et 6 de bois, une seule cuirasse... 20 lits complets, des bancs et coffres, 10 épées, 1 âne et 10 porcs plus des grains. Raoul fut qualifié de "seignour del chastel de Gimel sotra". Le château de la Roche Basse fut occupé par les hommes du roi d’Angleterre une nouvelle fois en 1373.
Puis vinrent peu après, les Gimel, certainement à Roche haute. Un Bernard, vicomte de Gimel, existe dès le XIème siècle ; à sa suite figurent de nombreux représentants de cette importante famille, attestée durant tout le Moyen-Age, notamment pour ses rapports avec l’Eglise. Un Elie de Gimel est archidiacre de Limoges avant 1095, un autre Elie a la même dignité en 1146 et 1170, Hugues de Gimel est archiprêtre en 1146, puis doyen de la cathédrale en 1162. En 1217, un troisième Elie est archidiacre et grand chantre toujours à Limoges. Ils avaient droit de sépulture à l'abbaye de Tulle dès 1115, ils sont titrés vicomtes en 1126 pour Ranulfe, en 1164 pour Raynaud et en 1178 pour Elie. Il est cité, lors d'un jugement en champs clos de lutte à Beaulieu convoqué par le seigneur de Turenne, juste après ceux de Limoges et Comborn et devant les barons de Talleyrand, Lastour, Chabannais, Castelnau, Gourdon etc. Sauf erreur, les Ventadour n'y sont pas invités. Mesquinerie familiale et tentative d'arracher un féal ? Comme par hasard Raynaud avait prêté hommage à Turenne dès 1164... La vicomté disparut ensuite et fut troquée contre le titre plus modeste de baronnie. A cette époque, Gimel doit commencer à rendre hommage à Ventadour. Pierre de Gimel est croisé en 1252 sous St Louis et Guillaume fut élevé évêque de Carthage en 1340. Aux XIVème et XVème s. Blanche et Marguerite sont supèrieures de Bonnesagne. Peu après, en 1596, Pierre François de Gimel et son associé Antoine de Lavaur sont de la Ligue et en profitent pour terroriser le pays et attaquer les gens du Roi. Le Lieutenant général en Limousin, baron de Chamberet, lève une armée pour attaquer Gimel à la demande de la duchesse d'Angoulême. Fille légitimée du roi Henri II et épouse de François de Montmorency, alliée aux Ventadour, sa vie de la duchesse se trouve étroitement proche du destin de la famille royale et de la maison des Montmorency. Elle constitue un appui important de la monarchie durant le soulèvement de la Ligue.
Dès la seconde moitié du XIIIème siècle, les Maumont possèdent le château-haut ; les Gimel plus ou moins ruinés s'étaient transportés en bas depuis la fin du XIIIème siècle. Les alliances entre les Gimel et les Maumont - Combarel sont fréquentes et un aller-retour semble même s'être opéré au XVème s. La dualité des châteaux et de la seigneurie dura jusqu’à la vente, en 1493, du château de la Roche Haute à Gabriel de Gimel, seigneur du Château-bas qui revient à la Roche Haute. Après cet achat, on peut penser que le château-bas, déjà en mauvais état, a été abandonné ; d’autant plus qu’à cette date, l’église qui se trouvait jusqu’alors dans l’enceinte du château-bas est transférée à son emplacement actuel. Les Gimel semblent avoir disparu après le début du XVIIème siècle lorsque Gasparde de Gimel épousa Antoine de Lavaur en 1608. Mathilde, leur fille, épousa François de Lentihac en 1625 et le fils puiné devint marquit de Gimel. Son frère aîne ayant épousé Philiberte de Sédières devint vicomte. Ils rendaient hommage à Ventadour.
- à Saint Martial de Gimel
-seigneurie de Saint Martial de la maison de Gimel, dans le bourg. Elle relevait de Ventadour. De la maison de Saint Martial encore en 1604, Jean Martin du nom était aumonier du Roi et prieur de Glénic à Servières. Disparue
-autre seigneurie, dépendant de Gimel et Ventadour et semble t-il un peu de Turenne (?), le Pouget la Tour, au dessus du bourg. En 1263 un seigneur Guy de Viger del Poget rend hommage à Gimel. Au XIVème siècle le château a, selon un acte notarial, une tour donjon de plus de deux étages, une belle salle avce plusieurs meurtrières faîte en croix, avec fossé le tout sur motte. Au XVème s. il est aux Beaufort (de la Roche). En 1576, le 20 octobre, les calvinistes le prennent. Les Ventadour le délivrent.
- à Saint Priest de Gimel :
Château installé dans le bourg et disparu depuis longtemps. Il était aux Gimel et à leur famille et dépendait de Ventadour. Plus loin les Valon d'Ambrugeac, branche des Saint Yboly (Saint Hippolyte) et des Beynette de Neuvic Champier d'Ambrugeac, prirent le nom de Saint Priest après les Rabanides, les Mensat et les Borderies de Vernéjoux, vers le XVIIIème siècle, et construisirent au XIXème un castel moderne à la Bastide, qui n'était pas de Saint Priest, près de la vicairie du bourg. M. de Valon fut un homme politique célèbre au XIXème siècle. Sénateur et président du département, ce fut aussi le plus important propriétaire foncier de la Corrèze. La famille disparut sans descendance à l'aube du XXème siècle.
Sur la vallée de la Corrèze, des Monédières à Tulle
Ayant découvert les vallées en dessous de Tulle qui relient la ville à la Dordogne, il convient de s'intéresser à celle de la rivière Corrèze, au-dessus et à l'Est, venant du massif des Monédières.
La Corrèze prend sa source sur le plateau de Millevaches, dans le parc naturel régional de Millevaches en Limousin, à plus de 910 mètres d'altitude, au sud de la commune de Pérols-sur-Vézère, dans la partie nord de la forêt domaniale de Larfeuil. Elle s'écoule vers le sud ouest et traverse successivement Corrèze puis le chef de diocèse Tulle. Elle pénètre ensuite dans la plaine du bassin de Brive et arrose les villes de Malemort-sur-Corrèze et Brive-la-Gaillarde. Elle conflue avec la Vézère en rive gauche, à 98 mètres d'altitude, en limite des communes de Saint-Pantaléon-de-Larche et d'Ussac, quelques kilomètres à l'ouest de Brive la Gaillarde. Avec 94,6 km, la Corrèze est le plus long affluent de la Vézère. Son bassin versant de 1 158 km2, entièrement inclus dans le département de la Corrèze, représente 20 % du territoire corrézien et près d'un tiers du bassin versant de la Vézère. Elle a 73 affluents et irrigue 23 communes. Ses crues sont violentes et spontanées. Elles causent énormément de dégâts dans les villes et villages qu'elle traverse. Tulle, Malemort et Brive sont parmi les villes les plus régulièrement dévastées. Il est à noter que c'est la seule vallée qui ne se dirige pas plein sud vers la Dordogne. Elle marque à peu près symboliquement la limite avec les terres de l'apanage de Comborn.
La Corrèze nait sur la commune de Pérols non loin de Bonnefond (Bonne fontaine de Saint Médard) en plateau de Millevache, à l'ouest de Meymac. Elle s'écoule tranquillement sur les terres hautes dans les tourbières où elle se charge de minéraux et d'oxygène avant de commencer à creuser sa vallée et ses gorges de plus en plus profondemment à partir de la limite des paroisses de Bonnefont et de Saint Yrieix, au milieu des Puy des Monédières.
- à Saint Yrieix
Cette paroisse est la première du haut pays d'Egletons qui présente un intérêt stratégique majeur pour la vicomté. On a vu combien il faut envisager les voies de communication au travers des vallées et non des routes actuelles qui n'existaient pas à l'époque, hormis quelques rares exemples. Ici, dans la vallée aujourd'hui complètement abandonnée, passaient la voie de Mauriac à Limoges par Neuvic, Egletons, Treignac et Chamberet, mais également celle de Tulle vers Bonnefont et Bugeat ou Meymac. Logiquement, au moins trois maisons fortes vont les surveiller.
- Montamar : en l'absence de châtellenie avérée à Bonnefond (qui relevait en essentiel de Comborn comme l'indique un don d'Archambaut V en 1159 pour une grange à Chadebec, dépendant d'Obazine), Montamar est le premier établissement fortifié et à vocation seigneuriale que l'on trouve dans la montagne. C'est un repaire installé sur un piton à 660m d'altitude dominant d'une vingtaine de mètres un cingle, une boucle, de la Corrèze. Autour le lui, dans la vallée étroite, dominent les puys plus hauts de Lignou à 740m et de Chamenaud à 845m, à la limite des paroisses de Bonnefont, Grandsaigne et Saint Yrieix.
Entre les hameaux de Lanour et Viossanges, la motte de Montamar (grande montagne) est composée d’une plate-forme ovale couronnée d’une construction, flanquée au Nord et au Sud de deux plates-formes secondaires. Un article dans la revue archéologique médiévale donne des informations complémentaires de celles que nous avons pu réaliser sur place au titre de la SHAV. Des fouilles, sous la direction de M. Antignac, ont été effectuées un peu plus tôt, en 1981 et 1982, concluant que la motte a été aménagée par remodelage du relief pré-existant. L’accès de l’ouvrage se faisait à l'ouest et était défendu par deux fossés et remparts de terre en demi-lune probablement renforcés d'une palissade en bois, comme il se faisait un peu plus avant. Sa position était purement stratégique car on ne repère aucun lieu de vie dans le passé. Elle est composée de deux parties édifiées en deux périodes, semble t'il. La première est le « logis », limité à une seule salle rectangulaire orientée à l'ouest et mesurant intérieurement 11,30 x 5,70 m, bâti en pierres taillées de granite d’origine locale. La façade, côté cour, est percée d’une porte de 1,56 m de large. Par ailleurs, près du pignon Sud, on a découvert trois éléments de piédroit d’une fenêtre à embrasure chanfreinée ainsi qu’un claveau arqué, décoré en pan coupé à quatre bossettes. Le sol de cette salle est en terre battue, recouvrant le rocher arasé, avec un pendage N.-S. selon la pente naturelle du terrain. Contre le mur du pignon Nord, un foyer avait été sommairement aménagé sur la roche naturelle (2,50 x 0,95 m). Près de ce foyer, une dépression du sol a été utilisée en dépotoir. Contre ce pignon, une remise a été édifiée postérieurement au logis. De forme trapézoïdale (4,90 x 3,50 m), elle est construite en appareil moyen, irrégulier, et possède sur la cour une porte charretière de 2,40 m de large. Le responsable des fouille y voit une remise, nous y voyons plutôt une amorce de tour fruste ou de donjon basique. Un peu de mobilier archéologique a été retrouvé et comprend de la céramique et divers objets de métal, dont une assiette en fer à fond lenticulaire. L’abandon de cette maison forte doit se situer dans la seconde moitié du XIVème siècle, plutôt début XVIème selon nous ; la construction et l’utilisation des bâtiments doivent recouvrir un laps de temps relativement court. L’architecture est typique de la fin du XIIIème, début XIVème s. Le matériel archéologique, très homogène chronologiquement, est du XIVème s. ; les résultats des datations radiocarbone donnent 1350 + 75 et 1370 + 75. Il y a une série d'évênements locaux qui corroborent ces données et l’histoire du comté, troublée au XIVe siècle par la guerre franco-anglaise : en 1350 Edouard, prince de Galles et d'Aquitaine attaque le Limousin et l'Auvergne, Meymac est brûlée, Bernard de Ventadour est élevé comte par Philippe VI, Duguesclin est devant Ussel en 1371 et en 1388 à lieu la prise de Ventadour par Geoffroy Tête noire. illustrations : plan IGN - plan cop. SHAV du site, de la motte et du logis - photo cop. La Montagne N. Cariolot
Cependant, il est intéressant de noter que le nom de Montamar n’apparaît qu’en 1640, par usage du titre de baron de Saint-Yrieix-Montamar, adopté par un Sédière Lentillac. Ainsi, crée-t-on une baronnie, en sous-entendant, au vu d’une fortification de terre abandonnée, qu’une simple seigneurie foncière avait pu être seigneurie banale (le droit de ban est un droit à commander et accessosirement à juger). En choisissant, pour élever leur maison forte, le site de Montamar, les seigneurs de Saint-Yrieix firent montre de plus d'ambition que la construction d’un simple repaire. La motte, en effet, contrôle étroitement la route de Bonnefont et de Barsanges dont tout le trafic passait à son pied. C'est également une route monastique qui desservait la grange de l'abbaye d'Obazine établie à Chadebec (Bonnefond voir plus haut). Au Moyen-Age, l'étang des Fades, aujourd'hui disparu, fournissait un important contingent de poissons qui était acheminé vers l'abbaye par cette route. Montamar était un lieu idéal de surveillance et vu la situation naturelle du site, une place facile à défendre. Il ne faut pas oublier qu'à cette époque de vastes landes de bruyères et quelques forêts de hêtres existaient dans un paysage ouvert contrairement à notre actuel écosystème fermé, avec les plantations de résineux à perte de vue. On est donc en présence d’un phénomène assez ambitieux, aux contours d'une élévation seigneuriale. Au XIVème siècle, la seigneurie de Saint-Yrieix n’avait pas la caractéristiques d’une seigneurie châtelaine, pourtant on assiste à une véritable tentative d’occupation d’un droit banal, et cette ambiguïté servira pour la demande de création de la baronnie.
Cette maison forte de la fin du Moyen Âge est intéressante car elle est assez différente des châteaux et des mottes précoces. Se visite - suivre fléchage depuis le Bourg de St Yrieix le Déjalat - Marche à pied après stationnement.
- Chastel Merle : à moins de 2000m de Saint Yrieix et de 1000m du village de Commerly, se situe le Puy de Chastel Merle dont la toponymie se passe de commentaires. A 116 m au-dessus du torrent de la Dadalouze, le castrum domine l'ajustan, la confluence, avec la Corrèze. Ce point marque la séparation du chemin vers Chadebec et Bonnefont puis Bugeat d'avec celui vers la Naucodie puis Ambugeac et Meymac. De chastel Merle il ne reste rien, du moins que l'on sâche. Le site fut déforesté il y a quelques années mais est replanté depuis. A sonder...
illustration : Les Pradeleix et le Puy Chamenaud au dessus de la vallée de la Dadalouze et de la Corrèze, vus de Chastel Merle - cop.blog de dominik19 ?
- dans le bourg de Saint Yrieix, mention d'un château dont un lieu-dit "le pré du Château" reste le seul élément. En 1778, son propriétaire, le marquis de Soudeilles vint une dernière fois le visiter. Il était colonel d'un régiment de dragons royaux mais fort désargenté. Il décida de vendre ses domaines composés du castel, de deux fermes à Lachau et Laborde et de plusieurs terres éparses sur 27 villages, la forêt de St Yrieix et des rentes dans le bourg (locations). Le prix en fut de 91 000 livres en 1785 (l'équivallence en Euros est délicate selon les bases de calcul -valeur du métal d'argent ou valeur des biens- et fluctue entre 1.30 et 12 €/livre, soit une moyenne de valeur de 600 000€). Il se démit également de Soudeilles. Il termina ainsi la longue lignée des seigneurs du lieu dont on retiendra les Saint Yrieix en premier, attestés vers l'an 1000, les Faucher au XIIIème s., qui renouvellent l'hommage à Ebles VII de Ventadour, les Favars de Lestranges du XIVème au XVème, puis les Sédières qui y subissent la Ligue et les attaques des Gimel qui volent en brigands pour 2000 écus de grains (14000€) et enfin les Soudeilles en 1719. La description a été faîte au moment de la vente en 1778 : au nord de l'église, quatre petites tourelles cul de lampe et un corps de logis plus ou moins carré, une tour (vestige d'un donjon?) le tout mal couvert et un portail avec une ferme dans le bourg. Ce descriptif fait penser que cela devait ressembler à la maison forte d'Ambrugeac.
- à Granda Sanha - Gransaignes,
tout porterait à penser que nous pénétrons là en territoire de Comborn, où fut la paroisse de toute façon avant 1100. Cependant rien ne le prouve pour après, et surtout pas le relief et son orientation. On sait que les sommets délimitaient les deux vicomtés, que les vallèes étaient leur via magistrala. A Gransaignes, la paroisse est en surplomb entre les deux vallées de la Corrèze : celle de la grande Corrèze qui s'écoule des sommets de Bonnefond vers le sud et Saint Yrieix et celle de la petite Corrèze de Pradines qui suit le même chemin en descendant vers le sud et en dominant la vallée "des grands champs". Toutes deux confluent en dessous, non loin de Chaumeil. Enfin, les sommets proches de Pradines et de Lestard marquent la ligne de partage des eaux vers la Vézère et Treignac. Gransaignes regarde vers Egletons. Tout porte à penser que Ventadour y avait ses limites. Le prieuré qui était installé fut d'ailleurs rattaché à celui de la Chapelle Spinasse en 1570.
-Rignac, devenu Reignac, était un repaire avec chevalier qui passa des Moreaux aux la Grange au XVIIème s. Il n'en reste rien.
- à Serran - Sarran :
La Corrèze sort de son défilé encaissé au "Saut du loup" sur la route de Treignac avant de se glisser entre les doux puys des Monédières, semblant prendre son temps pour divaguer ainsi dans ces lieux autrefois enchanteurs, couleur de rose au mauve de la bruyère, qui en étaient recouverts, avant que la sombre tâche des sapins ne vienne s'y substituer. Elle reçoit sa soeur jumelle, la Corrèze de Pradines, puis la rivière de la Vedrenne. Arrivée dans un élargissement de la vallée, elle accueille le Salvaneix qui conflue en dessous de Sarran, au lieu dit Bity.
- dans le bourg logé au coeur du massif, le château est attesté avec son enclos de fort ancien temps. Une famille de seigneurs de Sarran existe avant la fin du XIème siècle. Emma et ses fils font un don à l'abbaye d'Uzerche en 1105. Un descendant, Rigaud, passe contrat en 1264. En 1314, le seigneur de la paroisse est Bertran de Bonie (ou Bonet) et il assiste au mariage de Ebles VIII de Ventadour-Donzenac avec Mathes de Comborn-Treignac. Plus tard, viendront à ce titre les Chapoulie, les Gimel par alliance vers 1350 et suivront par alliance aussi les Lavaur et les Lentilhac, avant échange de domaines en 1776 et revente immédiate aux Combarel du Gibanel déjà propriétaires du castel de la Rebeyrotte. Les deux seront pillés en 1792 et ruinés définitivement.
- la Rebeyrotte : cette seigneurie est très méconnue. Elle est assez éloignée du bourg et de la Corrèze, elle regarde vers la Montana au pied du Puy Mornard qui la surplombe d'une quarantaine de mètres. Elle fut celle des Monteil de Monchadiane dont une héritière, Catherine, se maria en 1686 avec Louis Charles de Combarel du Gibanel, seigneur à Saint Martial de Gimel et par sa mère, baron de la châtellenie de Sartiges en Auvergne. Il est dit que les deux époux rebâtirent la demeure selon l'abbé Poulbrière. Cela doit vouloir dire que le repaire était fatigué ! Louis Charles avait été page puis écuyer du dauphin. Il mourut en septembre 1719, il avait 60 ans. Il fut enterré dans l'église de Sarran. Son épouse disparut en janvier 1725, à 62 ans, au Château de Ventadour dont son mari puis son fils étaient gouverneurs Elle fut également inhumée dans l'église de Sarran. Leur fils, appelé Louis Charles aussi, fut lieutenant des maréchaux de France et nommé Grand sénéchal du Duché et gouverneur de Ventadour où il résidait habituellement. Il avait épousé une demoiselle Antoinette de Sartiges de Lavandez, une cousine, en 1717. Ils décédèrent tous deux en 1750. Un de leurs fils, François de Combarel sera le dernier gouverneur de la Forteresse. Il était seigneur de Sartiges en 1787, seigneur de La Rebeyrotte et de Sarran, et titulaire de l'ordre Royal et Militaire de Saint-Louis (chevalier). En 1752, des Provisions de capitaine des chasses s’appliquant à toute l’étendue du duché de Ventadour, émanent du Prince Charles de Rohan en faveur de François de Combarel du Gibanel. Etait-ce pour le faire patienter car le terrible Teilhard de Brive voulait supprimer la charge de Gouverneur qu'assumaient son pére et son son grand-père ? Il ne la recevra qu'en 1758. Le 3ème gouverneur du nom (et dernier) décéda entre 1798 et 1800, semblant s'être sauvé de la terreur. Marié le 3 janvier 1768 avec Marguerite Cellin (née le 1er mai 1742) ils eurent un fils, Hippolyte de Combarel, (1778-1848), marié le 4 juin 1798 avec Julie Dauphin de Leyval †1839. Marguerite Agnès Félicie de Combarel de Leyval, la fille de ces derniers, termina la maison en épousant, le 26 janvier 1836, Eugène de Murat-Sistrières, député du Cantal (1801-1880).
La Rebeyrotte semble n'avoir plus guère de trace de cette demeure noble, seuls restent la motte et le vieil étang seigneurial en partie comblé donnant un torrent aux rochers en contrebas.
- Bity : situé à la confluence de la Corrèze et du Salvaneix, le repaire surveillait les croisements des routes qui ont plus ou moins repris les antiques chemins d'Uzerche vers Egletons et de Corrèze vers le Plateau de Millevaches. Il est attesté qu'est anobli le 17 mai 1341 son propriétaire, Jean de Betino d'Egletons. La fortification est brûlée en 1579 avec le village voisin, lors des guerres de religion, par le capitaine des protestants, Vinatier de Treignac. Aux XVIème / XVIème siècles, il est reconstruit par Pierre Dupuy, conseiller au Présidial de Tulle. En 1743 fut édifiée une chapelle domestique. Sa famille le conserva jusqu'en 1746 quand R. Dupuy, seigneur-curé de Darazac, qui le tenait de son frère François Dupuy, seigneur de Bity, le légua à son neveu Jean Gabriel Martin de La Selve, écuyer, procureur de 1739 à 1762. Il était « nommé et anobli le 16 mai 1749 par charge de Conseiller, Secrétaire du roi près le Parlement de Bordeaux, pour services entièrement satisfaisants comme conseiller procureur du roi en la prévôté générale de la maréchaussée du Limousin, et de ceux de son père durant 60 ans ». En 1766, le même propriétaire acheta la châtellenie de Sarran sous le nom de du Chassaing de Grandsaigne, nom d'un autre de ses domaines. Lors de la révolution, il fut incarcéré avec son épouse Marguerite d'Arche. La famille de Selve l'aurait conservé jusqu'en 1843 avant de s'installer au château de la Gâne.
Le corps de logis rectangulaire est flanqué de deux tour carrée avec échauguette sur cul-de-lampe à chaque angle dans le style de celui de Saint Yrieix et d'Ambrugeat, mais en plus grand. Deux pavillons du XVIIème siècle bordent la cour en terrasse laquelle donne accès au jardin. illustration : carte postale ancienne avant les travaux d'embellissement réalisés par le couple Chirac
Léon Trotsky et son épouse y aurait séjourné, d'après une rumeur persistante, de juillet 1933 à juin 1935, hébergé par William-Noël Lucas-Shadwell, ancien colonel de l'armée britannique, membre des services secrets britanniques et archéologue, qui en était propriétaire à l'époque. Durant la Seconde Guerre mondiale, le château de Bity abrita des Résistants puis fut transformé en hôpital. Le château, largement abandonné, fut racheté le 3 mars 1969 par le couple Chirac. À ce sujet, Georges Pompidou dit à Chirac : « Quand on prétend faire de la politique, on s'arrange pour ne pas avoir de château, sauf s'il est dans la famille depuis au moins Louis XV ». (Dans sa déclaration de patrimoine publiée au Journal officiel à l'issue de son mandat présidentiel en 2007, Jacques Chirac déclara ce château comme une « résidence secondaire élevée sur caves », estimée à 500 000 euros, il le déclarait breaucoup auparavant). Il n'est plus habité - Ne se visite pas
- "la pièce barrée" à Rouffiat : curieuse appelation que ce toponyme situé au fond de la paroisse, contre celle de Corrèze et face à la limite de celle de Vitrac, nommé Roffiniacum dans le cartulaire de Beaulieu pour un don avant l'an Mille. C''est un défilé étroit entre deux collines distantes de 200m où coule la Corrèze, 60 m plus bas. Le hameau de Rouffiat possède un endroit nommé la pièce barrée. Que cela peut-il signifier ? Nous pensons à un édifice fortifié contrôlant le passage, voir même la rivière, à moins que ce ne soit sur la colline un repaire clos... de toute façon le lieu convenait parfaitement à un système défensif. Sans vouloir exagérer le descriptif, le plan du village semble indiquer une structure féodale par ses rues circulaires.
- à Chalmelhs - Chaumeil :
De Sarran, il faut monter le long du ruisseau de la Vedrenne puis contourner le puy Blanc et son rocher des fées pour trouver la "capitale des Monédières" puisque sise dans un cirque entouré de puys. Elle est implantée dans la vallée de la Douyge, affluant de la Corrèze plus loin vers Vimbelle. Chaumeil est un village de montagne, comme son nom limousin l'indique, de Chalm, endroit dénudé fait de landes. On arrive là sur les hauteurs les plus méridionales du bas Limousin et sur la marche occidentale de la vicomté. Sur le flanc droit du massif règnent les Comborn. Sur les sommets rien ne semble avoir été bien précis. En 1120, le vicomte de Comborn s'empare au village voisin de Maurianges d'un alleu (propriété libre et héréditaire) assez violemment et le donne à l'abbaye de Limoges pour y édifier une chapelle. Ensuite les vicaires de l'église paroisiale sont nommés par les évêques de Limoges jusqu'à la révolution. En revanche, les Ventadour y marient un fils, Ebles VIII mais avec une Comborn au XIVème s. ! L'église, reprise au XVème siècle, possède ainsi en clef de voûte un blason des Ventadour... La translation semble avoir été faîte. Quant aux seigneurs de Chaumeil, ils sont attestés avant 1100. Le château ne semble pas avoir été placé dans le bourg (du moins selon nos éléments - à compléter si le lecteur en sait plus). Au XIXème siècle il en restait des ruines, dans le village du Chastagnol situé plus haut, qui auraient été rasées par le Général Billot, ministre de la Guerre en 1882. Un joli castel nouveau lui succéda sur le lieu de ce qui est connu comme "château des anglais". Chambres d'Hôtes. >http://chateaudechastagnol.pagesperso-orange.fr/
- à Vitrac :
Les deux rivières la Corrèze et la Montana traversent Vitrac.
- le repaire du Mons : côté Montana, ce castel a été entièrement remanié en 1620. Un établissement plus ancien devait pré-exister. Accueil chambre d'hôtes. http://www.france-balades.fr/CHAMBRE-D-HOTES/correze/vitrac-sur-montane/
- Le château de Chaleys ou Chaleix. En 1894 Champeval écrit dans le Bulletin Archéologique de la Corrèze : « A une petite lieue en amont de la ville de Corrèze se dresse, encore gaillard et batailleur, quoique bien mutilé, le petit castel de Chaleys. On n'y voit plus guère qu'une haute tour noircie qui, pour être adossée désormais à un pauvre corps de bâtisse éventrée, toute branlante au vent, n'en fait pas moins vaillamment tête à l'orage sous son capuchon crénelé. Dans la cour, au voisinage du jardin à choux et d'un fournil, une chapelle se dérobe au regard de son mieux, misérable autant que l'étable de Béthléem, aidant comme elle au logement des animaux. » Le château pouvait mesurer dans les 15 m de façade sur 8 m de profondeur, la tour non comprise. A son origine le château aurait possédé trois tours ; elles auraient été démolies à la suite des incartades du seigneur de Chaleix. A ce sujet Champeval écrit : « Le châtiment de monsieur de Chaleys aurait commencé de son vivant s'il est prouvé comme il est vraisemblable et très croyable que les tours de la garenne furent rasées à hauteur d'homme sur ordonnance royale. C'était en expiation humiliante du meurtre par lui commis de M. de Leynia de la Jarrige (Lonzac), alors bourgeois de Corrèze et trouvé en chasse sur ses terres de la Croix Blanche près du Monteil. Un seul coup de fusil consomma le forfait pendant que le compagnon de M. de Leynia s'enfuyait à toutes jambes. » Ce château, signalé quelques centaines de mètres en dessous de la pièce barrée de Rouffiat, mais paroisse de Vitrac et non loin de celle de Corrèze, dominait également la rivière de 60 mètres. Il rendait hommage à Ventadour mais était déjà bien mal en point au XVIIIème siècle. Disparu.
- à Saint Augustin :
le Tourondel, joli manoir, en charge à l'origine d'être une maison forte surveillant le point de passage terrestre (rare) sur la route de Mauriac à Uzerche par Egletons. Saint Augustin relevait pour partie de Comborn mais pour grande partie de Ventadour : en 1747 une lettres de Charles de Rohan, prince de Soubise et comte de Ventadour, établit Joseph Maurye, praticien, « notaire à la résidence du bourg et paroisse de St-Augustin » . Tourondel, situé à l'extrême limite Est, relevait de Ventadour. Ne se visite pas
- à Corresa - Corrèze :
cette "villette" selon J.B. Champeval fut l'une des 5 cités murées de la vicomté à la tête de son pays des Monédières et des vallées alentours. A partir de Corrèze se creuse profondément la vallée éponyme jusqu'à Tulle et même Malemort. C'est une marche dont il s'agit. Corrèze abrita de nombresues familles nobles et plusieurs repaires et châtellenies. A l'origine les Comborn et les Ventadour se partagent les hommages en 1070 lors d'une dation. Plus après, seul demeure la suzeraineté des Ventadour, du moins jusqu'au XIVème siècle (1389) puis à nouveau à partir du XVIème s. (en 1572). pendant ces deux siècles de changement de vassalité, Corrèze relévera de la famille du Duc de Berry puis des La Tour et même de Jean Stuart, duc d'Albany puis de Catherine de Médicis leurs héritiers. Catherine revendit au comte Gilbert de Lévis Ventadour. La ville était rattaché à Boussac d'Orliac.
-Auliac : seigneurie notée en 1622, bien tardivement, dépendant de la maison de Bar le Vieux à l'origine. Ne reste rien
-Bech : rendait hommage aux évêques de Tulle. De la vieille demeure il ne reste rien. Marguerite de Fenis du Tourondel épouse, en 1668, François d'Albier, sieur du Bech. Il est procureur d'office de la baronnie de Corrèze. Ils font construire un nouveau château, leur descendance occupe de hautes fonctions bourgeoises à Tulle. La propriété passe par alliance, en 1777, à la famille Meynard de la Farge, puis à la famille de Braquilanges (Tiburce épouse Jeanne-Aline de Meynard), Le château du Bech, incendié vers 1900, a été reconstruit depuis et forme un joli castel classique... Ne se visite pas
-Bessou : seigneurie appartenant directement aux Ventadour qu'ils revendirent.
-les Combes, Enval des Maledent, Neupont des Maruc de Cornil, le Soulier dès 1107,
- Vyers, ou Viers, seigneurie occupée en 1410 par le chevalier du nom. Vyers relevait à lépoque de Maumont et agissait pour les Ventadour. Au XVe siècle, le castel fut (re) construit sur le plan classique du corps de logis flanqué d’une tour carrée d'escalier et de deux tours circulaires. Deux élégantes échauguettes sont ouvertes de brétèches. Il changea de propriétaire, fut ruiné par incendie entre 1591 et 1594. A la suite de cet incendie, le château de Vyers est restauré et embelli de portes sculptées ornées de frontons à pinacles. Les seigneurs hommageaient à la maison de Maumont à l'origine. Guillaume de Maruc, avocat d'une famille de Tulle, achète Vyers en 1652. A la suite d'alliance, la seigneurie passe à Pierre de Lescot, conseiller du Roi à Brive, puis à Charles de Maledent de La Cabane. Le château de Vyers peut-être aperçu de la route qui rejoint Meyrignac à Bar. Mais Viers était primitivement de la paroisse d'Orliac et le village fut rattaché à Corrèze. Ne se visite pas.
- à Meyrinhac - Meyrignac :
-En 1666 une mention en additif du dictionnaire de J.B. Poulbrière porte que "Mr de Ventadour est seigneur, ses rentes peuvent monter à 200 cestiers de blé-seigle" (~30 000litres soit 22 tonnes). Ils possèdent également l'étang. Il y a des seigneurs mentionnés en 1154 avec droit de sépulture en l'abbaye de Tulle. Un Gérard de Mairinac est témoin dès 1107. Ils sont dans le bourg et au XVIIème s. on trouve les familles Brivezac de Tulle et Terriou de Corrèze. Où était ce château repaire : dans le bourg comme l'actuel, c'est probable, mais son implentation en creux relatif nous pose la question d'une translation ancienne ? Dans le bourg ou plutôt à côté... Nous observons le "Puy de la Pépinière" surplombant de 35m de haut le village qui est à 200m, au dessus de la rivière de l'étang. Elle convenait parfaitement à une motte... A sonder !
-Salagnac semble avoir été siège de seigneurie avant le XVIIIème. s. Le castel d'aujourd'hui est une fort belle maison de cette époque. illustration : carte postale de Salagnac cop SHAV
à Bar :
- Bar le vieux : premier village de la paroisse, ensuite déplacé au XIXème siècle, c'est là que se tenait le château. Attesté dès le XIème s. il était de la maison de Monceaux. Liée aux papes elle était représentée en Avignon au XIVème s. Jean de Bar y était en 1363 et en 1373. Le château fut pris par les anglais en 1374 et en 1588 par les protestants ou par la Ligue. Ses seigneurs furent une riche et puissante famille qui essaima en Limousin et en Auvergne. A la lisière du XVIIIème s. et du suivant, Armand Jules de Bar fut brigadier des armées du Roi, grand bailli de Picardie et gouverneur d'Amiens, comme son père.... Le castel fut remanié au XVIIème, ruiné lors de la révolution, saisi, pillé, brûlé et laissé ainsi pour 116 000 livres de dégâts (~900 000€). Au XIXème siècle quelques parties tenaient encore debout. Disparu
- Ublanges : château du XVème s. fief des Boussac. Il faisait face à Bar au dessus d'une confluence de la Corrèze. Il rendait hommage à Gimel. Disparu
- à Orliac de Bar :
La paroisse est un éperon dominant de plus de 120m de haut la Vimbelle et la Menaude. Il marque une marge entre les vicomtés de Ventadour et de Comborn
-Boussac fut une importante seigneurie, au Nord de la paroisse, pas très loin de celle de Salagnac de Meyrignac. Ses chevaliers sont notés aux croisades, ils avaient droit de sépulture en la cathédrale de Tulle. Archambaud de Comborn fait un don en 1264 à Guilhem de Boussac mais c'est à Naves et à la fin du XIIIème siècle c'est Ebles de Ventadour qui possède l'hommage. La châtellenie sera transmise avec Corrèze et Donzenac lors du mariage déjà cité de Ebles VIII de Ventadour-Donzenac avec Mathes de Comborn-Treignac. Pendant plusieurs générations, les Ventadour Donzenac porteront la mention de seigneurs de la baronnie de Boussac. L'hommage vendu vers 1388, reviendra aux Ventadour lors du rachat de 1572 à Catherine de Médicis. Le château complètement disparu a laissé quelques vestiges architecturaux des XIIème/XIIIème s. Un nouveau fut construit au sud de motte initiale toujours visible.
-Lafarge dut être une place ancienne, qu'un manoir récent remplace dans le bourg de la paroisse.
- et des Angles,
la paroisse des Angles, dépendait de l'archiprêtré de Gimel et fut le siège d'un prieuré de l'abbaye de Tulle. Le château était de ce prieuré et consistait en une tour de trois ou quatre étages, un bâtiment de défense la liait à l'église. Le bourg n'avait qu'une quizaine d'habitants en 1870.
On ne voit pas réellement la place des Ventadour dans cet ensemble, hormis qu'il contrôlait l'accès à Tulle, mais après tout ils possédaient directement la seigneurie de Soleilhavoup paroisse de Naves, sur l'autre rive de la Vimbelle, qu'ils vendirent à l'abbaye de Tulle au XIVème siècle....
à Tula - Tulle
les Origines
La cité est d’origine gallo-romaine certainement, celtique voire protoceltique probablement. On peut imaginer que Tulle, qui ne devait pas être fort développée, recueillit les habitants de la citae de Tintignac qui fut brûlée et abandonnée entre 350 et 407 lors des grandes invasions barbares s’abattant sur la Gaule romaine. Les hautes collines, symboliquement au nombre de sept, dominent des vallées étroites avec au moins deux rivières torrentueuses : la Corrèze qui arrive de la lisière du plateau de Millevaches où elle naît à Bonnefont y reçoit la Solane. En dehors de ce qui sera l’enclos (la ville close), un peu plus loin dans la vallée, la Montane de Saint Yrieix le Déjalat et Chaumeil rejoint la Corrèze. Dans cette architectonique complexe et tourmentée, il fut aisé de trouver refuge, de créer un oppidum, puis un castrum. Bizarrement, la mention de Tulle n’est pas très ancienne cependant et il faut attendre un cartulaire du IXème siècle pour voir apparaître « tutela ». Cela conforta longtemps l’opinion d’une création récente (cf. Etienne Baluze). Probablement le Puy Saint Clair servi d’oppidum premier. Une petit espace plat au pied du Trech à la confluence des deux rivières en plein cœur de l’enclos médiéval servit en tous cas d’établissement pour très tôt créer l’abbaye Saint Martin.
L’abbaye
Est-ce Saint Martial qui évangélisa la cité ? Ses pérégrinations en Limousin l’auraient permis. Quant à la création de l’abbaye, selon certains dont Baluze, Calmine, fils d’un haut personnage romain qui aurait été sénateur de Rome et gouverneur d’Aquitaine, donne sa fortune pour édifier trois monastères dont celui de Tulle. L’hypothèse de Saint Martin est également évoquée. Elle remonte donc entre les Vème et VIIème siècles. Les Normands passent non loin et seraient arrivés jusqu’au monastère au IXème siècle avant d’être battus et stoppés à Estresses de Beaulieu. L’abbaye reçoit alors de certaines abbayes menacées du nord de la Loire les restes de Saint Clair évêque martyr de Nantes, Saint Baumard et Liphard ermites et de Saint Laud, évêque.
?La cité est partagée en deux dès le Xème siècle : Tula sobra e sostra. Au sommet de la colline du Trech ?le pouvoir laïc avec son ou ses châteaux (un doute existe mais il y en eu certainement deux plus un certain nombre de maisons nobles plus ou moins fortes) et son église Saint Pierre et dans le bas de la vallée de la Solane, l’abbaye et son église Saint Julien avec la ville basse. Plusieurs portes ouvrent les fortifications vers les faubourgs de l’Aubarède, de la Barrière, du Trech, de la Barussie et de l’Alverge. Se met en place alors aux Xème et XIème siècles un double pouvoir d’influence : les seigneurs du haut, l’abbé du bas. On trouve Aymar ou Adémar seigneur vers 930 avec le titre de vicomte et château connu comme des échelles (scalarum) en souvenir de l’échelle à monter pour pénétrer dedans. Il transmet alors ses biens injustement détenus selon son testament au monastère. En 968 le prieur reçoit Roc Amadour de l’évêque de Cahors, sanctuaire précieux et fort rémunérateur. Ce statut particulier protège Tulle au Xème siècle des risques liés au tempérament violent des Comborn, d’Archambault gamba pouirida en particulier, puis de la partition de la vicomté avec Ventadour qui s’impose jusqu’aux faubourgs de la ville. Au XIIème siècle l’abbaye reste étrangement en marge des bouleversements monastiques de l’époque. Les établissements s’installent partout en Limousin, à Dalon, Grandmont, à quelques lieues parfois comme Obazine, Bonnaigue et Bonnesaigne avec leurs manses et granges. L’abbatiale du Moutier de Tulle occupe en effet les abbés, c’est une vaste construction engagée au XIIème s. qui s’élève peu à peu pour se terminer au XIIIème, la flèche étant posée au XIVème, ce qui est rapide. Son style roman à voûtes gothiques en fait le plus grand édifice du bas-Limousin avant que son transept et son abside ne soient mutilés lors de la révolution conduisant à l’écroulement et à leur destruction stupide. Le cloître fermé, dont deux galeries seront détruites lors de la révolution, ouvre sur la salle capitulaire. Sous le porche se firent enterrer les vicomtes de Comborn dont les gisants furent malencontreusement détruits en 1698 dans le délitement du XVIIIème siècle. Les Ventadour y furent aussi, mais peut-on penser dans le cloître : bien sûr l’abbé Bernard (et pas le troubadour) dont subsiste le gisant, certainement d’autres dont Ebles 1er dont on sait qu’il se retira en ou avant 1096, y mourut et fut enseveli. illustration : l'enclos médiéval fortifié de Tulle avec les châteaux, l'église haute, la basse et le cloître abbatiale
dessous : l'abbaye selon un dessin de Martin Fénis en 1695 ©AD Corrèze - à noter : la Solanne qui coule librement le long du cloître pour aller se jeter dans la Corrèze.
Les grands troubles
La cité est passée avec Aquitaine et Limousin sous le contrôle des Plantagenêt depuis le mariage d’Aliénor avec Henri au milieu du XIIème siècle. Les guerres féodales attirent des mercenaires, les Brabançons, qui remontent de Malemort à Tulle. Le mal des ardents puis le début de la lèpre opèrent de profonds ravages dans la population. Au XIIIème siècle la crise éclate au sein de l’abbaye, signe de l’agacement certain des puissants seigneurs si proches de plusieurs quartiers tullois hors du clos. Archambaud VI de Comborn s’indigne que son neveu ait été refusé au chapitre, rentre dans le cloître et tue sept religieux. Absout par Rome, il fonde la chartreuse du Glandier.
L'enclos a été très tôt doté d’une organisation avec les boni viri, les prud’hommes en Conseil, dès 924 au moins. En 1127 l’abbé Amblard donne ordre aux consuls (donc il y en a de fait faute de titre) d’entretenir les défenses, Tulle précède Brive qui n’obtient le consulat que vers 1180, en 1212 apparaissent las coutumas du château laïc, mais point de franchises comme à Egletons, Ussel, Meymac ou Corrèze. Les seigneurs vendent leurs droits aux abbés ensuite. En 1251 le conseil prud’homal conteste les droits de justice de l'abbaye et transige. C’est un consulat limité et même plus reconnu.
Très rapidement l’Eglise gagne le rapport de force pour le pouvoir car les seigneurs abandonnent aux abbés leurs droits sur l’enclos. Plusieurs actes traduisent ce renoncement avec contrepartie bien entendu : un du seigneur des Echelles, l’homme fort du lieu, et ceux des Tulle (s’ils sont différents des Echelles), des Chanac et des Faucher entre 1253 et 1263, en 10 ans seulement.
Lorsque Tulle devient diocèse siège d’un évêché, c’est l’évêque qui récupère le pouvoir temporel et va le garder le plus longtemps possible avant de devoir s’effacer devant le Roi et sa justice.
En attendant, au XIVème siècle Tulle affronte les calamités : la guerre dite de cent ans avec le siège par les troupes du duc de Lancastre qui triomphe le 1er novembre 1346, laisse 400 hommes en garnison puis la reconquête par le comte d’Armagnac pour le Roi de France quinze jours plus tard. Mais la pire est la peste arrivée en 1348 qui tue 1000 personnes sur les 6000 habitants. En 1360 Tulle suit le sort du Limousin et tombe à nouveau du côté anglais suite au traité de Brétigny. En 1370 Guy de Lasteyrie reçoit la soumission de la cité au royaume. Charles V édicte trois ordonnances de reconnaissance. Le chevalier du Guesclin est en bas Limousin et serait venu à Tulle en 1371. Mais Lancastre jette toute ses forces en 1369 ou 1373 et reprend Tulle en novembre sous la menace de détruire la ville, les consuls ouvrant les portes. De force, contrairement à Brive qui l’accueille bras ouverts ! En 1374 le duc de Bourbon pardonne Tulle en y rentrant pour le Roi. Le pire restait les compagnies de routiers, ces mercenaires employés par les anglais et qui le furent aussi par le roi. En dehors des combats, elles restent en se réfugiant dans des repaires d’où elles rançonnent et terrorisent villes et campagnes. Ce seront Geoffroy à Ventadour, Aymerigot à Champagnac et Perrot à Ussel. Un autre, proche de Tulle était Pierre Foucaud dit le Bourreau réfugié au château de Saint Chamant qui rançonnait Brive. Tulle vivait en état de peur en cette seconde partie du XIVème siècle. Les années qui suivirent ne furent pas mieux avec le conflit entre Armagnac et Bourguignons lorsque le roi Charles VI devient fou. Les anglais attaquent à nouveau à partir de 1404. Le vicomte ?de Raymond de Turenne s’allie avec Perrot le béarnais de 1403 à 1410 pour mettre le pays de Brive à sac depuis leur repaire de Malemort en leur nom et surtout pour lui-même. En 1419 les Etats provinciaux des seigneurs du bas Limousin se tiennent dans l’abbaye et votent 24000 livres de contributions. Des escorcheurs dirigés par Jean de la Roche pillent ensuite les faubourgs de Tulle puis les incendient en 1426 et 1435. Tulle négocie avec Rodrigue de Villandrando et paye 400 livres en 1435. En 1439 nouveaux Etats de Province et 5000 livre de crédit. Le nouveau roi Charles VII rétablit l’ordre et vient à Tulle avec sa nombreuse cour en mai 1442 puis en avril 1443 où il reste quinze jours. Il célèbre la Pâque le 21 avril dans la cathédrale, préside dans la salle capitulaire une assemblée d’Etats avec l’évêque Jean de Cluis (1427-1450) comme aide intercesseur. Ce sera d’ailleurs une des dernières réunions importantes car l’institution va sombrer dans un rôle exceptionnel et consultatif. Le bas Limousin deviendra ensuite un pays d’élection et non plus d’Etats. Turenne refusera avec ses 7 villes et 1200 villages et conservera son autonomie contrairement à Ventadour plus lié à la monarchie. Aux côtés du Roi à Tulle se trouve également son conseiller et chambellan Jacques de Chabannes, seigneur de Madic et Charlus le Pailloux. Son frère Antoine suivra sa voie auprès des rois Louis XI, Charles VII et Charles VIII.
illustration : le cloître où eurent lieu les Etats de province ©musée du Cloître de Tulle
Les papes
Le XIVème siècle à Tulle est également celui des papes limousins : Clément VI né Pierre Roger élu en 1342 qui fait fleurir le rosiers dans l’Eglise en nommant parents et alliés aux plus hautes charges, dont son frère Hugues, évêque de Tulle puis cardinal, puis Innocent VI né Etienne Aubert, en 1362 Hugues Roger est élu mais refuse humblement, ensuite Urbain V né Guillaume Grimoard originaire par sa famille de Ségur et qui créa quatre cardinaux du bas limousin (Guillaume Sudre de Laguenne, Pierre de Baignac, Jean Fabri d’Egletons, évêque de Tulle, et Guillaume d’Aigrefeuille), enfin Grégoire XI, né Pierre Roger de Beaufort en 1370, à Maumont comme son oncle. Ce fut le dernier pape français. Mais ces quatre papes prolixes en nominations d’amis et parents (39 cardinaux, 11 patriarches, 56 archevêques, 300 évêques au moins) ne firent rien en matière d’édification religieuse. Ni abbaye, ni faculté, ni séminaire, ni résidence papale… Seule nouveauté, de taille mais qui n’a rien à voir avec eux : Tulle devient en 1317 siège épiscopal d’un diocèse par démembrement de celui de Limoges. L’évêque remplace désormais l’abbé comme seigneur temporel de la cité.
La Pré-renaissance tulloise
Au XVème siècle, alors que la peste frappe Tulle durement entre 1452 et 1455, la langue vernaculaire reste le limousin mais le français la supplante dans les actes publics et privés. Le XVIème siècle voit le passage des « Mille Diables », mauvaise vermine pillarde qui engrosse tout le pays en violant les malheureuses qu’ils attrapaient. Un gentilhomme d’Auvergne, le « roi Guillot » les amène à Tulle en 1523. Le climat se gâte entre 1527 et 1532 et entraîne la famine puis la peste revient entre 1530 et 1564. Alors qu’un sénéchal du Limousin est souvent responsable administratif et militaire de sa province, parfois en plus gouverneur, aucune lieutenance de sénéchaussée emportant un baillage n’existe à Tulle en raison de son statut de seigneurie d’Eglise. En 1269 l’abbé avait défèré au Parlement de Paris la tentative de sénéchaussée faîte par le duc d’Aquitaine. Un lieutenant s’installe en 1448 et l’évêque proteste en vain. En 1462 Louis XI passant à Uzerche et Brive reçoit les réclamations des municipalités et annule le siège sénéchal principal de Tulle au profit des deux secondaires existant à Uzerche et Brive pour le bas-Limousin. Les bourgeois de Brive ont payé à qui le plus pour rafler la mise. Le siège revient en 1523 contre 4000 livres par acte de François 1er, repart en 1552 sous Henri II pour être rétabli à Tulle en 1553 moyennant 15000 livres. Epuisés, les deux consulats cessent le combat et auront chacune leur siège judiciaire. Mais le duché de Ventadour ne saurait rester sans siège et Egletons et Ussel se battent pour l’accueillir, la Sénéchaussée de Tulle est amputée de plusieurs dizaines de paroisses. Tulle n’aura un Présidial qu’en 1637 à titre de compensation. Quant aux droits de justice ils sont particulièrement enchevêtrés à Tulle : l’enclos est placé sous la juridiction de l’évêque mais les faubourgs sont partagés entre son autorité et celles des seigneurs laïcs en particulier ceux de Chanac et de Ventadour. L’abbaye succède au monastère en septembre 1514 lorsque les religieux furent sécularisés par le Pape Léon XIII. Un doyen remplaçait le prieur claustral, le chapitre se composait de 12 chanoines prébendés. Ils se disputèrent et la chapitre diminua. Du côté de la cité, des prud’hommes ou consuls, plus rien n’est octroyé jusqu’au XVIème siècle, hormis une charte épiscopale de Jean de Cluis le 14 mai 1430 encore timorée sur le statut municipal. Il faut attendre une reconnaissance d’élection en 1452 et enfin la confirmation du consulat par le roi Charles IX en 1566. L’évêque protesta et plus tard fit instance au Parlement mais sans succès. La cité profite de l’essor économique et architectural pour se doter de beaux hôtels particuliers…
La Réforme et les guerres de religion
La réforme protestante ne touche pas Tulle contrairement à Argentat, Beaulieu ou Treignac. Mais ses effets vont se faire sentir une trentaine d’années plus tard lorsque l’armée de secours allemande vient dégager Condé et Coligny en 1569. Elle se bat sur la Vienne, descend sur Pompadour, Allassac puis Turenne, en commettant moultes pillages, remontent par la Dordogne pour détruire abbaye et prieurés. Beaulieu voit son abbatiale saccagé, Bonnesaigne est incendié, la Valette pillé et Saint Angel occupé. A partir de 1574 la confusion reprend en bas-limousin avec Henri de la Tour, vicomte de Turenne, à l’esprit intriguant, ambitieux et mauvais. Richelieu disait qu’il ne pouvait « vivre et laisser vivre aucun en repos ». Petit fils du connétable de Montmorency, il est élu par la noblesse de son parti hostile au Roi. C’est en vérité une tentative de faire sauter l’autorité monarchique en faveur des grands seigneurs provinciaux, une révolte contre le pouvoir central. Son oncle Gilbert de Lévis Ventadour est gouverneur et lieutenant général du Roi en Limousin. Il tergiverse et louvoie entre fidélité et calcul intéressé. Il affronte les bourgeois de Limoges en 1574 pour installer ses troupes mais doit reculer, en 1575 il occupe la cité et la cathédrale puis doit refluer, ses hommes prennent Uzerche et Brive. Henri de Turenne voue une méfiance aux gens de la montagne limousine, dont ceux du duché de Ventadour, qu’il considère comme des catholiques pouvant menacer sa vicomté, même si c’est la terre de son neveu. Tulle, au milieu du duché, est en plus possession de l’évêque, autre défaut majeur à ses yeux. La ville est encerclée et son conseil nomme un comité de défense, mobilise un renfort de milice et stocke des vivres et munitions. Le 18 juin 1577 Tulle est attaquée par le capitaine Vivans, un chef huguenot, installé à Sainte Fortunade. Il envoie douze de ses gens jusqu’à la porte de la Barrière où ils volent mulets et provisions ; ils sont repérés, mis en fuite et poursuivis par un preux jeune homme et 50 suivants. Ils sont attirés dans un traquenard et attaqués. 18 tullois y périssent, d’autres s’enferment dans une maison incendiée par les protestants, 2 meurent brûlés, les autres sont fait prisonniers. Ils ne seront libérés que contre forte rançon payée par les bourgeois. Heureusement Turenne s’en va aux Pays Bas en 1580. La Ligue se forme pour les ultra-catholiques mais ne rencontre aucun succès dans la cité épiscopale. Hélas Turenne revient de la prison batave où il a été incarcéré et lance ses troupes reconstituées contre Tulle en septembre 1585 par deux assauts repoussés. Le 30 octobre plusieurs milliers de soldats supplémentaires s’étant joint, une troisième attaque est menée par le vicomte en personne. Il faut une semaine de combats pour prendre les faubourgs et seul 60 arquebusiers résistent encore dans le fort Saint Pierre, seul élément de l’enclos non occupé. La ville capitule le 6 novembre et doit accepter de payer 12000 écus de rançon, le pillage des biens privés et religieux et l’occupation par une bande de soudards. Il y aurait eu selon d’Aubigné 100 morts protestants et 140 tullistes. Un religieux de la ville reproche à ce cousin de Papes son comportement guère chrétien. Le vicomte surpris ne sut que répondre et lui laissa la vie. Les troupes du duc de Ventadour n’ont pas bougé, faisant payer à la cité son autonomie. La soldatesque réformée repart le 9 février 1586, Turenne ayant obtenu les ressources escomptées pour ravitailler et payer sa troupe. Le duc de Mayenne vint le 9 février 1586 délivrer la ville et chasser le détachement d’occupation ; une fête fut célébrée jusqu’au XXème siècle et les fêtes de la Saint Claire sont toujours prolongées de 3 jours depuis par lettres royales de juillet 1586 signées par Henri III. Des monastères sont attaqués comme celui de Grandmont qui est détruit en 1596, mais la Ligue éradique les foyers de la Réforme et les Monédières sont en feux après destruction des lieux protestants, Louis de Pompadour incendiant ses domaines de Treignac. Le nouveau Gouverneur du Limousin Anne de Lévis Ventadour a succédé à son père Gilbert qui s’était éloigné prudemment de Turenne. Il lutte contre les ligueurs, ayant pris le parti de Marie de Médicis. Il nettoie leurs places fortes dont celle des châteaux de Cornil, Vigeois et Masseret. La guerre s’achève.
La paix religieuse revenue, le peuple se révolte après tant de misère et de mort, des petits nobles désargentés, ruinés et tombés en état de paysannerie les suivent. La jacquerie des Croquants commence en vicomté de Turenne en 1593 et va durer une année. La milice tulloise les rejoint et aide à mettre le siège devant le château de Gimel dont les seigneurs avaient été une plaie cause de mal et de désordre. Gimel résiste 4 mois grâce à son site inaccessible jusqu’à Noël 1594 où il doit capituler. Ses seigneurs s’échappent, pillent Laguenne et Corrèze, reprennent leur repaire en 1595. Les tullistes les sortent et détruise le château fin 1595.
Il reste à régler le cas de Turenne toujours aussi conspirateur entre 1602 et 1605. Il est devenu duc de Bouillon et prince de Sedan par la grâce de son mariage mais prépare ses mauvais coups en armant Turenne qui doit être perquisitionnée pour que ses hommes s’enfuient. Les habitants des faubourgs de Tulle devenus plus nombreux que ceux de l’enclos érigent des murs d’enceinte de 1611 à 1617 pour se défendre si Turenne et ses sbires reviennent. Le royaume est passé sous l’autorité de Richelieu après la mort d’Henri IV en 1610, mais aucun noble local ne se lance dans une fronde massive contre le ministre, même si certains seront condamnés lors des Grands Jours de Poitiers en 1634. La disette revient en 1627 puis la peste en 1631. Tulle perd en sept mois 2500 personnes sur 7 à 8000 habitants. Les bonnes récoltes reviennent ensuite et Louis XIII fait exécuter Montmorency à Toulouse en 1632. Son cousin Ventadour a pu sauver sa tête grâce à sa prudence et à sa fidélité, malgré sa proximité avec la reine mère. La grande fronde passe assez loin en 1650/1652.
Le dernier siècle de la monarchie
Tulle, à la faveur de la paix, voit alors se mettre en place une ambiance chicanière dans laquelle Consuls, populace et évêques se disputent et les ragots vont bon train. L’évêque Hubert Ancelin doit quitter la ville sous la menace des consuls de faire mettre le feu à sa résidence. Son diocèse est pourtant un des moins rentables du royaume avec 8000 livres seulement contre 35000 en moyenne, mais il a 400 prêtres. Les jésuites enseignent dans la ville à 250 élèves. Tulle est ville extrêmement religieuse avec un nombre insoupçonné d’institutions regroupant des centaines de membres. Les principales d'entre-elles sont : le couvent des Clarisses créé en 1605, des Ursulines en 1618, des Bernardines en 1622, des Visitandines en 1644, des Bénédictines en 1650 ; pour les hommes les Cordeliers dès 1491 puis les Récollets après 1586, les Feuillants en 1620, les Carmes en 1644.
Concernant les Bernardines, elles s'installent donc en 1622 dans une des résidences les plus nobles de l'enceinte, celle des Ventadour. Ils avaient hôtel dans la ville épiscopale au titre de grands seigneurs du bas-Limousin en qualité de vicomtes puis comtes et enfin ducs du Royaume. Cette position dans Tulle montre l'extrême ?proximité géographique et féodale qu'entretiennent avec la ville les Ventadour dont les droits s'exercent d'ailleurs sur certains faubourgs de la cité. On ne sait rien de leurs habitudes à Tulle mais on peut imaginer qu'ils y vécurent assez régulièrement du XIVème au XVIème siècles, lorsqu'ils n'étaient pas à Ventadour, au Peyrou de Liginiac ou bien à Charlus Champagnac. Ils n'habitèrent en revanche jamais Egletons ni Ussel. Peu avant de mourir, le Duc Anne de Lévis Ventadour entâme le lent désengagement d'avec la terre de ses ancêtres et certainement est-ce lui qui vend son hôtel ou en fait partie donation avant de disparaître la même année. Cependant, le phénomène reste très relatif car son fils Charles devint gouverneur du Limousin en 1633 et son épouse créa les Ursulines à Ussel vers 1645. Le Duc s'éteignit à Brive en 1649 et fut enterré sur ses terres (on sait où, à Moustier ou Liginiac), elle-même ne disparaissant qu'en 1701. Lors de la création du couvent dans l'hôtel des Ventadour, une maison mitoyenne dite « du porche » y était accolée. L’ensemble était vaste de près de 560 m², avec dix-huit pièces habitables et plus de vingt cellules. Il n’en fallait pas moins pour héberger les vingt religieuses qui occupaient les lieux. Ce sont elles qui ont restauré avec des pans de bois la partie haute de l’actuel bâtiment, ainsi que les intérieurs pour les adapter à leurs besoins. La famille Ventadour, qui possédait les murs à titre "d’habitat de qualité", avait fait remodelé le lieu selon le style des époques. La structure du bâtiment est du coup un mille-feuille. Le rez-de-chaussée est typiquement médiéval, le second niveau est caractéristique de la Renaissance, le troisième adapté aux moniales. Il est ainsi aisé de comprendre l’architecture particulière du résultat : les cellules éparses, des passages accidentés communicants entre les bâtiments, des salles communes (une bibliothèque, une salle capitulaire, un réfectoire…), tout cela réparti sur plusieurs niveaux ; une organisation globale qui n’a rien de traditionnellement monastique. Une preuve de la préexistence de la bâtisse se retrouve au deuxième étage donnant sur la rue Saint-Bernard : une grande cheminée porte la date de 1570 sur son linteau, et de mystérieuses armoiries la rattacheraient à celles de la famille Ventadour. La cour présente à l’arrière du bâtiment pose de nombreuses questions et l'on se demande si elle aurait pu héberger une, voire plusieurs galeries de cloître. Par ailleurs, un détail intéressant présent sur les cartes de Tulle datées de 1750 et 1767 montre l’existence d’une église attenante au couvent, associée à la porterie ou au parloir. De petites dimensions (17 x 8 m), son orientation était nord-ouest à sud-est. Le chœur quant à lui était orné d’un rétable. À présent, il ne reste rien de cet édifice rectangulaire qui entretenait une singulière ressemblance avec l’église de Coyroux.
illustrations :
-la rue de l'Alverge fin XIXème siècle - partie de l'enclos et du Trech tel qu'en 1960 -© Durante - dessous : une des premières photos de Tulle ©SHAV.
En descendant l’avenue Henri-de-Bournazel, impossible de rater la maison des Ventadour devenue couvent : avec sa façade jaune et sa belle vigne, elle accroche l’œil du passant comme pour mieux l’inviter à se pencher sur son histoire.
illustration : © Christelle Bouyoux/Vladimir Fouillade La Montagne
Ces communautés religieuses vont être expulsées pour la plupart par les comités révolutionnaires.
Un grand séminaire est créé en 1680 et l’hôpital en 1675. L’activité économique de la cité est celle de ses artisans, des marchés et de l’administration judiciaire car on plaide beaucoup et cela procure de belles rentes aux gens de robes, la broderie du point de Tulle occupe les religieuses et les demoiselles bourgeoises. Dès 1690 une manufacture de fusils s’est créée dans le quartier de Souilhac, à la sortie de la ville. Il manque vite des ouvriers qui sont appelés de loin (même de Liège). Elle va croire et atteindre plusieurs centaines d’employés avant la révolution lorsqu’elle devient manufacture royale en 1777, en générant localement des besoins en bois, eau et houille.
A la veille de la révolution la cité est calme, le clergé pauvre et en baisse numérique (plus que 3 moines aux Feuillants), la petite noblesse guère arrogante et largement appauvrie, les Turenne et Ventadour sont partis à Versailles et Paris et leur puissance locale n'est guère plus qu'un souvenir, quelques dîmes et quelques décisions judiciaires rendues en leurs noms. La grande peur de juillet 1789 marque les esprits et introduit une mobilisation contre un ennemi inconnu même pas nommé. La monarchie et le malheureux Louis XVI seront les victimes expiatoires de cette période trouble. Tulle deviendra chef-lieu du département de la Corrèze en 1791. La ville resta royaliste jusqu’en 1792, les prêtres jureurs ne furent que 40 sur 400 en mars 1791 après rétractions. Lors de l’affaire de Favars où des excités avaient rompu la chaussée de l’étang seigneurial en janvier 1790, la maréchaussée de Tulle intervint et la cours prévotale condamna deux mutins à être pendus. L’assemblée nationale demandant la révision du jugement, la municipalité accusa celle de Brive d’être un foyer d’insurrection alors que celle de Brive répondait en reprochant à Tulle d’être réactionnaire. La Barrière fut quartier patriote alors que le Trech restait monarchien. Avant 1793 il n’y qu’un mort par provocation. Ensuite les sociétés populaires prennent le pouvoir à la faveur de la Terreur et sont excitées par les Comités de Salut public. Les conventionnels Brival et Lanot sont des ultras mais suspects pour Robespierre. Il y a 11 guillotinés en Corrèze, 200 nobles émigrés au moins, plusieurs dizaines de prêtres réfractaires déportés. Tulle perd l’église Saint Pierre de la cité haute et Saint Julien de la ville basse, le transept, le chevet et le déambulatoire ainsi que la lanterne, la tour octogonale construite au centre de la croix, de sa cathédrale mutilée et écroulés après le prélèvement imbécile de ses fers de maintien ainsi que nombres d’œuvres d’art religieuses, sans parler des titres, archives, édits brûlés en place public. Mais les « tullois » comme on disait il y a quelques décennies, n’étaient pas mauvaises gens, un peu clampa (bavards et localiers) pour la convivialité, bon vivants et pas hautains ou mesquins comme en d’autres lieux. Le XIXème siècle saura préserver et aménager la ville (hormis les écoles primaires qui prirent la place des vestiges médiévaux dont certainement celle les châteaux) alors que le XXème donnera une fois encore dans la folie architecturale en prenant plaisir à détruire des quartiers entiers pour construire une tour gratte-ciel hideuse en bord de Corrèze et un hôpital étriqué en plein quartier du Moyen-Age, assortis de HLM un peu partout. Heureusement, le cœur de ville est encore bien conservé et il fait bon flâner autour de sa cathédrale et le Trech n’attend qu’une revitalisation qui finira bien par arriver, tant il est vrai que si l’on n’aime guère arriver à Tulle on aime y rester.
à Donzenaco - Donzenac
La présence de Donzenac parmi les possessions de la vicomté puis du duché de Ventadour est ignorée et peut sembler curieuse car la ville en est séparée territorialement, comme la seigneurie de Montpensier l’était en se situant en terre de Bourbon. La cité est bâtie sur deux niveaux dont la forme très originale ressemble à un ovale resserré, elle domine la vallée encaissée du Maumont, rivière qui ne doit pas être confondue avec le château du même nom construit au bord du Doustre au sud d’Egletons. Son implantation en fait l’ouverture naturelle du plateau bas-limousin vers la dépression de la Vézère et de la Corrèze en bordure du haut Quercy et du Périgord noir.
L’histoire de Donzenac est assez méconnue pour les temps anciens mais il est aisé de supposer que sa crête servit d’oppidum puis de castrum comme en bien des lieux du bas Limousin. La vallée confluente de celle de la Vézère si proche, la voie de communication entre Quercy et haut Limousin, entre Rocamadour et Toulouse et Uzerche et Limoges puis Poitiers en faisait aux plus anciennes périodes du Moyen-Age un site destiné à la surveillance du passage. Donzenac ne semble pas apparaître dans la liste des villes appartenant à Comborn dont Uzerche, Vigeois Treignac et Malemort semblent avoir été les principales. La raison en était certainement l’influence des évêques de Limoges cités comme suzerains et de la maison de Malemort comme seigneurie ou coseigneurie. La famille des Abouin liée au monastère de Vigeois est citée pour ses possessions à Donzenac dans le cartulaire de Vigeois, elle est probablement unie à celle de Malemort qui lui succède avant le XIIIème siècle. Rien n’explique en revanche l’absence de Comborn dont l’influence devait bien exister. On pourrait penser que les Ventadour ont bénéficié d’un écart lors de la scission de la vicomté en 1058 mais il semble bien qu’il n’en fut rien. Selon Jean Baptiste Poulbrière, dans son dictionnaire des Paroisses du Diocèse de Tulle (cf p399 du Tome 1er), ce serait plutôt une dot faite par Gérald III (Géraud) de Malemort, fils du Sénéchal du Limousin et Quercy, à sa fille Galienne. Elle apporta Donzenac lors de son union en 1290 avec Ebles VIII de Ventadour, fils de Ebles VII et de Blanche de Chateauneuf, qui accèda ainsi en plus à la coseigneurie de Malemort. Leurs fils seront évêque de Castre pour Hélie et abbé de Saint Martial de Limoges pour Guillaume. Vers 1389 Donzenac n’était plus aux Ventadour selon lui, un petit-fils de Galienne, Géraud II, l’ayant vendue à Jean duc de Berry.
Une autre hypothèse a été mise en avant dans la généalogie de la base collaborative Pierfit généanet.
Selon cette base, Galienne de Malemort, héritière de Donzenac, dame de Donzenac, née vers 1250, décédée en 1310 à l’âge de peut-être 60 ans, se serait marié avant 1290 avec Hélie, qui serait en fait Ebles X de Ventadour, vicomte né en 1264, décédé en 1339 à l’âge de 75 ans, dont les Parents étaient Ebles VIII dit Hélie, vicomte de Ventadour ca 1240-/1297 & Blanche de Châteauneuf-La Forêt ca 1240-1292). Cet Hélie dit Ebles X aurait été, selon cette généalogie, frère de Ebles IX, vicomte de Ventadour, seigneur de Boussac et d'Ussel, né vers 1263, décédé en 1321, à l’âge de peut-être 58 ans, ancien Sénéchal du Périgord (en 1304).
Nous lisons plusieurs erreurs selon nous dans généanet : par exemple Blanche était de la maison de Châteauneuf de Randon, elle était mariée avec Ebles VII et non avec Ebles VIII qui était son fils. Il ne se confond pas non plus avec Ebles IX fils d'Hélie, qui suit. Ventadorn n'eut jamais d'Ebles X !
Selon notre avis (et que les généalogistes confirmés nous viennent en aide !), l’excellent chanoine JB Poulbrière étant généralement bien renseigné, cette 1ère version est à conserver !
Par alliance, Donzenac passa aux La Tour d’Auvergne en 1445, puis à Jean Stuart duc d’Albany en 1524 qui la restitua post mortem à sa nièce Catherine de Médicis, elle-même cousine des Ventadour... auxquels elle revendit ses droits à seigneurie de la ville en 1572 (les 2/3 certainement, car le curé du lieu en avait 1/3 en 1672). Le prince de Hercule Mériadec de Rohan devint duc de Ventadour par son mariage avec en 1594 avec Anne Geneviève de Lévis Ventadour, dite « dame de Donzenac » et transmit plus tard ses droits aux Bourbon Condé qui achevèrent, dans tous les sens du terme, leur seigneurie après la révolution (voir pages sur les ducs).
Sur l’architectonique de la ville, il convient de distinguer la cité haute dite sobra et le quartier bas dit sostre. Au centre se tient l’église Saint Martin avec son clocher tour du XIIIème siècle, plutôt XIVème siècle de style gothique qui présente une grande ressemblance avec le clocher de la cathédrale de Tulle dont il aurait pu servir d’ébauche. Une cloche ancienne porte la date de 1634 et le nom de Charles de Lévy Ventadour. En haut le castrum ancien, enclos devenu château des Ventadour, l’hôtel de Monteruc (probablement monte roc) et le château de la Robertie et le Barry. En bas le deuxième puy dit Soubre. Une église des pénitents blancs datée de 1677 existe non loin d’un établissement de l’ordre de Malte connu comme hôpital haut, un couvent des Cordeliers existait également mais tomba en ruine de même que l’église du XIIIème s. qui lui était liée et qui abrita la sépulture des seigneurs du lieu et au moins celle d’Archambaud VIII de Comborn. La cité était close avec onze portes dont trois principales. Une seigneurie hors l’enclos existait avec le château d’Espeyruc noté dès l’an 1001 pour Odon !
Illustrations : vue aérienne - plan de l'enclos © ville de Donzenac - place de l'église © régisa monbeauvillage
Sur la vallée du Doustre
Si l'on revient aux vallées affluentes de la Dordogne qui descendent du pays "d'en haut", toutes parallèles entre elles ou peu s'en faut, celle du Doustre vient ensuite. Nous avons vu son ajustan, sa confluence, avec la Dordogne au Gibanel de Saint Martial d'Entraygues. Sa source, nait vers 700 mètres d’altitude, entre le Puy Chaumont et le Puy Faux, sur la commune de Rosiers-d'Égletons. Après avoir reçu en rive droite le ruisseau du Rabinel puis celui de l'Étang de Gros, le Doustre devient une rivière. Il passe 400 mètres au sud-est du village de Saint-Hippolyte. Cinq kilomètres plus loin, il reçoit le Gagnoux (ou ruisseau de Gagnoux) en rive gauche et passe immédiatement au Pont de Fioux, 600 mètres au nord-ouest du bourg du Jardin. Il contourne Champagnac-la-Noaille par l'Est et s'écoule en contrebas de Marcillac la Croizille. Il passe à l'est de Saint-Pardoux-la-Croisille, où le ruisseau de Gane Chaloup le rejoint en rive droite. Il contourne le bourg de Gumond par l'est, puis celui de La Roche-Canillac. Il arrose le bourg de Saint-Bazile-de-la-Roche puis il rejoint la Dordogne en rive droite, trois kilomètres en amont d'Argentat dans ce lac de retenue, au niveau du château du Gibanel, vers 190 mètres d’altitude, en limites de Saint-Martial-Entraygues et d'Argentat.
Depuis le pont de Lantourne jusqu'au nord de Saint-Bazile-de-la-Roche, sur une vingtaine de kilomètres, le Doustre sert de limite naturelle de façon presque continue aux 22 communes qu'il borde :
- à l'ouest en rive droite Saint-Pardoux-la-Croisille, Gumond, La Roche-Canillac et Champagnac-la-Prune ;
- et à l'est en rive gauche Marcillac-la-Croisille, Gros-Chastang et Saint-Martin-la-Méanne.
Depuis le barrage de la Valette jusqu'à sa confluence avec la Dordogne, la majeure partie du cours de la rivière s'effectue dans des gorges atteignant par endroits 200 mètres de hauteur. Son cours est long de 52,2 km pour un bassin versant de 257 km2. Bien entendu, plusieurs seigneuries surveillent sa vallée disputée entre Turenne et Ventadour.
à Senc Bauzile del Dostro - Saint Bazile de la Roche,
Construit dans le bassin verdoyant de la vallée du Doustre, entouré de part et d'autre de collines boisées, l'architecture du village se rapproche de l'architecture des pays de la vallée de la Dordogne : maisons à bolet, toit à quatre pans et crépis blancs. Au XIème siècle on parlait de Saint Bauzile du Doustre.
Le château de Saint-Bazile, très remanié au XVIIIème siècle, se situe sur la rive droite du Doustre qu'enjambe un pont de pierre à trois arches, il s'agit d'une propriété privée. Le château qui relevait des de la Roche, sous la suzeraineté partielle de Turenne et de Ventadour, comme toujours en ce pays d'Argentat, se compose d'un corps de bâtiment oblong flanqué d'une tour ronde centrale en façade. Il est couvert d'un toit à la Mansard. Une grange du type de celle que l'on rencontre en Xaintrie, avec deux porches d'entrée en bâtière, et de petites dépendances avec le fournil flanqué de deux petites tours carrées couvertes en poivrière, ceinture une grande cour. L'enclos est accessible par deux portail dont le principal côté route est vouté et couvert d'un porche en pierre portant l'inscription 1790 ( date de sa restauration.) Le château ancien a servi de base certainement même si un emplacement ancien au bord de la rivière pose question (mais l'église y est également !). Les seigneurs du lieu étaient de Saint Bauzile, de la famille des du Luc, puis les Combarel, les Saint Chamant et les Lentilhac, déjà seigneurs de Gimel, Saint Yrieix, Sarran et vicomtes de Sédières. La fondation du patrimoine reçoit les dons pour la rénovation de l'église > http://www.fondation-patrimoine.org/les-projets/eglise-saint-bazile-de-la-roche.
à Senc Bonnet del Verni - Saint Bonnet Elvère
La paroisse semble compter au moins un millénaire d'existence, une bulle diocésale de 930 cite Sancti Bonneti d'El Verni. Pas de maison forte.
à Senc Martin la mediana - Saint Martin la Méanne
- Paroisse située comme Saint Martial d'Entraygues, elle est entre Dordogne et Doustre comme son nom l'indique, sur une sorte de péninsule limitée à l'Est et à l'Ouest par les ravins. Les principaux seigneurs étaient les barons de La Roche, du Bac (du Bech), de celui de Monceaux, de Servières. L'influence de Ventadour et Turenne, une fois encore partagée entre féaux. Pas de maison forte dans le bourg.
- le Chazal est un repaire surveillant les gorges du Doustre de 150 mètres, avec chapelle et souterrain. Du repaire et du souterrain il ne reste rien mais la chapelle est toujours.
- au Roch Maurel dit des druides, un site dominant la cascade de Crèvesac, possibilité d'oppidum voir de motte.
à Champanhac las Rochas - Champagnac la Prune,
Champagnac près Laroche, puis Champagnac Lès Roche, elle devient ensuite Champagnac la Pauvre avant d'acquérir son nom actuel. "La prune", qui signifie "petit", rappelle qu'avant 1843, date à laquelle sont rattachés les lieux dits du Chassang, du Teil, de Graffeuille et des Vergnes, la paroisse était de taille très modeste. Elle a pour patron principal St Pierre, dépendait de l'évêché de Limoges.
La commune avait 2 châteaux, celui de La Roche Lafont, maintenant disparu, et celui de Lagautherie (ou de Chaunac) restauré au XIXe siècle, accolé à l’église datant du XIe siècle.
- En 1555, dans le bourg, Louis de Soudeilles, écuyer du Roi, rendait hommage aux Chanac, comme St Bazile, Gros Chastang et Pandrigne y étant rattachés. C'était à l'origine un repaire noté comme tel. Il avait tout d'abord appartenu à la famille Gauthier, qui s'éteignit à la fin du XIVe siècle, puis devint la propriété des Chaunac dès le milieu du XVe siècle, ils rendaient hommage aux Ventadour. Les Soudeilles, après les Beaufort, possédèrent Champagnac aux XVIe et XVIIe siècles. Ne se visite pas.
- La seigneurie de Laroche-Lafont, à Lafont, appartenait aux de la Roche, elle passa au XIVème siècle aux Aigrefeuille (ou "de la Graffeuille"). Parente proche des Rogiers, cette famille fit partie de la série des prélats papaux. Elle eut 3 cardinaux, 3 évêques, 1 abbé et 1 abbesse dans le même XIVème siècle. Le château fut la demeure de cette célèbre famille jusqu'à la fin du XIVème siècle. Il est désormais invisible.
à Senc Maur de la Rocha - la Rocha en Lemouzi au Xème siècle - "La Roche Canillac" à la fin du XVIIIème siècle. ?
position stratégique de cette paroisse avec les gorges du Doustre où l'on peut contrôler le passage entre le haut et le bas pays à l'aplomb d'une quintuple boucle du torrent !
-Les la Roche sont notés dès les Xème et XIème siècles avec Géraud et Aymar qui dotent l'abbaye de Tulle par deux fois. Connue depuis le IXème siècle, la Roche Basse était une petite chapelle dépendant de Gumont avec son château qui dominait le ravin où coule le Doustre. Le château féodal de la Roche en Lemouzi contrôlait le passage vers la vallée de la Dordogne. Détruit au XIIe siècle par les anglais, un château neuf est reconstruit plus haut, à la Roche Haute, par le seigneur Gérald de La Roche. Une église y est érigée en son enceinte. Puis le siège seigneurial est à nouveau transporté sur le site "de vieille date", sur la roche abrupte qui domine le Doustre. C'est en 1114 que Aymar retourne à l'endroit originel du château de la Roche Basse (qui sera à nouveau détruit lors de la Révolution), laissant les moines de Tulle investir la Roche Haute pour y établir le prieuré de St Maur de la Roche à l'emplacement du château. Les Grafeuilles voisins étaient vassaux semble-t-il des la Roche. Au XVIème siècle, la baronnie des "de La Roche" n'a plus d'héritier mâle et c'est donc Jeanne, une sœur du dernier descendant, qui fit passer l'héritage des terres à son époux, Jean de Beaufort, Vicomte de Lamothe-Canillac. Cette famille régna jusqu'à la Révolution, et ajouta son illustre nom à la localité qui devint "La Roche-Canillac" en 1774. Il y eu d'ailleurs co-baronnie entre les successeurs Maumont, Neuville, Saint Aulaire. En 1778, la Roche était devenu masure !
illustration : la Roche basse et la tour restant de Canillac - la Roche haute au-dessus cop SHAV
J.B. Poulbrière, jamais avare avec les Turenne, leur attribue la suzeraineté sur 5 hameaux de la paroisse en plus de St Pardoux, St Bauzide, Lapleau et Saint Martial. Il ne précise pas l'époque : au Xème et XIème, certainement, après nous subodorons des hommages plus partagés ou mouvants, en tous cas sur les autres villages. Quoi qu'il en soit, cette situation montre l'extrême difficulté de saisir la carte des apanages, des aires géographiques, d'une vicomté lorsque deux maisons imbriquent ainsi un territoire.
La construction de l'école à la fin du XIXème siècle et l'arrivée du train vers 1910 ont entraîné le développement du village vers le haut (quartier de la gare).
La Roche-Basse, est un bourg médiéval à flanc de colline qui s'articule au pied de la Tour de Canillac, seul vestige de l'ancien château. Le village reste authentique notamment grâce à la présence des "courrijoux", étroits sentiers qui permettaient à l'époque d'accéder aux cultures agricoles en terrasses et de relier les habitations.
-la Roche Haute, belle demeure de M. Lafont de Saint Mür, ancien homme politique du XIXème siècle, puis de la famille Brodin, a été l'ancien "nouveau" château de la Roche au XIème siècle, aujourd'hui disparu, comme la dépendance de l'abbaye de Tulle.
-Le château de Beaufort, autre château situé au dessus du village, est attesté au XVème et largement remanié au XIXème siècle sur plan de Viollet le Duc, dit-on. De la famille des Beaufort alliée aux Rogier et au Maumont, ainsi qu'aux Ventadour et aux Turenne... propriété privée, location de chambres dans un cadre superbe https://www.abritel.fr/location-vacances/p1346789a Voir aussi le site www.canillac.fr
à Gros Chastang,
Comme Saint Martin la Méanne et Saint Martial d'Entraygues, cette paroisse est située entre les deux vallées encaissées de la Dordogne et du Doustre. Sur la route de Ventadour à Argentat, seule une petite seigneurie à Doumailles dépendant d'un de La Coste de Tulle est notée. Pas de maison forte, juste une grange dépendant d'Obazine à Couffinier.
à Gumond,
-Anciennement nommé « Acutomonte » (mont pointu ou mont aigu), car situé sur un lieu fort escarpé au dessus du Doustre, le bourg est devenu Gumont par déformations de prononciation.
L'église du bourg est rattachée à l'abbaye de Tulle vers 930 par don du vicomte Adémar. Gumont est une place forte jusqu'en 1114, date à laquelle l'annexe de Saint Maur de la Roche (ancien nom de la Roche Canillac) lui échappe. Le territoire relève alors de la baronnie des de la Roche mais possède aussi une petite seigneurie secondaire :
-le Breuil. Appelé aussi Mesprat Soubre, face à la Roche Aussière, dominanat le Doustre, il appartint à un seigneur chevalier de Murat, noté en 1295. Plusieurs familles s'y succédèrent comme les Guitard ou les de Chanac. La famille de Selve y résidait au milieu du XVe siècle et fit construire un manoir qui sera malheureusement pillé par les Huguenots un siècle plus tard (1569). Devenu petit château après quelques restructurations en 1583 autorisées par le Baron de la Roche (tours, créneaux et canonnières), il resta dans la famille jusqu'au XVIIème siècle et fut démoli vers 1830. Il n'en reste aujourd'hui que l'ancien puits. Un souterrain partait des caves et allait vers les gorges du Doustre.
Vers 1843, Gumont cède à la Roche-Canillac les hameaux de la Croix de la Borie, Beaufort, les Quatre Routes, la Vergne, l'Estanchou, Puy Banal et la Roche Haussière.
Les moulins le long du Doustre, qui sont aujourd’hui à l’abandon, sont la preuve d’une ancienne et intense activité liée à la farine de châtaignes et de blé ainsi qu'à l'huile de noix. Ainsi, dans les contrebas de Gumont, les parcelles étaient plantées de noyers mais sont maintenant retournées à l’état de forêts.
-à la sortie du bourg, côté Nord, curieuse appelation que celle de "la citadelle" située sur une hauteur dominant la vallée de 110m, le Puy le Drille !
à Saint Pardoux la Croizille :
le site de Saint Pardoux donne d'excellente explications que nous reprenons avec plaisir (voir le lien en dessous)
"Entouré d’une magnifique forêt d’arbres fusionnant en harmonie, le château de Pebeyre est une splendide demeure du XIIesiècle. Une allée d’ifs en double rangée, dernier vestige d'un jardin à la française datant du XVIIe siècle, relie le château à la forêt et à la majesté de ses arbres séculaires. Le château de Pebeyre existe au moins depuis le XIIe siècle. A sa mort, en 1195, Pierre Eschafidor de la Roche fait don de l'habitation du "Manso de Pebera" et de son mobilier à l'Abbaye de Saint Martin de Tulle. D'après Jean-François de Lespinasse, le nom de Pebeyre a pris son ethymologie d'un monticule situé derrière le château, qu'on appelait en langue limousine pé-b(el)-éyre, en français, puy-de-bel-air.
Le château de Pebeyre existe au moins depuis le XIIe siècle. A sa mort, en 1195, Pierre Eschafidor de la Roche fait don de l'habitation du "Manso de Pebera" et de son mobilier à l'Abbaye de Saint Martin de Tulle .
Pierre l’Eschamélie devint seigneur de Pebeyre lorsqu’il en fit l’acquisition en 1308. Son arrière petite fille Gaillarde de Pebeyre après avoir épousé Martin Salvan de Tulle en 1367, épousa en secondes noces Pierre Arnaud de Tulle. Jean Arnaud de Pebeyre leur fils qui fut anobli par Louis XI en 1467 fit bâtir la chapelle en 1464. La chapelle fut autorisée par le pape Sixte IV en 1481 et rendue au culte en 1873 [1]. La tour servant d’escaliers fut très probablement bâtie à la même époque. Jean Arnaud de Pebeyre laissa une fille, Louise, mariée à Guillaume de la Majorie qui hérita du domaine. Ce dernier ordonna par testament le 6 Décembre 1533, sa sépulture dans le chœur de l’église de Saint-Pardoux. Il y sera rejoint plus tard par d'autres membres de la famille Arnaud puis trois membres de la famille de Lespinasse de Pebeyre.
C’est sa descendance par l’intermédiaire de Arnaud de la Majorie qui vendit le château à la famille de Lespinasse le 25 Novembre 1651 : ”noble Joseph de Lespinasse, seigneur du Pouget-Pignol en la commune d’Espagnac, conseiller du Roi et Lieutenant assesseur en l’élection de Tulle, écuyer, acquiert la terre ou seigneurerie de Pebeyre de noble Arnaud de la Majorie, aussi seigneur de Soursac”. La vente comprenait le château, trois domaines, la chapelle, le pigeonnier à Pebeyre, le tombeau et le banc à l’église. En 1756, Jean-François de Lespinasse, à la mort de son père Joseph, hérite du château du fief de Pebeyre et de plusieurs autres domaines, en vertu du droit d’ainesse au détriment de son cadet Jean-Baptiste. En 1763, Jean-François de Lespinasse est assigné à comparaître devant le tribunal sénéchal de la ville de Tulle pour une sombre histoire de rentes annuelles dues pour l’ensemble du tènement du Jalais (situé entre les villages de Mensat (Mensac) et du Theil, et de l’étang Ferrier). En 1764 il est condamné à payer par le tribunal, ce qu’il refusera obstinément de faire. En 1765, il est donc conduit en prison au couvent des Cordeliers non loin d’Angoulême, ou il restera 10 années emprisonné. En 1775, il rejoint enfin le château de Pebeyre ou il mourut le 19 septembre 1781.
Puis vint la tourmente de la révolution. En 1792, Jean-Joseph de Lespinasse alors propriétaire du château et émigré se fit confisquer ses biens tandis que sa femme et ses cinq enfants étaient incarcérés à la prison de Tulle. Sa sœur parvint à sauver le château qu'elle récupéra vide suite à de nombreux pillages et diverses ventes publiques. Le château et les domaines se transmirent au sein de la famille de génération en génération en passant par Charles de Lespinasse de Pebeyre, préfet de la Lozère, du Lot et des Landes [2], puis son fils Roger, son petit fils Guy. Avec ce dernier mort en 1913, s’éteignit le nom de Lespinasse. illustration : le château de Pebeyre cop. site saintpardouxlacroisille.net
A ce jour le château appartient à la famille Faure de Pebeyre dont le lien avec la famille de Lespinasse remonte à Odette, sœur de Guy, dernier porteur du nom. Odette qui était la veuve de M. André Faure de Montgolfier.
Le château est constitué de deux corps de logis disposés en équerre et fermés par une aile côté Ouest.
La partie centrale couverte à la Mansard sur sa partie Ouest, comprend un mur de retour possédant deux ouvertures arrondies plein-cintre et terminé par une charmante tour carrée. Le corps de logis Est comprend plusieurs pièces d'habitation et possède une tour en échauguette carrée reposant sur des corbeaux de pierre sculptés. A l’angle intérieur des deux corps de logis, une tour polygonale, abritant un escalier à vis et sur laquelle trône un magnifique cadran solaire, harmonise l’architecture de la bâtisse. L'intérieur de cet ensemble délimite une terrasse dont l'accès côté parc s'effectue par un escalier en pierre encadré de quatre pilastres. Les toitures du château recouvertes d’ardoises et ornées de grandes cheminées et de chiens assis sont soutenues par des corbeaux sculptés. Près du mur d’enceinte se détache un pigeonnier carré couvert d’un toit à quatre pans. A quelques pas du château, une petite chapelle privée, qui subit les affres de l’histoire, complète cet ensemble harmonieux. Jadis, les deux ailes latérales s’ouvraient sur un balcon de bois à balustres sculptés. La tour carrée rejoignait le château par une galerie posée sur des pilastres de bois. On notera également que l'escalier de pierre a été déplacé. Autrefois il faisait face à l'allée des ifs." http://www.saintpardouxlacroisille.net/
à Marcilhaco - Marcillac la Croizille,
l'église de Marcillac et les terres appartenantes étaient à Ebles 1er de Ventadour fit un don à l'abbaye de Tulle en 1095 avant de mourir. Une paroisse existait à Croizille, plus bas. Les deux furent réunies vers le XVème siècle. En 1488 Yves de Lestranges apparait comme seigneur. Cela montre le phénomène de démembrement féodal : le seigneur suzerain est entouré de chevaliers vassaux. Pour les conserver comme alliès et les remercier en même temps, il détache des terres et seigneuries annexes pour les leur donner. Du coup les vassaux s'installent chez eux et s'éloignent de lui alors que le suzerain s'appauvrit à force de partages. Ensuite, les seigneuries vassales se vendent, se fractionnent et l'hommage devient un acte de plus en plus symbolique et sans conséquences, hormis quelques dîmes et taxes vite répercutées bien sûr.
Les curés rendent hommage à Ventadour également. Des chevaliers de Marcillac existent depuis longtemps mais ils sont remplacés par des Rageaud dès le XIIIème s., Faucher au XIVème, de Lestranges (de Lapleau) seigneurs de St Yrieix également comme le précédent, au XVème s., les Sédières avec Pierre, chevalier de l'ordre du Roi, en 1581, toujours en hommage à Ventadour. Un de ses héritiers vend les pierre du château du bourg en 1704 car il est en ruine et "éboulé". Les Soudeilles puis les Lentilhac continuent puis les Monié de Basdeville, les Ribardière de Monestier, les Lamore de Lamirande qui l'achètent avec titre, château et terres pour 55000livre en 1768 (~450 000€). Il y aura eu 6 familles différentes en 1 seul siècle... Aux Bouyeure en 1850. Illustration : château Bouyeure cop SHAV . Ne se visite pas
Au bourg bas se tenait le château des de Selve, vus à la Roche. Où était-il ?
Au Peuch, seigneurie des Dumas de la Gautherie.
à Clergor - Clergoux,
Clergoux est sur un plateau, à 3 kms de la rivière Doustre.
-les chevaliers de Clergoux avaient droit de sépulture en l'abbaye de Tulle en 1105. Leur château (repaire ou tour) semblait être située dans le bourg de l'autre côté de la route de Marcillac, en face de l'église.
-Le principal point d'intérêt de la paroisse réside dans son château de Sediera - Sédières. Il est installé au milieu d'une ancienne lande sans réelle vocation stratégique, ce qui est assez rare dans la vicomté. Sédières était de la paroisse de Champagnac la Noaille avant 1850. Le tombeau de ses seigneurs y fut détruit en 1885 pour réparer le clocher de l'église...
Sédières est château médiéval du XIVème siècle, peut-être (certainement) sur un site médiéval plus ancien en raison de la petite motte sur laquelle il est construit. Il a été remanié durant la Renaissance aux XVème et XVIème siècles. Il aurait été édifié , en 1408 lorsque le damoiseau Jean Bothiérus (Jean "Boutier") fit bâtir une demeure forte, jugée sur un monticule rocheux dans ses terres de Sédières. La page internet Wikipédia qui lui est attribuée fait assez fidèlement le point mais avec quelques retouches.
Un siècle et demi environ après la construction du château, Dominique de Sédières, arrière-petit-fils de Jean Boutier, abandonna définitivement le patronyme de Boutier et entreprit de réhabiliter la demeure de ses ancêtres. Les campagnes d'Italie l'avaient rendu sensible à l'architecture et à l'esprit de la Renaissance. Son mariage avec une demoiselle de Pierre-Buffière lui permit par ailleurs de disposer d'une fortune suffisante pour envisager des travaux d'envergure. Entrepris vers 1535, avec le concours très probable des artistes qui venaient d'œuvrer à Montal (Lot), le chantier du château de Sédières et de ses abords ne s'acheva qu'en 1569. Les fossés furent comblés et remplacés par une terrasse, le mur d'enceinte qui protégeait, mais, obscurcissait la cour d'arrivée, abattu, les bâtiments faisant face au logis principal démolis. Au dernier étage, une autre terrasse offre une vue exceptionnelle sur les étangs et les forêts du domaine. Des tourelles coiffées en poivrière vinrent agrémenter les façades. La partie inférieure de celle de l'entrée reçut trois grandes arcades surbaissées, ouvertes, décorées de colonnes corinthiennes. Des fenêtres moulurées et ornées vinrent remplacer les anciennes ouvertures : la lumière entrait désormais à profusion dans le château. Seuls quelques mâchicoulis devenus inutiles et des restes de fossés témoignèrent encore du passé du château. Le château comprenait en tout une cuisine et 13 salles ou chambres, dont certaines étaient agrémentées d'une cheminée monumentale.L'ensemble est orné de tourelles sur culot sculpté, de fenêtres à meneaux et croisillons, de pilastres et de linteaux sculptés de style Renaissance Une grande salle présente des nervures à arc en anse de panier et grande cheminée du XVIème siècle. Le porche d'accès de l'ancien pont-levis est situé dans une aile « château de Sedières ». Le château demeura, au cours des siècles suivants, à peu près tel que l'avait transformé Dominique de Sédières : en forme de fer à cheval irrégulier, avec un corps de logis principal de deux étages et un troisième mansardé, flanqué à un angle d'une tour rectangulaire surélevée l'ancien donjon. Un bâtiment de moindre importance, qui abrite l'entrée, lui est accolé perpendiculairement. Au rez-de-chaussée, la voûte en forme de anse de panier est ornée de clefs pendantes finement sculptées : sur l'une d'elle se lit encore, à moitié détruit, le blason des Boutier, seigneurs de Sédières « d'azur au chevron d'or, accompagné de trois palmes de même ». Un large escalier de pierre, à la romaine, entre les grandes salles et les cuisines situées au rez-de-chaussée du donjon, permet d'accéder au premier étage. Les pièces y donnent, côté cour, sur une galerie reproduite également à l'étage supérieur. La salle située au-dessus des cuisines abrite une cheminée monumentale au manteau orné de trois médaillons : les figures représentées sur ceux de gauche et de droite n'ont pas été formellement identifiées (saints ou seigneurs des lieux ?), tandis que les armoiries du médaillon central ont été martelées. Une autre cheminée monumentale, richement décorée, orne la pièce d'apparat du second étage.
La cheminée Renaissance du deuxième étage porte une inscription latine peinte relatant le passage de Henri IV. Des quatre corps de bâtiments construits en quadrilatère avec une cour intérieure construits dès l'origine de l'édifice, il ne reste aujourd'hui qu'un pont-levis enjambant les fossés et donnant accès à une porte. Cette dernière est flanquée de deux tourelles qui ouvrait sur la cour intérieure. Le donjon carré à quatre étages était situé à l'angle opposé, au nord. illustration : Sédières avant 1914 - Cheminée dite "de Henri IV" - Vues cop SHAV
À la fin du XVIIème siècle, les Lentillac, héritiers des lieux, aménagèrent un jardin à la française. Une chapelle dédiée à Saint Laurent fut construite sur le domaine au XVIIIème siècle. Elle était publique, ouverte aux habitants de Clergoux et des environs. Détruite après la Première Guerre mondiale, on suppose qu'elle se trouvait à la place de la maison du gardien. En 1822 Madame de Sédières perdit son fils Alexandre de Sédières, il était le dernier descendant mâle de la famille et il fût le dernier comte de Sédières. L'héritière du château le vendit, en 1848, à Gabriel Delessert, préfet de police et beau-père du comte de Valon (propriétaire à l'époque du château de Saint-Priest-de-Gimel, homme politique plus gros propriétaire foncier du département), qui le garda quatre ans avant de le vendre à son tour. Le château fut enfin acheté en 1861 par le colonel Adolphe de Chanal, qui devint par la suite général de brigade (1870), commandeur de la Légion d'honneur et député de la Corrèze. Le château comme le domaine, de plus de trois cents hectares, avaient beaucoup souffert de leur abandon. Ils furent restaurés l'un et l'autre, avec le souci de préserver au château son style et son caractère.
Victor Adolphe de Chanal entreprit des travaux de restauration avec le souci de préserver le style et le caractère de l'édifice. En effet, en 1862, une importante restauration sera menée, certainement sous la direction du célèbre architecte-restaurateur Viollet-le-Duc. Même si rien ne permet de l'affirmer, la conception de l'ouvrage porte sa griffe. L'aile nord-ouest fut reconstruite de fond en comble, conçue dans un style médiéval austère, dénué de tout ornement, mais dans un ensemble cohérent qui ne porte pas ombrage à la partie Renaissance du château. Les terrasses des deux premiers étages furent murées pour former des galeries. Les plafonds furent ornés de poutres ou de caissons moulurés, les murs couverts de lambris et de tapisseries.
À sa mort, sa fille Béatrice et son gendre, le baron et la baronne de Neukirchen de Nyvenheimn, poursuivirent l'aménagement intérieur en introduisant des tableaux et des objets d'art : tapisseries de Flandres, faïences de Delft, plafonds italiens, mobilier Renaissance. La décoration intérieure s'accompagne également de l'installation du chauffage et de l'éclairage au gaz.
N'ayant pas d'enfant, ceux-ci créèrent, à partir de 1892, un orphelinat sur leurs terres, dont la mise en valeur devait assurer les revenus. Les enfants étaient accueillis à titre gracieux, sauf exceptions, comme pensionnaires et recevaient une bonne éducation et une formation achevée d'ouvriers agricoles (et non pas pour profiter de leur travail et les exploiter, comme il est soutenu imbécilement sur la page wikipédia... certainement par un esprit politiquement sectaire et anti-religieux et anti-noble primaire). Confié à des religieux (frères de Saint-Gabriel puis franciscaines de la Providence de Seillon du Mesplier), l'orphelinat appelé aussi "Institut d'études agricoles", permettait de prendre en charge et d'éduquer des enfants malheureux. Les orphelins bénéficiaient de la nourriture, de l'entretien, d'un hébergement et d'un enseignement professionnel. L'orphelinat était un bâtiment majestueux long de 43 mètres constitué de deux pavillons à trois étages et pouvait accueillir environ cent enfants. Il fut fermé en 1904 à la suite de la promulgation des lois sur la laïcité de l'enseignement. Les enseignants religieux s'opposant à abandonner les enfants, refusèrent de sortir. Les autorités républicaines firent intervenir la troupe et délogèrent enfants et religieux de force. Les enfants furent placés de force chez des agriculteurs ou jetés à la rue, car beaucoup refusèrent, et les religieux eurent le choix entre rejoindre une autre affectation ou quitter les ordres. Les anciens propriétaires extrêmement affectés firent alors valoir leur droit de préemption et réintégrèrent les lieux pour les vendre dans la foulée, le 5 septembre 1904 car Béatrice émigra et suivi son mari le Baron Alphonse Neukirchen de Nyvenheim à La Haye. Pendant la Première Guerre mondiale, réquisitionné par le Ministère de la Guerre, l'orphelinat de Sédières servit d'hébergement à plusieurs centaines de prisonniers, d'officiers et d'officiers supérieurs allemands. Le bâtiment se dégrada lentement sans aucun soin, malgré le rachat par le département en 1965 dont les autorités avaient programmé sans rien ne dire le déclin final car seul le château semblait intéressant. Les toitures lachèrent, puis les planchers et les poutres, enfin, le grand escalier central s'effondra. Dans l'indifférence absolue des corrèziens, ce superbe bâtiment qui n'avait servi que 12 ans seulement ne vit pas son siècle. C'est vers 1978 qu'il fut détruit, qualifié de vétuste malgré l'évidente utilité touristique et culturelle qui aurait pu être trouvée. Pour plus d'informations exclusives à notre site, consultez la page spéciale "pour rétablir une vérité" ci-dessous...
Quant au château, abandonné, il continua lui également à se dégrader après la guerre. Du mobilier Renaissance et des boiseries, il ne restait déjà plus rien après les vols du voisinage lors de l'occupation et la bibliothèque avait été complètement pillée. Une des quatre tourelles menaçait de s'effondrer sous l'effet de la végétation, la toiture d'ardoise était en partie éventrée, les cheminées se disloquaient, les huisseries étaient soit arrachées soit dépourvues de leurs vitres. La voûte de la grande salle du rez-de-chaussée ne tenait plus que grâce à des étais. Les différents propriétaires qui succédèrent n'eurent ni les moyens ni la volonté de lutter contre l'inexorable dégradation des lieux.
En 1965, grâce à l'intervention énergique de Charles Spinasse et du Dr Peuch, conseillers généraux des cantons d'Égletons et de La Roche-Canillac, le Conseil Général de la Corrèze se porta acquéreur du château et de ses abords, l'Office national des forêts des cent vingt-sept hectares de bois qui restaient de son domaine, sur 500 en 1904. Lorsque le Département décide d'acheter le domaine, le bâtiment est en état de ruines. Dès l'achat du château pour la somme de 40 000 Francs seulement, les premières mesures d'urgence sont prises, mais uniquement pour lui mais pas pour le vaste bâtiment de l'ex orphelinat. Le château fut à peu près complètement réhabilité en plusieurs campagnes de travaux menées sous la direction successive des deux architectes en chef des Monuments historiques Gabor Mester de Paradj (1965) et Pierre Lebouteux (1965-1973). Hélas, les travaux s'arrêtèrent ensuite avec le départ d'une génération d'élus et de leur politique de réhabilitation. Plusieurs salles n'ont pas retrouvé tout leur éclats ni leurs plafonds, décors et meubles, de même que le parc grandement laissé en l'état de prairie. Sédières attend un second souffle, semblable à celui magnifiquement soutenu par le département voisin de la Dordogne dans son domaine de Campagne. Se visite.>http://www.sedieres.fr
-le Coudert : château encore visible au XIXème siècle, aujourd'hui disparu.
à Champanhac la noilha - Champagnac la Noaille,
- au bourg, le château était le siège d'un puissant fief dépendant des Chanac au XIVème siècle en premier hommage et des Ventadour ensuite. Gérald de Geoffre, chevalier, cité en 1088, est « guetteur des vicomtes » : il est l’un des hommes d’armes de la vicomté de Ventadour en poste à Champagnac. Le château avait presque totalement disparu au moment de la révolution, étant en ruine. Il ne reste que la forme de la motte sous le centre du village, dont J.B. Poulbrière dit que la maison forte était accolée au pignon sud de l'église pour avoir recueilli souvenirs et constatations. Lorsque les Chanac s'en désintéressèrent, la seigneurie passa aux la Noaille. Un étude très intéressante est faîte par l'historien Claude Latta, (qu'il peut publier sur notre site!). >http://saintremy.mairie.pagespro-orange.fr/Les_seigneurs_de_Champagnac-la-Noaille.pdf
- la Noaille : seigneurie voisine appartenant aux seigneurs éponymes qui étaient de Mirambel, branche locale des Mirambel de Saint Rémi dans le haut-pays. Elle fut transmise aux Cardaillac de Végennes à la fin du XVIIIème siècle. Le 13 avril 1792 le château fut pillé par la population locale car son seigneur de la famille des Roquemaurel d'Ytrac en Auvergne avait émigré. Le bien, ou se qui en restait, fut saisi comme bien national, vendu et démoli. Au XIXème siècle une maison bourgeoise fut reconstruite.
- Sédières, vu plus haut, était situé sur la paroisse de Champagnac et fut détaché sur Clergoux en 1850. Le tombeau de ses seigneurs fut détruit en 1885 : il datait de la fin du XIIIème siècle/début XIVèmes. Quatre colonnettes sur entourage plein, supportaient un faîtage à deux pentes. Les pierres retaillées furent hélas utilisées par économie et surtout facilité pour réparer le clocher de l'église. Le gisant fut également démonté et certainement ré-utilisé...
au Jardin,
- la paroisse relevait du prieur de Moustier Ventadour. En 1748, selon JB Poulbrière, Hector de Lévis (lire H. Mériadec de Rohan - duc de Ventadour), octroie 300 livres de portien congrue au curé Nicolas Comte (~1800€). Les seigneurs de Valon et de Lamirande recevaient également une taille et des dîmes. Point de maison forte au bourg
- seigneurie à Fioux avec probable repaire sur la hauteur, vieil étang banal encore visible, pour les Sédières puis les Soudeilles puis aux Valon d'Ambrugeat comme pour Saint Hippolyte et Neyrat.
- Puyhabilier fut fief certainement à un seigneur éponyme puis aux Lamirande
à Eyren - Eyrein,
- les seigneurs d'Eyren sont notés en 1112 avec Raymon et Maurine, puis au XIVème avec Gilbert et plus tard Adélaïde (sa fille ?) religieuse à Bonnesaigne. Ensuite ce sont les Sédières puis les Lentilhac qui leur succèdent. Eyren est uni à Sédières. Le château n'existe plus.
- les Juge ou la Jugie possèdent un château dans leur village proche d'Eyren et s'allient avec les Roger. Cette famille va immédiatement s'élever et devenir très puissante. Au début du XIVème siècle, Jacques Juge épouse Gillemette de Roger, soeur du Pape Clément VI et tante de Grégoire XI. Leur fils Nicolas de la Jugie étant sans enfant et fraîchement ennobli en 1338 (par le Roi Philippe VI - effet familial) transmit ses fiefs à une des ses soeurs, Hélis, mariée à Guy de Puydeval. Ses frères furent des prélats de l'Eglise qui dôtèrent d'une tour au moins la château familial. L'un (Guillaume) fut cardinal en 1343 et garde des sceaux, enseveli à la Chaise Dieu avec son oncle Clément VI , l'autre (Pierre) archevêque de Narbonne et ambassadeur puis Cardinal, enseveli à Narbonne, le dernier des frères (Hugues) évêque de Béziers. Le fief de Puydeval fut ensuite vendu au XVIIème siècle aux Sédières et annexée à son tour. La famille de la Jugie va disparaître de la vicomté en migrant vers le pouvoir. Le château n'existe plus.
- à noter au sud de la paroisse , le Puy de la Tour, toponymie intéressante suggérant une motte à 610m d'altitude.
à Montaignac,
à Senc Yboly - Saint Hippolyte,
-la seigneurie surveillait le passage du Doustre dont le cours se resserre aux cascades de Salin avant de s'enfoncer dans sa vallée vers le Jardin. Les seigneurs éponymes existent jusqu'au XVème siècle. La famille, ou en tout cas le dernier chevalier, à sale réputation : "Pierre de Sainct Yboly, escuier, seigneur dudict lieu, en brigandines, salade, voulge, espée et dague". Une Senc Yboly (sa fille?) épouse au XVème s. le seigneur d'Ambrugeac, Hugues de Beynette. Leur fille, Huguette, apportera la seigneurie à son époux, Jacques de Champier (et non de Valon comme le dit JB Poulbrière qui saute une ou deux générations). Les Champiers sont seigneurs de Palisse à Champiers et au Boucheron, et d'Ambrugeac et de Senc Yboly. La famille changera le patronyme des premiers nés pour devenir les du Boucheron d'Ambrugeac pour les uns et pour les autres du Boucheron de Saint Hippolyte, puis le nom de Valon passera dessus pour finir en Valon de Saint Priest. Beynette et Ambrugeac tomberont en quenouille. Les Maumont et les Lanteuil puis les Lestang furent également co-seigneurs. Pierre de Lestang acheta la seigneurie à Jean du Boucheron d'Ambrugeac le 31 mars 1618. Son héritière, Martiale, épousa le juge général du duché de Ventadour en février 1663, Dodet. Une descendante rapporta ensuite Saint Hippolyte aux Valon ! La boucle était faîte... Le château primitif était un repaire, certainement situé face à l'église sur un tertre dont on devine encore la forme. Il n'en reste rien depuis longtemps.
-seigneurie à la Besse appartenant aux Lestang, peut-être maison forte. Disparue.
-seigneurie à Montanhaco - Montagnac (devenu fin XIXème "Montaignac" par fantaisie humaine) encore plus importante que celle de Senc Yboly. Pour une fois, elle surveille de sa colline, le Puy la Garde, une route, la vieille voie romaine de Bordeaux à Lyon. Sur son Puy, son suquet plutôt, à 636 m. d'altitude, le château dominait la voie d'une cinquantaine de mètres. On se perdrait sur l'étymologie : Mont Agnac ou villa montanii ?, n'éxagerons rien : ce n'est pas une montagne. Le lieu était vassal de Maumont en premier hommage et de Ventadour par les Maumont. Un seigneur Bernard de Bovis (ou Bouis) puis les de Chassagnes, enfin les Montagnac possédèrent le repaire. Lors des croisades les Montagnac sont présents. Jean de Montagnac avait 50 hommes en 1578, puis commandait 80 lances après 1578 soit à peu près 800 hommes, ce qui considérable. Il assiégea Tulle en 1586, puis captura le seigneur de Saint Angel, prit Bellechassagne, il fut ensuite élu aux Etats généraux de 1588 pour représenter la noblesse du bas Limousin et mourut en 1593. Sa fille unique transmit par mariage la seigneurie aux de Gain. Ils firent rénover le repaire au XVIIème siècle. Mais il était fort usé en 1710, du moins sa chapelle. Un de leurs descendants né au château en 1744, François, devint aumônier du Roi puis évêque de Tarbes. Il fut chassé à la révolution et, après de longues migrations, mourut à Londres en 1806. Plus près, l'amiral de Montaignac, issu d'une branche partie du lieu fut ministre de la marine et des colonies entre 1874 et 1876. Il avait racheté la terre d'origine. C'est lui qui fit démolir les vestiges du repaire pour faire édifier un joli castel néo-médiéval à la place. A titre de mémoire il fit conserver et intégrer un pan de mur ancien dans la nouvelle tour carrée. Le castel ne fut jamais terminé selon les plans prévus. Son fils Renaud, impliqué sans son domaine où il avait créé une école de Soeurs, disparut dans une course automobile. désormais fermé, ne se visite pas
à la Chapelle Spinasse,
les Roger de Maumont étaient co-seigneurs. Guillaume III vicomte de Turenne était ainsi seigneur du lieu et de quelques autres voisins et rendait hommage à Ventadour ! Au XVème siècle les Gimel sont co-seigneurs, les de Gain plus tard. Pas de maison forte connue.
à Rosiers d'Egletons,
Rosiers est un ancien village qui eut une histoire avant les romains et le moyen-âge. Là nait le Doustre, à "la fontaîne claire", au pied des puys de Chaumond et Faux, à 800m d'altitude. En réalité son bras le plus long est le Rabinel qui apparaît à Combasteix de Vedrenne, donc à Egletons !
- Maumont avait un paysan madré qui, au début du XIIème siècle, profita (ou bien fut invité) un jour de venue inopinée de Guillaume IX, comte de Poitiers et duc d'Aquitaine, à Ventadour. Il s'y précipita avec sur son char à boeuf un tonneau de cire de miel qu'il répandit en disant haut et fort que c'était ainsi que se livrait la cire chez Ebles II de Ventadour. En récompense de cette sortie remarquée par le suzerain, Ebles créa chevalier le paysan flatteur. La famille était intrépide et se répandit dans le monde laic comme dans l'Eglise. Maumont s'édifia et devint baronnie. En 1345, Jean, seigneur en partie de Maumont et de Gimel, était capitaine du château de Limoges, lieutenant de la compagnie des hommes d'armes du Maréchal de Clermont. Mais déjà les Maumont sont dominés par leurs anciens vassaux et son mariage avec Marie de Faurre d'Egletons est accordé par Guillaume Roger II, vicomte de Beaufort, frère du pape Clément VI. En 1361, Bertrand Maumont (son fils certainement) prête serment à Jean Chandos, connétable de Guyenne et représentant du Roi d'Angleterre Edouard III. Il livre plus tard son château à Lancastre en 1373. Les Ventadour semblent ne pas s'en méler. En représailles, le roi de France Charles V lui confisqua tous ses biens mais il les lui rendit l'année suivante, à la suite d'interventions puissantes dont on peut deviner l'origine. Charles, seigneur de Maumont, épousa le 2 décembre 1500 Anne de Bourdeilles, sœur du père de Brantôme. Jean de Maumont accompagna en 1530 le vicomte de Turenne à Madrid pour signer le contrat de mariage de François Ier avec Eléonore la soeur de Charles Quint. Sa fille Charlotte fut une des dames d'honneur de la nouvelle reine Eléonore, la seconde épouse de François Ier. Avec ses enfants s'éteignit la maison de Maumont. La branche locale disparut après le mariage de la dernière héritière, Jeanne, avec Claude de Lévis Ventadour, seigneur de Charlus, au XVIème siècle. En 1631 la baronnie est vendue aux Fontanges au prix de 80 000 livres (à peu près 700 000€). Elle devint marquisat. Marie Angélique de Scorailles fut l'épouse d'Antoine de Fontanges de Maumont, au moment où elle fut l'éphémère maîtresse de Louis XIV. Elle fut créée Duchesse de Fontanges et non de Maumont, car il y avait déjà un Duc à Ventadour. Puis les Meynard et les Vaublanc s'y établirent. Le château avait été transformé au XVème s., c'est celui que l'on voit. A la fin du XIXème J.B. Poulbrière le décrivait comme un "galetas" en raison de son mauvais entretien et de son risque de ruine. Il a depuis été sauvé par la famille de M. et Madame H. Filhoulaud (A de V) et domine fièrement la vallée du haut Doustre. Ce château est bien des Maumont et non des Roger, famille papale et ecclésiastique, d'une autre maison très voisine... qui durent certes le visiter. Pourtant une nombreuse littérature continue contre vents et marées à le désigner comme tel. Ne se visite pas © SHAV
-les Rogers - la famille des Papes : cette famille devenue à demie noble était liée ou vassale des Maumont selon toute vraisemblance. J.B. Poulbrière pense même que leur demeure était intégrée dans l'enclos de Maumont. On a cherché le lieu sans le trouver. Le chanoine Billet pensait à la maison forte du Masmonteil qui semble avoir existé peut-être sur un tertre encore visible au dessus de la route d'Egletons à Mauriac. Il y a surtout, aussi entre Masmonteil et le Theil, un lieu-dit "Papadour" en limousin ou "le Papau" en français, qui fut donné a posteriori à l'endroit, c'est peut être bien là son lieu de naissance. Des fouilles eraient intréssantes. En tout cas les Roger ou Rogiers (de Rosiers certainement) étaient gros paysans ou petits seigneurs, très éventuellement de fraîche date, et bien peu visibles avant la 1ère moitié du XIIIème siècle. C'est le grand-père, Pierre Rogier, né vers 1240, qui lance réellement une belle famille qui va largement prospèrer. Il a au moins un fils, Guillem ou Guillaume, né vers 1265 et décédé en 1338 qui est marié avec Guillemette de La Monstre. L'ascension est spectaculaire autant que très mystérieuse.
De ce mariage vont naître au moins 6 enfants qui tous feront une série d'alliances souvent remarquable, parfois avec des destins exceptionnels. Les frères et soeurs sont :
Le plus célèbre de tous ces enfants sera Pierre, né en 1291 au Masmonteil, très près d'Egletons et non à Maumont. Il devient Pape en mai 1342 sous le nom de Clément VI, après un parcours extraordinaire dans ses études dès l'âge de 10 ans puis dans sa carrière ecclésiastique et politique auprès du Roi Philippe VI de Valois. La question demeure de connaître les conditions qui permirent à cet enfant de petite noblesse (?) rurale d'accéder à de telles études et à un tel pouvoir ? On ne retrouve pas d'éléments sur ce sujet intéressant. Il va devenir un pape flamboyant dont l'histoire locale ne comprend pas l'importance, hélas. Il décéde le 6 décembre 1352 à Avignon, à l’âge de 61 ans. Il est inhumé en mai 1353 à l'Abbaye de La Chaise-Dieu où il repose toujours. Il avait dit son désir de créer une lignée de prélats de son entourage familial et seigneurial de Ventadour et du bas Limousin en Avignon : "Je y plantera un tel rozier des gens de nostre nation que il ne sera de chi à chent ans que il y en oit des racines et des bouton". Il tint parole. Cette allusion directe aux Rosiers-d'Égletons fit qu’en trois décennies la province du Limousin fournit à la Très Sainte Église une dizaine de patriarches, une cinquantaine de cardinaux et plus de trois cent évêques.... Il fit en plus la richesse de toute sa famille et de ses amis.
Son frère Hugues, grace à son oncle Pierre Roger, abbé de Saint-Pons-de-Thomières, fut prieur de Pardailhan. À la mort de son oncle, il entra à l’abbaye de Saint-Jean-d'Angély. Clément VI le sortit de son abbaye, le , pour en faire l’évêque de Tulle et une semaine plus tard, le 20 septembre, il le nomma cardinal-prêtre au titre de Saint-Laurent in Damaso, une des principales basiliques de Rome? ! Il fut également élu Pape, comme son frère, le mais il refusa la dignité suprême !
Son neveu, Pierre, né en 1329 ou 1331 et fils de Guillaume, sera élu à son tour le 201eme Pape, sous le nom de Grégoire XI, le raménera le Saint Siège au Vatican où il sera certainement empoisonné, le à Rome, par les prélats italiens. Ce sera le dernier Pape français.
Le fils aîné, Guillaume II Rogier (de Beaufort), Seigneur de Rosiers d'Egletons (ca 1310-/1383), marié avec Marie de Chambon (†1344) puis en 1345 avec Guérine de Canillac, Baronne de Canillac (†ca 1359) et enfin une troisième fois marié en 1368 avec Catherine d'Adhémar de La Garde du Monteil. Il aura dix enfants dont un, Pierre, sera également élu Pape sous le nom de Grégoire XI (1329-1378). Guillaume avait reçu en dot le fief du Chambon, en Combraille, en 1331, il fut anobli l'année suivante (donc preuve qu'il ne l'était pas auparavant, alors qu'il aurait du l'être si l'on en croit la plupart des historiens !). Les revenus archiépiscopaux de son frère Pierre, dont l'archevêché de Rouen en faisait le plus riche de France, furent judicieusement investis et l'aidèrent amplement dès avant la papauté. Le , Guillaume II Roger put acheter à Bernard de Ventadour sa terre de Rosiers-d'Égletons. Puis le , il rendit hommage à Marie de Flandre, veuve de Robert, comte d’Auvergne et de Boulogne, pour son château de Margerides qu'il venait d'acquérir. Le fief voisin de Saint-Exupéry-les-Roches lui fut vendu par Aymery de Châlus, en 1338. Le 27 mai 1342, 8 jours seulement après l'élection de son frère comme Pape, Philippe de Valois accorda 1 000 livres de rente à Guillaume II Roger dans les comtés du Maine et d’Anjou. Il se vit attribuer, la même année, le fief de Beaufort-en-Vallée d'où le nom composé qui désormais va compléter, améliorer puis remplacer celui de Roger, et même se substituer à toute la famille collatérale ! Jean de Normandie, duc d'Anjou, ayant transformé ce fief en vicomté en 1344, Guillaume fit restaurer le château dès 1345. Puis la faveur royale en fit un comté en 1347, tout en exemptant de chevauchée le nouveau comte. Un autre fils, Guillaume III devint vicomte de Turenne en fondant la race des Beaufort Turenne, lorsque Clément VI son oncle lui offrit en février 1350 en dote de mariage la vicomté qu'il s'était faîte remettre à titre plus ou moins grâcieux.
Almodis Rogier, mariée en 1314 avec Jacques de Besse;
Bertrande Rogier, mariée avec Nicolas de Besse.
enfin Guillaumette Rogier, mariée avec Jacques de La Jugie (†ca 1358) dont nous avons parlé avec Eyren (Eyrein).
(voir la page spéciale en création sur "les Papes de Ventadour").
à Péret bel Air,
paroisse de Montagne, au-dessus des sources du Doustre dont la toponymie est confuse. JB Poulbrière ne croyait guère à une référence à Saint Pierre, patron de l'église et nom de la source miraculeuse, nous le suivons et pensons plutôt à "Peyre bel Herm", du latin eremus signifiant désert, par extension "lieu où rien ne pousse, lande puis souvent lieu habité par un moine seul, un hermite". L'endroit est haut, quasi désertique en population (surtout de nos jours) et avait un charme certain lorsqu'il était couvert de paturâges et de landes de bruyères donnant à la neige d'hiver des lointains infinis et au soleil d'été une couleur sans égal. Un charme hélas disparu dans toutes les Monédières dont Péret est la limite ultime et ouvre sur le plateau de Millevaches (melos vacua, lieu élevé et vide qui n'a rien à voir avec les vaches et les sources, en confusion avec le limousin mal parlé).
Péret eut seigneurie, qui l'eut cru ! Le malheureux chevalier expédié en ces contrées au climat affirmé n'était pas le plus chanceux, partageant le sort de son voisin Beynette à Ambrugeac, coincé à presque mille mètre d'altitude qui gelait une partie de l'année dans son repaire et dut se résoudre à descendre vivre dans le bourg. Le chevalier de Péret était quand même plus chanceux car mieux installé et surtout bien plus proche de Ventadour. Sa mission était de surveiller la montagne entre les puys de Sarran et ceux de Davignac tenus par d'autres que lui. Au dessus des vastes landes du plateau, était la limite avec les Comborn, Bonnefont étant de l'autre vicomté. Devant lui, en contre-bas, les reliefs allant à la vallée de la Dordogne et, après, miroitaient en toutes saisons les Monts d'Auvergne. De cet endroit on voyait une bonne partie de la vicomté.
Où était le repaire ? Nous parierons dans le bourg, à 800m d'altitude, à côté de l'église, bien que l'emplacement ne soit pas le mieux adapté à la défense. Le puy Cétir est 80m plus haut, et le puy de la Justice à 900m de haut juste domine au Nord-Ouest; ils masquent complètement les arrivants du plâteau.
En 1453, Léonet de Beaufort (un des Roger ?) se disait seigneur, puis un Andrieu de Péret en 1626, puis un Martin de Saint Martiel de Puydeval achète le repaire et ses droits en janvier 1650 pour la somme de 5220 livres, ratifiée en 1675 pour constitution (attribution de transfert-héritage) à Mlle de St Martial de Conros, par feu M. de Puydeval, son père selon toute vraisemblance. Les Soudeilles possédaient les fiefs de Theillac et la Brette par les Lieuterêt de Darnetz qui les avaient acquis en 1526 à un Ruben d'Eymoutiers qui les tenaient des de la Jugie depuis 1444.
En dessous de Theillac, deux toponymies intéressantes : le champ del faure et le champ Beaufort.
Ensuite, il fallait remonter les vallées de la Luzège, de la Triouzoune et de la Diège pour découvrir les autres terres de Ventadour.
(La Vicomté IV : à suivre - aller sur la page "menu")
une fondation humanitaire à Sédières : pour rétablir une vérité !
L'Institut Agricole de l'orphelinat Neukirchen de Nyvenheim à Sédières, ou pour rétablir une vérité...
Sédières et son renouveau au XIXème siècle : l'oeuvre d'une famille philanthrope.
C'est en préparant l'article sur le château de Sédières que nous sommes "tombés", au sens littéral du terme, sur une phrase persiflante et à nos yeux haineuse sur la nature de l'orphelinat de Sédières créé par ses derniers véritables propriétaires privés. "...l'orphelinat appelé aussi "Institut agricole", permettait de fournir une main d'œuvre gratuite à l'exploitation. Les orphelins quant à eux bénéficiaient en contrepartie de la nourriture, de l'entretien, d'un hébergement et d'une certaine sécurité..." (in Wikipédia 2018). Ce serait commettre une bien cruelle erreur que de croire que la finalité de cet établissement était la production d'argent et son moyen l'exploitation sordide d'enfants. Bien au contraire, ce fut une oeuvre de charité comme l'on disait à l'époque, sans préjugés contemporains, destinée à accueillir des enfants miséreux, à les doter et les éduquer en offrant une fortune pour leur avenir. Il n'y eut jamais d'aspect vénal, car le lucre n'en fut pas du tout l'essence. Cette fondation fort respectable et onéreuse pour ses créateurs, provint bien au contraire d'un sentiment d'extrême compassion pour les enfants malheureux et abandonnés du bas Limousin. Leur sort était terrible et aucune structure publique n'était prévue pour les héberger et les éduquer. Seuls quelques agriculteurs les prenaient en pension pour trop souvent les exploiter. A Sédières, tout fut prévu pour qu'ils soient bien dans une véritable école privée de formation aux métiers de l'agriculture : des locaux spacieux, modernes et salubres, un encadrement scolaire avec un instituteur et des lectrices religieuses, des formateurs agricoles spécialisés, des ouvriers pour assumer les travaux pénibles dont ils étaient déchargés, des cuisines avec un réfectoire, des repas copieux et equilibrés, une assistance médicale avec une infirmerie, une soeur et quatre médecins bénévoles qui se relayaient chaque semaine, des religieuses et des pères blancs pour les encadrer, un conseil d'administration et des donateurs, un livret d'épargne et la possibilité d'y rester jusqu'à leur service militaire. Le baron et la baronne Béatrice et Alphonse de Neukirchen mirent dix années pour préparer leur projet et construire les bâtiments, à leur frais intégraux et sur leur terre dont ils avaient affecté plus de 150 hectares. Pendant 12 ans ils apportèrent ensuite tout leur soutien à cette oeuvre qui fut brutalement interrompue par la République qu'ils avaient toujours soutenus et sa loi de laïcité de l'enseignement. L'orphelinat fut brutalement fermé, les religieux chassés et les enfants jetés à la rue.
Alors, lorsque l'on peut lire sur cette encyclopédie en ligne célèbre, un propos tellement injuste et révoltant sur la volonté sous-entendue d'exploiter le produit de ces enfants en les faisant travailler gratuitement contre quelques avantages, on désespère de l'âme humaine et de certains délires anonymes qui salissent les meilleurs au delà du temps et des cendres. L'idéologie sousjacente est évidente dans son dénie de la noblesse d'âme, du christianisme et de l'Eglise qui étaient au coeur de cette institution. Que l'auteur de ces mots injustes ne critique-t-il pas ce qui se passa en 1904 pour ces malheureux et leurs religieux, pour les fondateurs et leurs amis ? Que ce faiseur de mauvaise réputation fasse autant dans son époque qu'il ne fut fait à Sédières et que personne jamais ne vienne salir son nom et sa mémoire....
Maintenant rendons hommage à ceux qui conçurent cette institution et pensons à ces enfants qui trop tôt furent chassés ou ne purent plus y être accueillis.
Pour cela nous produisons une modeste contribution sur la biographie des fondateurs et publions des documents inconnus et édifiants sur la philanthropie et la générosité de coeur et de biens de ces personnes, afin que nous ne les oublions point.
Si des lecteurs possèdent d'autres éléments et en particulier des plans ou photographies des locaux, des portraits de la famille de Neukirchen, ou des informations sur leurs légataires et successeurs, faute de descendants après 1913, merci de prendre contact avec nous sur ce site par courriel.
avec Adolphe, Victor, François, de CHANAL, né le 20 juin 1811 à Paris.
Issu de l'Ecole polytechnique et de l'école du génie à Metz, il choisit l'artillerie en 1835, corps dans lequel il est sous-lieutenant, puis il est nommé capitaine en 1841. Il est noté comme étant républicain dès cette époque. En fonction, il entreprend de nouvelles études et devient licencié en droit en 1845. Il est alors employé au ministère de la Guerre jusqu'en 1848, où il est détaché à la commission d’armement de la place de Paris lorsque éclatent les événements entraînant la chute de la monarchie libérale de Louis Philippe Egalité. Sous-commissaire du Gouvernement provisoire à Gap dans les hautes Alpes en mars 1848, puis Préfet du Gard le 29 août 1848 : « il sut mieux que personne maintenir le bon accord entre deux partis religieux ». Nommé Préfet du Bas-Rhin le 23 juin 1849, il est révoqué le 12 mai 1850. On le retrouve Préfet de l'Ain le 12 mars 1851 et démissionnaire après le 2 décembre, « dès la réception des nouvelles de Paris concernant l’attentat contre la représentation nationale ». ?Le coup d'État du 2 décembre 1851, jour anniversaire du sacre de son oncle et de la bataille d'Austerlitz, est l'acte par lequel, en violation de la légitimité constitutionnelle, Louis-Napoléon Bonaparte, président de la République française depuis trois ans, conserve le pouvoir à quelques mois de la fin de son mandat, alors que la Constitution de la Deuxième République lui interdisait de se représenter. Le Prince Président s'engage dans la voie du rétablissement de l'Empire par le biais d'un référendum. Placé hors cadre, Alphonse de Chanal entre alors dans l’arène politique et exerce les fonctions de préfet du Gard jusqu’en mai 1852. Hostile au coup d'état, il donne sa démission; il est l'un des huit préfets de France qui le font, et retourne dans l'armée où il poursuit une brillante carrière. Nommé professeur à l’école d’artillerie de La Fère, il est ensuite promu chef d’escadron en 1854 et lieutenant-colonel en 1864. Il est adjoint au général commandant l’artillerie de la 12ème division à Toulouse lorsque le maréchal Randon le charge de partir en Amérique où il est observateur de l’armée américaine pendant la guerre de Sécession (cf. Gal. V. de Chanal, L'armée américaine pendant la guerre de Sécession, 1872). Il suit les opérations du contingent français dans cette guerre, devenant l'ami du genéral Meade. À l'armée du Potomac, il se lie avec le général Grant, futur président des États-Unis. Nommé colonel, pendant la guerre de 1870 il participe à la campagne franco-prussienne dans Paris assiégé. Général de brigade par décision du 18 janvier 1871, il prend sa retraite et demeure réserviste en 1873.
Il devient ensuite député de Tulle en 1876-1877 puis de 1877 à 1881, il siège au sein de la gauche républicaine (l’un des 563). Il s'est retiré de la vie politique en 1881.
En Corrèze, il est propriétaire du château de Sédières depuis 1861. Il l'a acheté en mauvais état à la famille de Valon. Il le restaura à partir de 1862, peut-être avec l'aide de Viollet-le-duc. Comment le colonel de Chanal vint-il à l'époque en Corrèze, à Sédières en particulier ? Aucun lien familial ne peut être trouvé. Aucun autre document explicatif ne nous est parvenu pour l'instant, mais on nous permettra de proposer une déduction : un autre militaire célèbre, Jean Baptiste Billot, était installé non loin, à Chaumeil et conduisait également une brillante carrière militaire qui l'emmenera au Mexique puis, après la guerre, au ministère des armées. JB Billot avait 17 ans de moins que Adolphe de Chanal, l'un était capitaine quand l'autre était déjà chef d'escadrons en 1861, mais ils avaient en commun d'être ambitieux et républicains tous les deux. Certains esprits suspicieux parlèrent de franc-maçonnerie. On les retrouvera élus de leur département dès 1871 et 1876 dans les mêmes rangs de la gauche républicaine, contre les royalistes et les bonapartistes locaux. On peut très bien imaginer que Billot trouva ce domaine mis à vendre par le comte de Valon, informa son collègue mieux gradé (car tout est affaire de bonnes relations) et s'en fit un allié précieux pour son propre destin en plus d'un ami corrèzien.
Le nouveau propriétaire de Sédières mena de très vastes réparations et modernisations intérieures, en investissant énormément. A. de Chanal avait épousé Elisabeth BLOIS HENRY, née en 1802 avec laquelle il eut une fille unique, Béatrice, née le 18 décembre 1844. La famille de Chanal vivait une grande partie de l'année à Clergoux, n'allant dans la demeure parisienne de Neuilly qu'à la mauvaise saison. La soeur du général, Mademoiselle de Chanal, partageait cet attachement et resta jusqu'à son décès une figure pionnière pour l'orphelinat.
Leur fille unique s'était mariée le 5 juin 1873 à Paris dans le VIIIème ar. avec Alphonse NEUKIRCHEN Baron de NYVENHEIM. Le Général est l'un des fondateurs de la Société des Lettres, Sciences et Arts de la Corrèze à Tulle ainsi que de la Société Scientifique, historique et archéologique de la Corrèze à Brive en 1878. Il était Commandeur de la Légion d'honneur. François Victor Adolphe de Chanal meurt à Neuilly-sur-Seine le . Sa fille hérite alors de ses biens.
avec le baron et la baronne de Neukirchen de Nyvenheimn,
Henriette Béatrice de CHANAL est née le 18 décembre 1844 (un mercredi) à Paris dans le 1er arrondissement. Fille unique et sans autre parent qu'une tante vivant à Sédières, elle s'est marié le 5 juin 1873 (un jeudi) à Paris, dans le VIIIème arrondissement, avec Marie Camille Alphonse NEUKIRCHEN Baron de NYVENHEIM qui était né le 22 juillet 1839 (un lundi) à Toulouse. Ses parents descendaient d'une famille célèbre de la noblesse des Pays Bas dont une branche était devenue française sous Louis XV, du côté de son père, et des Peytes de Montcabrier, du Tarn, du côté de sa mère. Ses 3 frères, Bernard, Charles et Auguste, tous soldats, mourront au combat sans postérité, sa soeur Henriette Prudhomme de Saint Maur sera également sans enfants (+1898). Très jeune et sans formation particulière, il s'était engagé comme chasseur (simple soldat) en 1857 et il devint ensuite guide, puis brigadier. Il fait la campagne d'Italie en 1859 et part en Afrique entre 1865 et 1867. Sous officier à partir de 1869, il est lieutenant en 1870 et capitaine en 1871 au 10ème Régiment de Chasseurs, mais à titre provisoire. On le retrouve après son mariage, capitaine en 1876, puis attaché militaire en Belgique et au Pays Bas en 1881 (effet de l'influence de son beau-père, ou retour aux origines familiales ?). Il est admis à la retraite en 1887 et devient chef d'escadron de réserve pour l'armée territoriale, au service des étapes et chemin de fer. Il avait été créé Chevalier de la légion d'honneur en 1872 et Officier en 1898. Le couple devint propriétaire en 1882 du magnifique château de Sédières, à Clergoux, par succession au père de Béatrice qui venait de faire complètement restaurer la demeure au milieu des années 1860. Ils n'avaient pas de descendance, aussi s'émurent-ils du sort des nombreux enfants abandonnés, laissés en situation de misère et qui étaient sans espoir. Ils décidèrent de donner un sens à leur vie et de préparer l'avenir de leurs biens en faveur de ces petits malheureux. Ils oeuvrèrent à partir de 1882 à la mise en place d'un orphelinat sur leurs terres, face au château. Cette "fondation" en une époque où l'on n'employait pas le mot, avait pour but d'extraire de la misère une centaine d'enfants malheureux abandonnés ou en situation, de les héberger, les nourrir et les éduquer. Ils mirent dix années à tout préparer, acheter et faire construire. Des sommes faramineuses furent dépensées. En 1892 tout était presque achevé et l'institut put ouvrir. La mise en valeur du domaine devait à terme assurer les revenus nécessaires au fonctionnement. Les enfants étaient accueillis à titre gracieux ou bien placés par des mécènes ou enfin par les services du département à la moitié du prix de pension habituel comme élèves pensionnaires et recevaient une bonne éducation et une formation achevée d'ouvriers agricoles (et non pas pour profiter de leur travail gratuit et les exploiter, comme il est soutenu imbécilement sur la page wikipédia... certainement par un esprit "gaucho anti-catho" primaire). Confié à des religieux (frères de Saint-Gabriel puis franciscaines de la Providence de Seillon du Mesplier) bénévoles dans leur mission, l'orphelinat appelé aussi "Institut agricole", permettait de prendre en charge et d'éduquer ces enfants malheureux. Les orphelins bénéficiaient de la nourriture, de l'entretien, d'un hébergement complet et d'un enseignement professionnel à une époque où n'existait aucune structure dans le département. C'était un bâtiment majestueux long de 43 mètres constitué de deux pavillons avancés à trois étages avec un vaste corps central surmonté d'un clocheton et il pouvait accueillir environ cent enfants, avec une possibilité de monter à 200 pensionnaires, chacun recevant un trousseau complet offert. Il possédaient des dortoirs modernes, confortables et aérés, une salle de réfectoire, des cuisines, une infirmerie avec une soeur infirmière, quatre médecins bénévoles d'Egletons et de Tulle (les docteurs Madranges, Sikora, de Chammard et Maschat) assuraient gratuitement les soins toutes les semaines à tour de rôle, un instituteur certifié s'occupait des classes avec l'aide des religieuses, un directeur de formation agricole et plusieurs employés dont des religieux et des ouvriers salariés étaient destinés à l'enseignement agricole et aux travaux; le tout placé sous l'autorité d'une directrice religieuse. Chaque enfant de plus de 15 ans recevait un émolument mensuel placé sur un compte d'épargne pour sa sortie. Admis à partir de l'âge de 7 ans, les garçons pouvaient y rester jusqu'à leur service militaire pour les plus isolés, sinon ils partaient vers l'âge de 18 ans. Plusieurs bâtiments agricoles extrêmement modernes furent édifiés avant sa mise en fonction et dôtés de l'appareillage le plus moderne de l'époque. Plus de 160 hectares lui étaient affectés ainsi que plus d'une centaine d'animaux. La ferme modèle expérimentait les nouvelles cultures, les plants exotiques sélectionnés, les rendements productifs et les nouvelles méthodes scientifiques d'agriculture et d'amendement sur avis d'un ingénieur. Un comité d'administration fut mis en place et contrôlait les comptes et l'activité. Des donateurs se mobilisèrent pour doter l'établissement et payer les pensions, dont, notons-le car cela nous ramène à notre objet, le Marquis de Lévis Mirepoix, "château de Ventadour par Egletons" ! Ventadour contribuait ainsi à sa dernière oeuvre du siècle... Mais l'essentiel de l'investissement énorme fut assuré par le couple Neukirchen de Wydenheim qui transféra une très grande part de ses revenus et légua ensuite l'ensemble des biens concernés à l'orphelinat, quelques années après sa création. Ce fut une grande erreur de générosité, en effet, car 12 ans après l'ouverture, à la suite de la promulgation des lois sur la laïcité de l'enseignement, il fut fermé arbitrairement en 1904. Les enseignants religieux s'opposant à abandonner les enfants, refusèrent de sortir. Les autorités républicaines firent intervenir la troupe et délogèrent de force enfants et religieux. Les enfants furent placés d'autorité chez des agriculteurs ou jetés à la rue, car beaucoup s'enfuirent en ne voulant pas retomber dans la misère sordide, et les religieux eurent le choix entre rejoindre une autre affectation improbable en cette période ou quitter les ordres, ce que beaucoup furent contraints de faire. Les anciens propriétaires firent alors valoir leur droit de préemption pour éviter la désintégration totale du domaine légué et, complètement effondrés, eux qui étaient républicains de longue date, durent le racheter pour ensuite le revendre, le 5 septembre 1904. Ils se séparèrent également du château et du reste du domaine. Il émigrèrent ensuite aux Pays Bas et, semble-t'il, ne revinrent jamais dans leur ancienne fondation ni en Corrèze. Pendant la Première Guerre mondiale, réquisitionné par le Ministère de la Guerre, l'orphelinat de Sédières servit d'hébergement à plusieurs centaines de prisonniers,officiers et d'officiers supérieurs allemands qui apprécièrent le confort. Le bâtiment se dégrada ensuite lentement pendant cinq décennies sans aucun soin, malgré plusieurs propriétaires attirés par la valeur des bois et des terrains à revendre. Puis eu lieu en 1965 le rachat par le département du château et de l'ancien Institut dont les autorités avaient programmé, sans rien en dire, le déclin final de l'orphelinat, seul le château leur semblant important. Les toitures lachèrent peu à peu, puis les planchers et poutres, enfin, le grand escalier central monumental s'effondra, après des pillages en règle du voisinage. Dans l'indifférence absolue des corrèziens ni aucun projet pour le sauver, ce superbe bâtiment qui n'avait servi que 12 ans seulement à son objet ne vit pas son siècle. C'est vers 1978 qu'il fut détruit par les engins de démolition, qualifié de "vétuste" malgré l'évidente utilité touristique et culturelle qui aurait pu être trouvée. Quant au Baron et à sa femme, ils avaient émigré à la Haye suite à leur désespoir. Béatrice est décédée après 1904, sans que l'on sache quand, où et comment, (amis généalogistes nous apprécierions votre aide) et son époux Alphonse est mort à l’âge de 78 ans, le 30 avril 1918 (un mardi), à Paris dans le VIIIème arrondissement, au 164 du Blvd Saint Honoré, là où ils s'étaient mariés. On ne sait où ils sont enterrés (Paris ? - Neuilly sur Seine où A. de Chanal avait une résidence ? nous aimerions bien savoir si leur tombe existe toujours). Aucune plaque à Sédières ne rappelle leur action, aucune rue ne porte leur nom dans la région et plus aucun ancien orphelin ne survit encore... Seule subsiste la statue de la Vierge, désormais rouillée, qui veillait sur l'orphelinat et les anciens bâtiments agricoles dont un abrite désormais des concerts. La famille directe semble avoir totalement disparu en France et aux Pays Bas selon nos recherches. Il ne reste que ce souvenir, sur nos pages, des personnes estimables qu'ils fûrent, pour tenter de répondre aux infâmies sous-entendues par certains, et distillées sur d'autres sites, qui ignorent tout et sont victimes de leurs préjugés idéologiques néfastes.
Publication de 1892 présentant l'orphelinat -Institut d'études agricoles par Béatrice & Alphonse NEUKIRCHEN de NYVENHEIM
SEDIERES INSTITUT NORMAL D'OUVRIERS AGRICOLES
AVANT-PROPOS
La question sociale est plus que jamais à l'ordre du jour et devient de plus en plus l'objet des plus sérieuses préoccupations.
C'est qu'en effet les revendications de la classe ouvrière des villes n'ont jamais été plus exigeantes, plus impérieuses, et par cela même la solution du vieux problème rendue plus difficile.
Aussi voyons-nous reparaître aujourd'hui dans nos assemblées parlementaires les mêmes utopies et les projets de loi les plus fantaisistes dont certains d'entre eux, s'ils étaient adoptés, constitueraient plutôt un véritable attentat contre la liberté individuelle qu'un remède salutaire aux maux qu'il s'agit de soulager. Quoiqu'il en soit, l'Etat tend chaque jour davantage se substituer à l'initiative individuelle et à la charité privée. Le socialisme d'Etat ! Est-ce bien là que les deshérités de ce monde trouveront enfin la fortune ou seulement même un bien-être relatif ? C'est rien moins que probable.
Toujour-est-il que, jusqu'à présent, c'est encore à cette initiative individuelle, à cette charité privée qu'ils doivent les quelques améliorations apportées à leur situation si cruelle et si digne d'intérêt. Dieu merci, en France, la compassion et la générosité sont deux sources inépuisables, aussi est-ce vers celle-ci que continueront à se porter ceux qui ne se nourrissent pas de chimères et qui sincèrement philanthropes ne cherchent point dans l'étude des questions sociales un tremplin à leurs ambitions politiques.
De nos jours, une des principales causes de cette excessive misère qui désole nos grandes cités réside évidemment dans un accroissement constant et démesuré de leur population, excédent du en majeure partie à l'émigration qui sévit de plus en plus dans nos campagnes. Nombreuses sont les causes de cette émigration et intéressante en
serait sans doute une étude approfondie, mais ce modeste opuscule ne saurait pouvoir prétendre à de tels développements, son cadre nécessairement restreint lui permet tout au plus les quelques généralités suivantes se rattachant directement à son véritabte objet.
Il est incontestable que le système du libre échange à outrance à porté les coups les plus funestes à l'agriculture française dans nos régions agricoles les plus fertiles comme dans les plus pauvres. L'écoulement avantageux de tous les produits s'est trouvé bientôt complètement arrêté. Obligé de vendre son blé 18 francs quand il lui en coûtait 24 et de même pour ses autres productions, le cultivateur n'a plus songé qu'à subvenir strictement à ses besoins personnels d'existence. Dès lors, réduite a son plus faible rendement mais chargée des mêmes impôts et toujours exposée aux mêmes terribles aléas des saisons, sa terre devenait insuffisante à l'entretien d'une nombreuse famille; c'était la misère profonde et a bref délai la ruine complète. Il fallait donc se débarasser à tout prix des bouches inutiles. La ville, avec ses apparences trompeuses de gain facile, de plaisirs, de luxe et de confort, s'offrait à lui ainsi que les Républiques plus ou moins Argentines avec leur mirage d'une fortune promptement réalisable.
Aussi voyons-nous tous les ans à des époques fixes une foule d'hommes jeunes et vigoureux abandonner les villages et encombrer les gares; les uns vont s'entasser sur des navires, véritables charniers, qui les déposeront sur des rivages lointains ou le plus grand nombre ne trouvera que la faim, les maladies et la mort; les autres, moins aventuriers, vont à la ville former ce trop plein qui, le plus souvent, fournit à la chronique judiciaire son plus sérieux élément; nos routes enfin sont journellement sillonnées par des enfants qui, la besace sur le dos, vont mendier de porte en porte le pain qui manque à la maison paternelle. Et voila pourquoi il est aujourd'hui avéré que chaque année, en France, quatre-vingt-quinze mille individus meurent par le fait de la misère.
Justement émus et préoccupés d'un état de choses aussi grave, nos législateurs ont cru trouver un dérivatif puissant dans le développement de l'instruction. Toutes nos villes de province, nos plus humbles communes ont été amplement pourvues de palais scolaires ouvrant largement aux enfants du peuple la carrière de l'enseignement.
Depuis lors, l'Université répand généreusement ses faveurs sous forme de brevets innombrables, si bien, que dès a présent on peut prévoir le moment ou l'on comptera autant de professeurs que d'élèves ! Malheureusement, un brevet seul ne suffit pas à nourrir son propriétaire et sa famille, il faudrait au moins lui adjoindre la place qui donne droit aux émoluments. C'est ce à quoi l'on n'avait pas songé au plus fort d'un emballement méritoire pas songé au plus fol d'un emballement méritoire sans doute, mais qui, hélas jusqu'à présent, n'a eu guère pour résultat que de vider les caisses de l'Etat, ruiner un peu plus les communes et, ce qui est plus déplorable encore, augmenter considérablement le nombre déjà trop grand des déclassés.
Une plaie est d'autant plus incurable lorsqu'elle provient d'un vice originaire du sang ou des organes vitaux ; c'est, hélas ! le cas de notre pauvre humanité. Prétendre à faire disparaître toutes ses imperfections, à sa guérison complète en un mot, serait donc vouloir dépasser la limite des forces humaines; tout au contraire, chercher par des palliatifs a enrayer les progrès du mal et à en atténuer les effets désastreux rentre dans le domaine des choses possibles et, par suite, devient particulièrement ici le devoir des privilégiés de la fortune.
Recueillir les orphelins, les enfants trouvés ou moralement abandonnés ainsi que ceux des familles pauvres; les élever chrétiennement dans l'esprit du devoir et, tout en leur inculquant le goût et la science des travaux de la terre, leur donner l'instruction nécessaire au développement de leur intelligence, tel est dans ses grandes lignes le programme dont l'exécution sur une large échelle en France constituerait à lui seul déjà le plus réel et le plus efficace des remèdes.
Dans un assez grand nombre de départements, grâce à quelques généreuses initiatives secondées d'ailleurs par la charité privée, des Orphelinats agricoles ont été créés qui ont déjà rendu les plus grands services. Malheureusement ce n'est encore là qu'une action isolée, restreinte et par conséquent insuffisante. En effet, nous ne possédons encore que quatre-vingt-onze orphelinats de garçons qui, ensemble, en élèvent au maximum huit mille; or, la statistique établit qu'il y a au bas mot sur le territoire français cent mille garçons orphelins ou abandonnés
Trente-et-un départements n'ont encore aucun établissement de ce genre, la Corrèze est de ce nombre, et pourtant il est peut-être celui de tous où le besoin s'en fait le plus sentir.
A l'exception de la riche contrée de Brive que fécondent la Vézère et un climat exceptionnel, le département de la Corrèze est certainement un des plus pauvres de France. Longtemps dépourvu de movens de communication suffisants, actuellement encore ne possédant qu'une seule voie ferrée dans sa plus grande longueur du Sud-Ouest au Nord-Est, les progrès de la culture moderne y sont, on peut le dire, totalement inconnus, et, dans toute sa région montagneuse, le paysan, avec une ténacité bien excusable en somme, en est encore aux vieux errements et à la routine du siècle dernier. Ainsi s'expliquent en partie les immenses étendues de terrain en friche qui pourraient être utilement reboisées ou même cultivées, alors que de chétifs troupeaux n'y trouvent qu'une nourriture insuffisante. Des terres à peine éffleurées par le plus primitif des araires, envahies par les plantes parasites, et produisant un misérable seigle des prairies épuisées, la plupart marécageuses auxquelles les amendements, les engrais et le drainage ne sont jamais venus en aide, tel est, à l'exception de quelques rares propriétés, l'aspect général et l'état très exact de la culture de ce pays, plus frappé qu'aucun autre par le terrible fléau de l'émigration.
Si dans la Corrèze l'esprit de charité règne autant que partout ailleurs, les moyens de cette charité y sont malheureusement beaucoup plus limités. En premier lieu, les ressources infimes dont dispose l'Assistance publique ne lui permettent de rendre que des services purement illusoires. Il ressort en effet, clairement, d'un rapport établi en 1891 par M. Fonné, alors inspecteur de ce service départemental, qu'un très petit nombre d'orphelins ou abandonnés reçoivent chaque année un secours qui consiste à les placer, moyennant une faible allocation, dans les familles de paysans, naturellement les plus pauvres, qui ne les acceptent uniquement que pour bénéncier de cette rétribution. Par suite, ces enfants, faute d'une surveillance impossible à exercer, ne reçoivent aucune instruction suivie et n'apprennent aucun métier.
En second lieu, la fortune privée, en général, ne dépasse guère la médiocrité ; d'ailleurs, jusqu'à présent, bien peu d'occasions se sont offertes à elle de chercher dans une action commune la force de cohésion indispensable aux entreprises philanthropiques.
Ces causes d'impuissance ou d'inaction pour le bien général vont enfin disparaître, du moins en partie : dès aujourd'hui le département de la Corrèze possède son orphelinat agricole dont la constitution et les détails d'organisation vont être exposés ci-après.
L'œuvre qui vient de se fonder ne saurait être l'œuvre d'un seul et encore moins celle d'une coterie; tous les dévouements, toutes les générosités doivent lui apporter leur concours sans distinction d'opinions, de croyances religieuses ou de situation. La charité, en un mot, offre un vaste terrain sur lequel toutes les mains peuvent et doivent se joindre.
Dans de telles conditions et avec l'aide de Dieu, les difficultés inévitables de la première heure seront aisément vaincues, laissant désormais le champ libre à tout un avenir de succès et de prospérité.
I - LA TERRE DE SEDIÈRES.
Dans le canton de Laroche-Canillac, non loin du village de Clergoux et à 21 kilomètres de Tulle, en suivant la route qui de cette ville conduit à Mauriac, le voyageur aperçoit sur sa gauche, au milieu d'un massif de verdure dont il domine fièrement les hautes futaies, un donjon flanqué de tourelles c'est le château de Sédières, curieux et rare spécimen du style Renaissance italienne.
A cette altitude de 550 mètres, aux ravins profonds, à pentes rapides, à l'aspect sinueux et tourmenté, a déjà succédé une série de collines d'accès facile et dont les ondulations gracieuses se déroulant insensiblement jusqu'aux crêtes qui surplombent les cours mouvementés de la Luzège et de la Dordogne, constituent, en partie, la région des hauts plateaux du département de la Corrèze
En 1861, lorsque le général de Chanal en fit l'acquisition, ta propriété de Sédières, d'une contenance de 350 hectares, présentait un aspect misérable et peu séduisant. A l'exception de quelques hectares de chênes séculaires, de deux ou trois étangs et d'une ou deux prairies naturelles relativement en bon état et groupées autour du château en ruines, on ne voyait que terres mal cultivées, pacages véritables marais et bruyères, le tout ensemble suffisant à peine à l'entretien d'une centaine de bêtes à laine et de quelques vaches étiques de race absolument dégénérée, seuls les moutons de Sèdières avaient dans le canton une réputation plus ou moins méritée. Que dire enfin des bâtiments d'exploitation, si ce n'est que leur état d'abandon et de délabrement n'avait rien à envier à celui du vieux castel. Tout était donc à faire ou à refaire.
Loin de nous la pensée d'attribuer cet état de choses à l'incurie des anciens propriétaires; mais chez les Lhentillac et les Carbonnal de Sédières, comme chez tant d'autres familles, la main gauche avait toujours ignoré les bienfaits de la main droite, aussi toute une existence de charité, de lutte et de privations devait pour eux fatalement aboutir au plus cruél des sacrifices : l'abandon définitif du patrimoine en des mains étrangères! Puisse ce faible hommage rendu à leur mémoire, adoucir les regrets de leurs descendants qui, dans tous les cas, nous ne pouvons en douter, éprouveront une vive satisfaction en apprenant la nouvelle destinée des biens qu'ils ont perdus.
Entre les mains d'un homme aussi bien doué que l'était M. de Chanal, une complète transformation devait nécessairement se produire. Peu à peu le château fut entièrement res-
tauré, tout en lui laissant son style et son caractère; les bâtiments de fermes reçurent les réparations et modifications d'aménagement indispensables : vingt six hectares de pacages ou marais furent convertis en bonnes prairies naturelles venant ainsi s'ajouter à celles déjà existantes dont le système d'irrigation défectueux, avait été entièrement et soigneusement refait à l'aide du niveau; des terres mieux cultivées et amendées virent peu à peu disparaitre les plantes parasites dont elles étaient infestées : par suite le cheptel
d'animaux fut bientôt presque doublé. Enfin 160 hectares de bruyères furent semés ou plantés en bois résineux d'espèces diverses.
En 1882, après une existence laborieuse et utilement remplie, le général de Chanat laissait en mourant une propriété d'environ cinq cents hectares dans un état d'entretien permettant désormais l'application d'un mode de culture plus en rapport avec les progrès de notre époque.
Privés des joies mais aussi à l'abri des soucis que donne une postérité, les héritiers de M. de Chanal eussent sans doute laissé les choses en l'état si, voulant se créer dans la vie un sérieux intérêt, ils n'avaient dès ce moment conçu le projet d'affecter un jour la terre de Sédiéres à la fondation d'un Orphelinat agricole.
L'exécution de ce projet entraînait avec elle non seulement toute une nouvelle installation spéciale et coûteuse, mais encore et surtout l'obligation de s'assurer préalablement que la nature du sol et du climat se prêtait à une notabte augmentation et variété des produits ainsi qu'à l'introduction de certaines industries agricoles, toutes choses indispensables aux besoins de subsistance, de travail et d'activité d'une colonie.
Dix années ont été patiemment employées à cette étude et a cette préparation.
Le métayage a été peu à peu supprimé complètement; les domaines ont été réunis, à l'exception d'un seul qui est encore entre les mains d'un fermier; divers essais de cultures nouvelles furent faits dans des terres froides et acides qui jusqu alors, soumises uniquement au système de jachères, n'avaient jamais produit que du seigle et du sarrazin, et enfin, sur un emplacement des plus favorables à peu près au centre de la propriété, vinrent successivement se grouper tous les bâtiments nécessaires à une grande exploitation.
La surface plane de cet emplacement forme un rectangte d'environ cinq mille mètres superficiels dont la partie médiane est occupée par un petit étang de 30 ares. Les bâtiments du corps de ferme proprement dit sont disposés sur trois côtés de ce rectangle, le quatrième coté formant la chaussée de l'étang sur le prolongement de ce coté, vers l'ouest, a été conservée une ancienne construction servant d'habitation au personnel de la ferme et à la basse-cour.
Une première étable de 27 mètres de longueur sur 11 métres de largeur fut construite en 1883 et contient vingt-huit bêtes cornes placées tête-à-tête sur deux rangs séparés par un couloir à pâture de 1 mètre 70 de large; sur ce couloir des mangeoires spacieuses en briques cimentées et divisées en autant de compartiments qu'il y a d'animaux. Un système de râteliers à forts barreaux de chêne laisse le passage strictement nécessaire à la tête de l'animal qui ne peut ainsi empiéter sur la nourriture de son voisin. Le pavage des stalles est en pierre à 20 centimètres en contrebas d'un trottoir qui règne tout autour pour le service et l'enlèvement des fumiers, cinq grandes portes cintrées donnent accès dans l'étable et dix fenêtres, également cintrées à châssis de fer mobiles, permettent de graduer l'aération suivant les besoins. Tous les bois de la travée, des plafonds et des râteliers sont enduits au gaudron de résine. Au-dessus de l'écurie s étend un vaste grenier à fourrages clos sur toutes ses faces par un système de jalousies permettant la circulation de l'air. Les voitures pénètrent toutes chargées dans cette grange par deux grandes portes situées à l'arrière du bâtiment, lequel de ce côté forme rez-de-chaussée. Enfin, la toiture à formes Delorme, en fort bois de chêne, est couverte en tuiles de zinc galvanisé, système Duprat, est d'une solidité telle que depuis dix ans elle n'a encore eu a
subir la moindre réparation, sa légèreté est extrême. En 1885, un hangar fermé, de 20 mètres de long sur 6 mètres de large, fut construit sur le prolongement nord de l'écurie
Il est muni à l'intérieur d'une chaudière pour la cuisson des aliments, de quatre cuves à fermentation, d'un laveur, d'un coupe-racines et d'un hache-paille; l'eau y est amenée par des tuyaux de plomb adaptés à un réservoir extérieur surélevé et alimenté par une pompe.
Ainsi aménagé, ce hangar constitue un excellent laboratoire pour l'engraissement des animaux de boucherie.
En 1886, l'amélioration et l'augmentation des fourrages permettant d'élever et d'entretenir un plus grand nombre d'animaux, une seconde écurie fut construite de l'autre côté du petit étang et parallèlement à celle qui vient d'être décrite. Du même modèle, mais ayant 32 mètres de longueur sur 12 mètres de largeur, cette étable, spécialement affectée à la reproduction et à l'élevage, contient 32 larges stalles et 4 box pouvant contenir chacun huit veaux, un plus grand soin encore, s'il est possible, a été apporté dans tous les détails d'aménagément et d'exécution : quatre grandes portes à deux battants y donnent accès, quatorze fenêtres à châssis mobiles en fer et quatre cheminées d'appel partant d'un plafond en briques placent les animaux et les fourrages dans d'excellentes conditions de salubrité et de conservation. Tous les bois de charpente et de travée sont en chêne de forte épaisseur et sont enduits au goudron de résine. Les animaux y sont également placés sur deux rangs tête-à-tête et séparés par un targe coutoir. A l'arrière du bâtiment qui forme rez-de-chaussée une porte de 4 mètres de largeur et de 8 mètres de hauteur permet aux plus grandes voitures de fourrage de pénétrer dans la vaste grange qui occupe le dessus de l'écurie dans toute son étendue.
Enfin, en 1887, une porcherie, une grange batteuse et son manège et une forge, reliées entre elles par deux hangars à voitures, formant ainsi un seul bâtiment de 50 métres de longueur, vinrent compléter, sur le coté nord du rectangle, ce bel établissement qui renferme actuellement 8 bœufs de grande taille, 6 taureaux, 46 vaches et leurs produits, chariots, tombereaux, une charrue défonceuse, une Brabant bi-socs, une arrache pommes de terre, 8 arraires, 5 charrues bordelaises en fer, 2 tonneaux a purin, une faucheuse
Wood, 3 herses et émousseuses. une pompe a incendie Pilter, etc., etc. Il y a lieu, enfin, d'ajouter à cette nomenclature les 15 bêtes à cornes, les 100 bêtes à laine et le matériel de la ferme d'Artiges ainsi que le moulin à farine du Prévost.
En même temps que s'élevaient les divers bâtiments de l'exploitation, des essais de cultures nouvelles se faisaient chaque année et démontraient qu'avec l'aide de la chaux, des
phosphates, des scories du Creuzot, du sulfate de fer et du sang desséché, l'on devait obtenir des résultats merveilleux.
C'est ainsi que plusieurs hectares de prairies temporaires furent créées qui donnèrent une telle quantité d'excellent fourrage qu'on n'a pu encore se résigner à les remettre en culture, bien qu'elles aient aujourd'hui sept et huit ans d'existence. Le trèfle, auquel on ne croyait pas, réussit, admirablement et donne annuellement trois coupes, même sans le secours du plâtre. Grâce a l'épandage de 35 hectolitres de chaux par hectare, les avoines, pour ainsi dire inconnues dans la région, font partie aujourd'hui d'un assolement régulier, alternant avec le seigle, la pomme de terre et le trèfle; en ce moment, sept hectares d'avoine prolifique de Californie et d'avoine jaune géante à grappes font l'admiration de tous et peuvent lutter avec celles de la Brie et du Lot. La pomme de terre qui, jusqu'alors cuitivée à la bêche à rangs serres, ne donnait que des résultats navrants, quand la maladie te plus souvent ne les rendaient pas absolument nuls, est aujourd'hui cultivée à Sèdières à la charrue et donne, même dans de simples défrichements. une recolte vraiment prodigieuse en qualité comme en quantité; leurs fanes vigoureuses et touffues attaeignent une hauteur de 70 à 90 centimètres et un grand nombre de pieds
fournissent jusqu'à une quarte de tubercules dont certains pèsent 1kg700g.
La Merveille d'Amérique, le chardon et la Richeter Impérator sont les espèces définitivement adoptées pour la grande culture tant à cause de leur énorme rendement que pour leur qualité de parfaite conservation; l'Earley rose, également aussi bien acclimatée est réservée pour la table. Enfin, les rutabagas pesant de 7 à 9 kgs, le choux fourrage du Poitou, le Maïs géant, la grande Consonde du Caucase, le Topinambour et la fèverolle sont autant de cultures dont la parfaite réussite est désormais certaine à Sédières.
Sauf de bien rares exceptions, le propriétaire qui ne cultive pas lui-meême ses terres ne peut dépasser en agriculture un certain degré de développement et de production. Pour les plus riches, la propriété foncière est un luxe des plus coûteux pour un grand nombre; elle est une cause de gène et souvent même de ruine, surtout pour celui qui cède à l'entrainemcnt d'un goût naturel, les plus sages joignent, comme on dit vulgairement, les deux bouts, ce sont les plus heureux ! C'est, qu'en effet, la première condition de travail et de développement, c'est-à-dire la main-d'œuvre, leur fait de plus en plus défaut. Tel n'est plus le cas d'une Institution agricole qui, toujours abondamment pourvue de ce côté, trouve encore dans le renouvellemcnt continu et incessant de ses bras, la raison de ses efforts, de sa persévérance et par là même les éléments d'une réussite assurée.
Il suffit pour s'en convaincre, de visiter quelques étabtissements de ce genre, non ceux créés par l'Etat ou de riches propriétaires et dont la prospérité est par cela même toute expliquée mais simplement quelques orphelinats agricoles dus à la charité publique et placés entre les mains de certaines corporations religieuses, plus spécialement adonnées aux travaux de la terre.
Ceux-là pour la plupart ont commencé avec des ressources dérisoires, quelques arpents de terres incultes, une masure pour habitation et tout un matériel à se procurer.
Dans la Côte-d'Or, par exemple,l'Orphelinat de Dômois a été fondé en 1880 par l'abbé Chanion, qui avait pour tout capital 29 francs, qui constituaient ses économies sur son modeste traitement de vicaire.
Il s'adjoignit deux jeunes gens dévoués comme lui et recueillit de suite hardiment une vingtaine d'orphelins pensionnaires. La Providence justifia bientôt sa confiance et ses efforts en lui envoyant des donateurs. Aujourd'hui Dômois possède 150 hectares de terres, de beaux bâtiments d'habitation et d'exploitation et unechapelle. 150 enfants y sont entretenus et dirigés par un nombreux personnel et le cheptel se compose de 12 chevaux, 40 bêtes à cornes et 200 moutons !
En Saône-et-Loire, l'orphelinat de Mèflier a été fondé en 1854 par l'abbé Béraud et quatre dames charitables et, dès ses débuts, il se trouva débiteur de 120,000 francs. Le domaine était couvert de genêts et de bruyères. Après trente ans d'efforts et de sacrifices, l'établissement est actuellement un des plus florissants de France et renferme soixante-cinq orphelins.
En Maine-et-Loire, l'abbé Mondain, curé de la Breille, a fondé son orphelinat sans autre appui ni ressources que sa volonté et son dévouement. Après, il est vrai, 14 ans de lutte
acharnée contre la persécution de ses adversaires et l'indifférence à peu près générale, il a pu enfin quitter le modeste presbytère qui avait été le berceau de son œuvre et installer un superbe établissement, véritable école d'horticulture occupée par des orphelins nombreux, et rendant aujourd'hui de tels services que l'Etat lui-même les reconnaît par une forte subvention.
En 1872. une demoiselle Rouquié laissait au bureau de bienfaisance de Cahors sa propriété d'Arnis d'environ 70 hectares, à la charge d'y établir un asile pour les orphelins ou enfants pauvres de la région. Les premiers directeurs, mal secondés par des mercenaires, ne purent. malgré leurs plus louables efforts, mener l'oeuvre à bien et comprirent sans tarder qu'une œuvre de ce genre devait être confiée à une congrégation religieuse; c'est alors qu'en octobre 1880 les frères de Saint-Gabriel furent appelés à en prendre la direction.
Le terrain d'Arnis, comme celui de la plupart des côteaux du Lot, est surtout propre à la culture de la vigne; mais à ce moment le phylloxéra avait entièrement détruit le vignoble
qui en occupait la majeure partie et peu à peu la propriété tout entière avait été abandonnée à la pâture des troupeaux.
Treize années à peine ont suffi aux frères de Saint-Gabriel pour opérer une véritable transformation. Sous l'habile et active direction de leur directeur, le frère Vincent-de-Paul; le vignoble a été complètement reconstitué et produit aujourd hui une quantité considérable d'excellent vin qui, jointe à la production du plant raciné et à la création de diverses industries, ont bientôt permis de doubler le logement primitif et de construire une chapelle. Enfin, le nombre des enfants qui en 188O n'était que de huit dépasse en ce moment la trentaine. Si de tels prodiges ont été accomplis pour ainsi dire dans le dénuement le plus complet, par un simple effort de persévérence et de volonté, que n'est-on pas en droit d'attendre d'une œuvre qui se trouvera, dès ses débuts, abondamment pourvue de tout le nécessaire ?
Entre les mains dévouées des religieux de l'ordre de Saint-Gabriel et sous l'habile direction du frère Vincent-de-Paul dont il vient d'être parlé ci-dessus et qui veulent bien apporter leur précieuse coopération, le personnel et un assez grand nombre d'enfants trouveront tout d'abord dans les produits actuels de la propriété les ressources suffisantes à leur vie matèrielle mais, peu à peu. au moyen des terreaux accumulés depuis des siècles sous bois et des éléments considérables de litières qui s'y trouvent chaque année sans avoir jamais pu être encore utilisés, la mise en culture réglée de grandes étendues de terrain encore en friche, la création de pépinières d'arbres verts et même du plant de vigne, offriront à l'activité d'une colonie bien dirigée un champ de travail suffisamment vaste pour lui assurer à bref délai une situation des plus florissantes. En effet, la pomme de terre et le topinambour, cultivés en grand, permettront l'établissement d'une distillerie ou d'une féculerie agricole dont les produits commerciaux couvriront largement les frais d'installation et dont les résidus serviront à l'engraissement des animaux de boucherie; l'énorme quantité de glands et de faines de hêtre qui se perd chaque année, jointe aux eaux grasses et aux détritus provenant des cuisines de l'établissement, assureront l'élevage et l'engraissement d'une centaine de porcs au minimum.
Enfin, l'agriculture elle-même, savamment exploitée ainsi que l'extension considérable de l'industrie maraîchère, si facile dans la Corrèze, et particulièrement dans les terrains légers de Sédières, produiront des ressources à bref délai qui permettront a l'Institution de recueillir un grand nombre d'enfants et de les élever et instruire gratuitement, objectif principal des fondateurs.
Toutes ces prévisions, après dix années de travaux et d'expériences, étant devenues autant de certitudes, les propriétaires de Sédiéres ont enfin fait construire en 1892 un vaste édifice pouvant dès à présent contenir, outre le personnel dirigeant, une centaine d'enfants. Mais, en réalité, les plans de ce bâtiment ont été établis en vue d'atteindre un jour le chiffre de deux cents élèves.
Il présente une étendue de 43 mètres de longueur en façade et se compose d'un corps de logis de 23 m sur 8 m et de deux pavillons de 10 mètres sur 12 : l'un de ces pavillons est destiné au logement du Frère directeur, aux bureaux, lavabos et diverses chambres. Dans les combles sont des magasins; l'autre renferme les cuisines, laveries, dépenses soute à charbons, lampisterie, etc.; au premier se trouve un vaste appartement pour l'aumônier, et enfin les étages supérieurs doivent contenir les infirmeries et la chapelle provisoire.
Le bâtiment central est entièrement consacré aux enfants le rez-de-chaussée contient un vaste réfectoire dont une partie sera provisoirement appropriée pour les salles d'étude, et les deux étages renferment des dortoirs suffisants pour cent enfants. Telles sont les conditions d'existence et les éléments de travail qui sont mis dès aujourd hui à la disposition de la future colonie. (plans p25 et 26)
II FONDATION DE L'ORPHELINAT DE SEDIÈRES
A dater de ce jour, les propriétaires de Sedières créent, en faveur du département de la Corrèze, un Orphelinat qui prend le sous-titre "d'Institut Normal d'Ouvriers Agricoles"; ils abandonnent à cet établissement de bienfaisance les produits de leur proprièté, et ils mettent à sa disposition tous les locaux, cheptels d'animaux et matériel d'exploitation déjà mentionnés et dont un inventaire notarié sera dressé avant l'inauguration. En faisant cet abandon considérable, eu égard au chiffre modeste de leur fortune, ils veulent témoigner ainsi de leur ardent désir de se rendre utite à leur département d'adoption, en le dotant durant leur vie et après leur mort, d'une institution, qui, entre toutes, leur semble des plus démocratiques, comme elle leur parait aussi la mieux appropriée aux besoins de notre époque.
Mais, en même temps, ils ne sauraient prétendre, à eux seuls, suffire à toutes les exigences d'une aussi grande entreprise.
En effet, s'ils ont acquis la certitude que les produits de la terre de Sédières pouvait nourrir un grand nombre d'ouvriers ou d'enfants, ils se rendent compte que ces ressources
seraient insuffisantes dans les débuts pour couvrir tous les frais de traitement et d'entretien d'un personnel dirigeant, nécessairement nombreux.
Il leur fallait donc rechercher ce complément de ressources, afin d'assurer à l'oeuvre la possibilité d'une rapide extension, sans laquelle elle ne saurait avoir d'utilité sérieuse. La solution ne s'est pas fait attendre et avant même d'avoir ouvert les portes de l'Orphelinat aux enfants que l'on veut instruire et élever gratuitement, on peut déjà compter sur des ressources modestes, il est vrai. mais que l'avenir parait devoir augmenter. Des amis, des personnes même étrangères à leurs relations intimes, des hommes de bien, enfin, que la nouvelle d'une fondation aussi intéressante avait trouvé dans les meilleures dispositions, se sont empressés d'apporter aux fondateurs leur appui moral et matériel. Si bien que leurs promesses de cotisation annuelle pour une période de six années permettent d'assurer, des à présent le traitement, du personnel très restreint, il est vrai, mais cependant suffisant pour les débuts.
D'autre part, des bienfaiteurs nombreux demandent à confier à l'orphelinat des enfants qui les intèressent et à en payer l'entretien.
Enfin, il faut ajouter à ces premiers élements quelques dons généreux qui ont permis d'acheter en draps, linge, literie et ustensiles de ménage, le nécessaire pour 30 enfants.
On est donc, dès maintenant, assuré de recueillir et d'élever gratuitement quelques entants en sus du nombre de ceux que la terre de Sédiéres peut nourrir.Quelques importants et encourageant soient ces premiers résultats, ils seront cependant insuffisants, si l'on considère l'étendue des besoins à satisfaire, de telle sorte qu'il reste encore à la charité privée un vaste champ à cultiver.
Il fallait donc déterminer les formes diverses dans lesquelles seront groupés les efforts communs.
Il s'en est suivi une organisation copiée à peu prés sur les œuvres similaires et que l'on doit dès à présent indiquer aux personnes de bonne volonté qui désireront apporter teur précieuse collaboration.
Les bases de cette organisation sont les suivantes :
I Les fondateurs, II les donateurs, III les bienfaiteurs de l'enfance, IV les souscripteurs.
-Les Fondateurs sont ceux qui s'engagent à verser, annuellement et au minimum, la somme de 50 francs pendant une première période de six années; le produit de ces cotisations est plus spécialement affecté à l'entretien et au traitement du personnel dirigeant et enseignant. Ce sont enfin ces fondateurs qui nomment le Comité de Surveillance administrative de l'Orphelinat.
-Les Donateurs sont les personnes qui, appartenant ou non au département de la Corrèze, offriront à l'œuvre une somme d'au moins 300 francs, en espèces ou en nature, une fois donnée. L'ensemble de ces dons est destiné à former un capital d'avenir, soit une caisse de réserve subvenant aux frais généraux ou imprévus de l'Orphelinat.
-Les Bienfaiteurs de l'enfance sont ceux qui s'intéressant tout particulièrement à un enfant pauvre, désirent le faire élever à l'Orphelinat et en paieront l'entretien annuel.
-Les Souscripteurs ordinaires et annuels sont toutes personnes charitabtes qui veulent bien verser leur obole, si modeste qu'elle soit, dans l'intention de concourir à l'entretien d'un plus grand nombre d'enfants.
Il existe, enfin une Société de patronage des orphelins agricoles dont te siège est à Paris et qui a pour but de favoriser le développement de ces établissements destinés à receuillir à la campagne des orphelins pauvres afin d'en faire de bons chrétiens et d'utiles ouvriers des champs.
L'Orphelinat de Sédières est donc, à l'avance, assuré de trouver aide et protection de la part de cette bienfaisante et admirable institution.
Les noms des Fondateurs et Donateurs seront inscrits sur des tableaux d'honneur placés dans une des grandes salles de l'établissement et un bulletin trimestriel publiera, en outre, leur liste ainsi que celle de toutes les personnes qui apporteront leur concours à l'oeuvre, sous une forme quelconque. Cette organisation n'est, bien entendu, que provisoire; il existe en effet déjà un projet de création d'une société civile destinée à la compléter et à la remplacer, probablement avant l'expiration de la période des six premières années d'expérience. Et cela afin d'assurer à l'avenir et à la perpétuité de la fondation des garanties plus sérieuses encore et définitives.
III COMITÉ DE SURVEILLANCE ADMINISTRATIVE.
Ce comité est nommé par les fondateurs et comprend un Président, deux Vice-Présidents, un Secrétaire, un Trésorier et six Membres dont, de droit, le Frère directeur de l'établissement.
Le Comité a la haute main sur toutes les affaires intéressant la colonie, ainsi que la gestion de tous les fonds lui appartenant, c'est-à-dire ceux provenant des cotisations ou parts de fondateurs, des donations, des souscriptions et de la vente des produits de l'exploitation.
Le Comité se réunit au moins une fois chaque trimestre pour arrêter les comptes présentés par le Directeur de l'Orphelinat; il vérifie l'état du matériel d'exploitation et d'intérieur; literie, lingerie, magasins, cuisines, étables, forge, etc., etc; il s'assure, en un mot, du bon état d'entretien de toutes choses. Tous besoins ou projets d'achats de matériel, d'animaux et d'engrais, tout projet de constructions nouvelles doivent lui être soumis et ne peuvent être exécutés sans son autorisation donnée sous forme d'un bon à livrer revêtu de la signature du Président ou Vice-Président, du Trésorier et de deux Membres du Comité.
C'est le Comité qui décide de l'admission et de la sortie des enfants; il s'occupe, de concert avec le Directeur, de leur placement chez les particuliers, établit et signe les brevets
d'aptitude et certificats de bonne conduite; c'est lui, aussi, qui prononce sur les cas d'expulsion.
Toutefois, lorsque des circonstances graves l'exigent, le Directeur peut procéder de sa propre autorité à ces renvois, mais doit en aviser dans les quarante-huit heures le Président du Comité avec les motifs à appui.
Chaque aunée au mois de décembre, le Comité établit un rapport détaillté donnant la situation exacte de la colonie. Ce rappor est inséré dans le Bulletin du 1er janvier suivant.
IV PERSONNEL DE DIRECTION, D'ENSEIGNEMENT, DE SURVEILLANCE ET DU SERVICE D'EXPLOITATION.
La direction de l'Orphelinat, l'enseignement, la surveillance et la conduite des travaux sont confiés à l'Ordre des Frères de Saint-Gabriel, dont la maison-mère est établie à Saint-Laurent- sur-Sèvre, en Vendée.
Cet ordre religieux ne peut actuettement disposer que d'un très petit nombre de ses membres, mais cependant suffisant aux exigences du service de l'Orphelinat pendant les premières années.
Le personnel sera, par suite, ainsi composé, au début : un Frère directeur ( le cher Frère Vincent-de-Paul actuellement encore directeur de l'orphelinat agricole d'Armis du
Lot).
Un Frère instituteur breveté. (un ou deux autres Frères surveillants et conducteurs des travaux).
Jusqu'à ce que les premiers enfants recueillis aient atteint l'âge et le degré de force voulus pour prendre part utilement aux travaux de tl'exploitation, le personnel de service nécessaire sera complété soit au moyen de jeunes gens de 14 ou 16 ans confiés par d'autres orphelinats, soit par des journaliers ou domestiques laïques.
Enfin, un prêtre-aumonier désigné par Mr l'Eveque de Tulle sera chargé spécialement des services religieux de l'ètablissement.
V RÈGLEMENTS PRINCIPAUX.
Le cadre nécessairement restreint de cette brochure ne permet pas de présenter dès aujourd'hui au complet et dans tous leurs détails les nombreux règlements que comporte une institution aussi importante que celle dont il s'agit. Certains de ces règlements d'ailleurs ne pourront être définitivement arrètés que par les soins du Comité de surveillance administrative et du Directeur de l'établissement. Il est néanmoins indispensable d'exposer dès maintenant ceux de ces règlements qui, concernant spécialement les principaux rouages de l'œuvre, confirment en quelque sorte l'esprit purement philanthropique dans lequel cette œuvre a été conçue.
Recrutement et condition d'admission des enfants. -L'établissement agricole de Sédières est en principe entièrement consacré à l'éducation des orphelins de père ou de mère, des enfants trouvés ou moralement abandonnés, de ceux enfin de familles pauvres, tous appartenant, autant que possible et de préférence, au département de la Corrèze.
La volonté formelle des fondateurs est d'arriver le plus tôt possible à rendre entièrement gratuits l'entretien, la nourriture et l'instruction des enfants, mais on comprendra sans peine qu'un système de libéralité aussi large ne pourra être adopté qu'à partir du jour où la colonie aura obtenu par son travail un degré de prospérité qui lui permette de se suffire à elle- mème.
En conséquence et jusqu'à nouvel ordre, un tiers seulement de la totalité des enfants recueillis sera entretenu et instruit gratuitement, les deux autres tiers seront admis moyennant une pension annuelle de deux cents francs. Toutefois, en vue de venir en aide à l'Assistance publique départementale dont les charges sont extrêmement lourdes, il ne sera exigé pour les enfants qu'elle voudrait confier à l'Orphetinat que l'allocation annuelle qu'elle accorde à ceux qu'elle place à la campagne chez les cultivateurs.
Les enfants sont admis a partir de l'âge de sept ans jusqu'à celui de onze ans inclusivement. Leur pension est exigée chaque année jusqu'à ce qu'ils aient l'âge de quatorze ans :
à partir de ce moment, ils sont élevés et entretenus gratuitement et reçoivent une paye annuelle proportionnée aux services qu'ils rendent à la communauté. Ce salaire sert à constituer pour chacun d'eux un livret de caisse d'épargne, lequel cependant ne leur sera remis à leur sortie qu'autant qu'ils seront restés à l'établissement jusqu'à l'âge de 18 ans, leur trousseau est alors completé.
Les enfants peuvent être gardés jusqu'à l'epoque où ils sont appelés à faire leur service mititaire.
Au moment de leur sortie, ils subissent un examen professionnel et, selon leurs aptitudes, ils reçoivent un diplôme de chef de culture. de premier valet de ferme ou de jardinier. Le Comité de survellance et le Directeur les placent alors en ces quatités chez les propriétaires ou cultivateurs et les suivent dans la vie aussi longtemps que possible, remplaçant ainsi leur tuteur naturel.
En outre de l'instruction primaire donnée aux enfants par l'instituteur breveté de l'Orphelinat, il sera fait un cours d'agriculture théorique et pratique pour ceux qui commenceront à prendre part aux travaux des champs.
Toutes les demandes d'admission devront être adressées au Comité de surveillauce administrative qui, avant d'y souscrire, devra s'assurer que le sujet remplit les conditions d'âge, de situation et de moratité requises. L'institution agricole de Sédiéres est en effet une maison paternelle d'éducation et d'instruction et ne saurait être ni pouvoir devenir jamais une colonie pénitentiaire !
VI LISTE ALPHABÉTIQUE DES FONDATEURS (et part)
Monseigneur Denéchau, évêque de Tulle.
A
Albier proprietaire, quai Balluze à Tulle : 1
B
De Bargues, château de Saint-Victour par Neuvic : 1
Bon de Bélinay château de Marèges, par Neuvic : 1
Bon de Blomac, château de la Grainerie, par Salon-la Tour : 2
Brisset, notaire à Tulle : 1
De Braquilanges (Charles), château du Bech par Corrèze : 1
C
A. du Champ, château du Verdier, par Sainte-Fortunade. 1
Mademoiselle de Chanal, château de Sédières par Laroche-Canillac, et Paris : 2
Cte de Combarel, château du Gibanel, par Argentat : 1
Condeau, ancien régisseur du général de Chanat, à Chelles (Seine-et-Marne) : 1
D
Delafont, banquier Egtetons : 1 (trésorier)
Desjobert, quai de Vallon, Tulle. 2 (secrétaire)
Général Duval, placeMunicipale.Tulle : 1
E
S. d'Eyparsac, château du Puy-Grélier par Uzerche : 1
F
Fronty propriétaire manufacturier à Donzonac : 1
G
L. Gay, rentier, place Municipale, à Tuffe : 1
Guillot, ancien entrepreneur, à Naves : 2
H
I
J
Jondot (Albert), château de Puy-Mas, par Tulle : 1
Bon de Jouvenel, Castel-Novel, Varetz : 2
K
L
Cte de Lavaur de Sainte-Fortunade, château de Sainte-Fortunade : 1
De Lespinasse de Pebeyre, château de Pebeyre, La- Roche Canillac : 1
Mis de Lévis, vice-président de la Société des Orphelinats agricoles - propriétaire Château de Ventadour et Paris : 1
M
Bon de Meynard, château de la Sudrie, par Tulle : 2
Mis de Montaignac, manoir de Montaignac, par Egletons : 2
Cte de Montcabrier, Toulouse : 1
Vte H. de Montcabrier, Toulouse : 2
Cte de Montcabrier (Henry), capitaine au 9ème hussard, Marseille : 2
De Montcabrier (Paul), Marseille : 1
De Montcabrier (Jeanne), Marseille : 1
Vte de Montcabrier (Xavier), lieutenant an 13ème chasseurs. Bèziers : 2
O Madame d'Omézon, Toulouse : 1
P Q R S
Madame de Saint-Maur, née baronne de Nyvenheim, château de Varagnes, Tarn : 1
Cte de Salvandy, château du Teinchurier, par Brive : 1
Cte de Seilhac Le Mons de Vitrac : 1
T
Martial Talin. ancien avoué, Tulle : 1
Louis Talin, avocat, maire de Corrèze : 1
Paul Toinet quai Baluze, à Tulle : 2
U
V
Ch. Valette, notaire honoraire a Chamboulive : 1
Cte de Valon, château de Saint Priest, par Tulle : 2
R. de Vaublanc, château de Couzan, par Saignes (Cantal) : 1
M. de Vaublauc, château de Maumont, par Egletons : 1
WXYZ
LISTE DES DONATEURS (le montant exprimé en franc or est à calculer sur la base du prix côté de la pièce de 20f soit 205€, soit 1Fr = 10.5€)
M. & Mme Valette Chamboulive : 1000 - M. & Mme Desjobert : Château de la Morguie Tulle (illisible) - M. & Mme Emmanuel Crauffon directeur le Corrèzien(illisible) - anonyme Paris 600 - M. Tuckermann, Newport EUA : 1000 - M. & Mme Curtis, Boston EUA : 500
LISTE DES SOUSCRIPTEURS
Mlle de Froidefont des Farges, Paris. 50 - Mlle de Chanal, Sedières : 5 - Anonymes......... 175
CONCLUSION
En terminant cet exposé dont le lecteur voudra bien excuser les nombreuses lacunes et imperfections, nous exprimons ici notre profonde reconnaissance à tous les amis et à toutes toutes les personnes qui, de loin comme de près, sans attendre d'être mieux informées de nos intentions, nous ont apporté spontanément et généreusement leur précieux concours. Privés de leur appui nos efforts eussent sans doute été stériles; tandis que, soutenus par de tels dévouements, nous pouvons des maintenant envisager l'avenir de notre entreprise avec la plus entière confiance.
Commencée sous de tels auspices, l'œuvre pour les orphelins et les déshérités de ta Corrèze verra certainement bientôt se grouper autour d'elle de plus nombreuses sympathies
encore, car elle est tout à la fois une œuvre de charité et de patriotisme, deux sentiments que nous sommes certains à l'avance de toujours trouver en éveil dans le cœur de tous nos concitoyens !
Sédières, 10 septembre 1892.
BARON Alphonse de NEUKIRCHEN DE NYVENHEIM, Chef d'escadron de cavalerie retraité, & BARONNE Béatrice de CHANAL de NEUKIRCHEN DE NYVENHEIM
ORPHELINAT AGRICOLE DE SEDIERES
Compte rendu annuel
Assemblée générale du 20 Mars 1894
Monsieur,
Conformément à la lettre de convocation qui vous a été adressée, la réunion générale des membres fondateurs, donateurs et souscripteurs de l'Orphelinat agricole de Sédières a eu lieu au château de Sédières le 20 mars 1894. Mgr Denêchau, évêque de Tulle, et un grand nombre de nos amis avaient répondu à l'appel. Malheureusement, beaucoup n'avaient pu venir, et toutes leurs lettres exprimaient leurs regrets de ne pouvoir assister à ]a réunion, et demandaient qu'on les tint au courant de l'Oeuvre, de son existence et de ses progrès. Dans le but de satisfaire à cette demande, le Conseil de surveillance de lOrphelinat a décidé que chaque année un compte rendu de l'Assemblée générale serait adressé à tous les fondateurs, donateurs et souscripteurs.
- La journée a commencé par un souvenir pieux et une invocation à Dieu, en faveur des membres de l'Association décédés. Une messe (le Requiem a été dit par M. l'aumônier dans la chapelle de l'Orphelinat). Mgr lEvéque de Tulle qui assistait à la messe en habit de choeur a donné l'absoute. La fondation de l'Orphelinat ne remonte qu'à un an, et pourtant dèjà trois fois des vides se sont produits sur la liste de ses fondateurs.
La première, Mlle de Chanal nous a quittés. Nous tous qui, le jour de l'inauguration, l'avions vue si aimable et si gaie, et semblant jouir d'une santé excellente, nous ne pouvions croire que peu de jours après son départ de Sédières, elle s'était éteinte entre les bras de Mlle la baronne de Nyvenheim, sa nièce. M" de Chanal avait pour Sédières et ses enfants d'adoption la plus vive affection. Après avoir contribué par ses conseils à établir le plan de l'Orphelinat, elle songea à habiller les orphelins, et consacra son temps à travailler elle-même pour eux.
Mme Guillot était dévouée à toutes les bonnes oeuvres. Les habitants de la commune de Naves où elle avait sa résidence de prédilection conserveront longtemps le souvenir de sa bonté et de sa charité. Elle s'intéressa à l'Oeuvre de Sédiéres avant la pose de la première pierre; et l'un de ses plus vifs regrets fut d'être retenue chez elle pour cause de santé le jour de l'inauguration de cet Orphelinat dont elle avait vu la naissance et les progrès avec tant de sympathie.
M. le comte de Seilhac était un des plus proches voisins de Sêdières; par de fréquentes visites il avait témoigné à l'Oeuvre l'intérêt qu'il voulait bien lui porter.
Après la messe, sous la direction de la Soeur Cécile, supérieure des religieuses Franciscaines, a lieu la visite des différents services de l'Orphelinat. Nous admirons l'ordre et la propreté du dortoir, de la lingerie, et surtout nous félicitons tous la vénérable Soeur de la bonne hygiène de son établissement. En effet, quand nous entrons à l'infirmerie, nous constatons tous à notre grand étonnement que, depuis quinze mois que l'Orphelinat est habité, pas un lit n'a étè occupé. Evidernment l'air de Sédières est pur, les soins qui sont donnés journellement aux enfants sont intelligents et assidus; mais aussi toutes les précautions nécessaires sont prises pour éviter toutes causes de maladie. En 1892, la Corrèze a été visitée par une violente épidémie de variole, la mortalité a été grande, et pourtant à l'Ophelinat et au château de Sédières, pas un cas de variole ne s'est produit. Cela vient de ce que nos vaillants médecins portent à l'OEuvre le plus grand dévouement, et lue par trois fois à chaque recrudescence de l'épidémie, malgré la fatigue, malgré la perte de temps que cela leur occasionnait, ils sont venus spontanément vacciner les enfants. En passant, nous examinons les travaux entrepris pour la future chapelle. Actuellement, le service religieux est célébré dans le deuxième dortoir; mais le nombre des enfants devant augmenter chaque année, ce dortoir va devenir indispensable. Cette chapelle, située dans une vaste salle au-dessus de l'appartement de M. l'aumônier, sera des plus coquettes; les peintures déjà faites en partie, les vitraux, et l'autel garni de vieilles sculptures sur bois, font présager de la perfection et du goût merveilleux qu'aura l'ensemble quand il sera terminé. Cette chapelle servira plus tard d'oratoire privé pour les religieuses, quand l'Orphelinat ayant pris son extension définitive une chapelle d'un beau style aura été construite sur le coteau qui se trouve derrière l'établissement. Un don de 1,000 francs est déjà promis pour la future chapelle. (5000E)
En entrant en classe, nous sommes reçus par M. Dillanges, instituteur breveté, officier d'Académie, que le Conseil de surveillance de l'Orphelinat, d'accord avec M" la Supérieure, a choisi pour diriger les études. La présence d'un instituteur laïqué est éxigée par les lois scolaires. M. Dillanges a exercé les fonctions d'instituteur pendant trente-cinq ans dans le département de la Corrèze. Les nombreux témoignages de satisfaction que pendant ce temps il n'a cessé de recevoir de ses chefs, les bonnes relations d'amitié qu'il entretient avec le plus grand nombre de ses anciens élèves, l'ont fait choisir, entre beaucoup de candidats, pour enseigner à l'Orphelinat. Nous sommes persuadés qu'avec cet instituteur, sous la haute direction de la Soeur Cécile, l'institut agricole de Sédières pourra lutter avec succès avec les établissements du même genre. En attendant les succès, nous sommes heureux de féliciter ceux d'entre les enfants qui nous sont signalés comme les plus laborieux, et de constater la bonne tenue des livres et des cahiers de tous.
A la cuisine, nous pénétrons dans le domaine de la Soeur Angèle. Il est onze heures, les enfants doivent prendre leur principal repas de midi. Aussi les marmites sont-elles rangées en plein travail sur le fourneau. Les couvercles sont soulevés par nous, il s'en dégage une bonne odeur de soupe aux choux. Vraiment, si nous n'étions pas gourmets, si nous ne savions pas qu'un savoureux déjeuner nous attend au château, nous serions bien tentés de nous asseoir â côté des enfants et de partager avec eux ce repas qui exhale un si alléchant parfum. La nourriture habituelle de l'Orphelinat est saine et abondante, mais elle est celle des paysans limousins, celle que les enfants recevaient chez leurs parents, et qu'ils retrouveront encore à leur sortie. Leur donner un autre régime serait leur rendre un mauvais service. A l'âge où l'enfant l'enfant grandit et commence à travailler, il a besoin d'une nourriture abondante, mais cela à Sédières ne fait pas défaut, ainsi qu'en témoignent la bonne mine et la gaieté de tous, et aussi les nombreux morceaux de pain qui sont laissés sur les tables après chaque repas..
Nous traversons les étables. Maigre la mauvaise année que nous avons eue à subir, les quatre-vingts bêtes à cornes qui forment le troupeau sont en très bon état. Il parait que deux wagons de tourteaux adressés par un bienfaiteur anonyme, dont le nom soupçonné court de bouche en bouche, ont amélioré de beaucoup l'ordinaire des animaux, et n'ont pas peu contribué à entretenir l'état de santé que nous constatons. Les étables sont tenues avec une extrême propreté, la litière de paille qui fait défaut partout cette année a été remplacée par des feuilles, de la mousse et des ajoncs. M. Monange, chef de culture, nous dit qu'il vient de recevoir du méritant bienfaiteur, cent sacs de phosphate et un wagon d'engrais organique de Bondy, et que de cette façon ses terres recevront une fumure au moins égale à celle des autres années. Chacun félicite à l'envie M. Monange de la bonne direction donnée par lui à la culture du domaine, et exprime ses regrets que des raisons de famille et de santé aient obligé celui-ci à demander son remplacement. Le manège, mu par des boeufs, qui sert à actionner la machine à battre les céréales et le moulin à farine, attire quelques instants notre attention. Ce moulin surtout d'un système tout nouveau, très simple, nous semble à tous une grande armélioration dans un domaine aussi important que celui de Sédières; la perte de temps pour aller porter le grain au moulin devant être considérable. Tout le service de la meunerie et de la boulangerie est placé sous la direction de la Sœur Jeanne. Le but de l'Administration est de se suffire à elle-même en tout. On peut dès aujourd'hui affirmer qu'elle ne tardera pas à atteindre ce but. Une porcherie suffisante manquait jusqu'ici à l'exploitation. Ce vide est aujourd'hui comblé, et la porcherie que M. de Nyvenheim vient de faire construire est un vrai modèle du genre. Une centaine d'animaux pourront y être logés, l'engraissage et l'élevage s'y feront avec facilité. Nous examinons avec curiosité un système de fermeture métallique semblable un peu à celui des devantures de magasin, qui permet de préparer à loisir la nourriture des animaux, et d'ouvrir en même temps pour tous le baquet convoité. La chaudière placée au centre, le wagonnet qui transporte les aliments, sont organisés d'une façon bien pratique. Beaucoup de fatigue et de perte de temps seront ainsi évités à l'é- quipe d'orphelins qui, sous la direction d'une Soeur, est chargée du service de la porcherie.
La cloche du château a déjà retenti deux fois, Madame la baronne de Nyvenheim et Mgr l'Evêque venus à notre rencontre nous arrachent avec peine au plaisir que nous avions à contempler cette ferme modèle dans ses plus petits détails. Après le déjeuner, quand la fumée des cigares est devenue un peu moins épaisse, M. le baron de Nyvenheim, voulant rendre compte de la situation de l'Orphelinat, prononce l'allocution suivante :
"Messieurs,
Normalement, réglementairement, nous aurions dut vous convoquer le 31 décembre dernier, pour vous présenter les comptes des derniers quatre mois de l'année 1893, ainsi que notre rapport sur l'exercice complet qui, commencé le 9 novembre 1892, compte par conséquent au 1er janvier 1894 une durée de quatorze mois; mais à la veille de vous adresser notre invitation, plusieurs membres du Conseil nous firent observer qu'une réunion au plus fort de l'hiver aurait peu de chances d'aboutir. Telle a été l'unique cause d'un aussi long retard que nous sommes les premiers à déplorer.
Notre comptabilité comporte deux chapitres, contenant chacun deux paragraphes.
Le chapitre est celui des recettes paragraphe 1, recettes ordinaires; paragraphe 2 recettes extraordinaires. Le chapitre 110 est celui des dépenses : paragraphe 1, dépenses ordinaires; paragraphe 2, dépenses extraordinaires.
Les recettes ordinaires se composent des cotisations annuelles des fondateurs, des fonds provenant de la vente des produits de la terre, des pensions annuelles d'enfants et enfin des produits; en nature de la terre non vendus mais à consommer. Ces recettes sont affectées à la solde du personnel et des ouvriers, à leur nourriture et à celle des enfants recueillis à l'Orphelinat.
Les recettes extraordinaires se composent des dons et des menues offrandes de la charité publique, et, par cela même, n'ont aucun caractère de fixité; aussi sont-elles affectées à des dépenses de première mise, telles que achat de mobilier scolaire et religieux, draps pour vétements, lingerie, batterie de cuisine, fournitures scolaires et en un mot à l'achat de tous objets n'exigeant pas un renouvellement annuel. Le tableau D, qui doit être annexé à notre rapport d'ensemble et que chacun de vous, s'il le désire, peut dés à présent examiner, renferme tous les détails, par articles et par catégories, des totaux que nous allons vous énoncer uniquement afin d'éviter une trop grande perte de temps.
Messieurs, depuis le 9 novembre 1892, date de l'ouverture de l'Orphelinat, jusqu'au 10 janvier 1894, les recettes ordinaires tant en espèces qu'en nature se sont élevées à la somme de 15,391 fr. 80 centimes, d'ou 5,1311 fr. 55 en espèces provenant des cotisations, pensions d'enfaxits; 3,951 fr en espèces provenant de la vente de produits de la terre, et 6,429 fr. 25, en nature, produits par la terre.
Les dépenses ordinaires, tant en espèces qu'en nature, se sont élevées à la somme de 12,302 fr. 15, dont 8,855 fr. 30 soldés en espèces et 3,446 fr. 85 consommés en nature; d'où il résulte un excédent de recettes ordinaires de 3,089 fr. 65., représentés par 107 fr. 25 espèces en caisse et par 2,982 fr. 40 de produits nature en magasin. Le chiffre des journées, tant du personnel que des enfants, à partir du 9 novembre 1892 jusqu'au 1er janvier 1894, a été de 13,297 journées.
En ce qui concerne le chapitre II, les recettes extraordinaires durant les quatorze mois de l'exercice se sont élevées au chiffre de 8,331 francs 6,500 fi'. provenant de dons à partir de 300 fr. et au-dessus et 1,881 fr. provenant de dons audessous de 300 fr. et de menues offrandes.
Les dépenses extraordinaires ont atteint le chiffre de 6,720 fr. 35. D'où il résulte un excédent de recettes extraordinaires sur les dépenses de même nature de 1,660 fr. 65, restant eh caisse au 1er janvier 1894. - -
En résumé, pour les quatorze mois qui composent l'exercice, l'ensemble des recettes ordinaires et extraordinaires s'est élevé au total de 23,752 fr. 80; Et l'ensemble des dépenses ordinaires et extraordinaires s'est élevé au total de: 19,022 fr. 80;
Soit une différence formant le solde en bénéfice de: 4,730 fr., tant en espèces qu'en nature. Pouvions-nous espérer un meilleur résultat? non, assuré-. ment et il nous est facile de le démontrer
Au moment de l'ouverture de l'Orphelinat, nos prévisions budgétaires offraient le tableau suivant : Recettes ordinaires et extraordinaires, total,. 21,180 - Dépenses ordinaires et extraordinaires, total. - 17,692 50. Soit en prévision un solde en bénéfice de. 3,481 50 - Dans la réalité, ces chiffres ont été dépassés, mais il n'y a pas lieu de s'en préoccuper ici, puisque le solde réel en bénéfice, étant de 4,730 fi'., dépasse de 1,242 fi'. 50 celui qui avait été prévu.
Ce qu'il importe, au contraire, de constater, c'est que, dans le chiffre de 21480 fr. de recettes prévues, figure une somme de 4,000 fr. devant être apportèe par vingt enfants payant une pension annuelle de 200 fr:, nos règlements d'organisation prescrivant que sur la totalité des admissions un tiers seulement pouvait être à titre gratuit et les deux autres tiers à titre payant et fixant, en outre, pour cette première année, cette totalité des admissions à 30 élèves. Or, nous avons, complètement ou à peu de choses prés, laissé de côté ces sages prescriptions, puisque sur les 38 enfants qui ont été admis pendant les quatorze mois de l'exercice et dont 27 ont toujours été et sont encore actuellement présents à l'Orphelinat, 7 seulement ont été admis à titre payant ! Soit seulement une modique somme de 1,302 Fr. pour nos recettes. au lieu des 4,000 fr. prévus ! d'où, en-tous cas, une augmentation considérable de nos charges, puisque nous nous trouvons avoir élevé plus du double d'enfants que ne le comportaient nos prévisions budgétaires et nos règlements.
A cette premièré cause d'amoindrissement dans nos moyens d'action, sont, hélas ! venues s'en ajouter d'autres non moins sérieuses, telles que en premier lieu, une année de crise agricole, sans précédents peut-être, entrainant naturellement à sa suite l'obligation, soit de nous défaire de nos animaux de vente à grandes pertes, soit de les conserver au moyen d'une alimentation coûteuse, la récolte en fourrages ayant été presque de moitié inférieure à celle des années ordinaires ; en second lieu, enfin, nous devons constater la cruelle nécessité où nous nous sommes vus, après trois mois à peine de fonctionnement, d'appeler un nouveau personnel à la direction des Orphelins, ce qui n'a pu se faire sans nous occasionner de nouveaux frais, imprévus et assez importants, pour voyages, transports de mobilier, etc. Dans ces conditions, d'autant plus fâcheuses qu'elles surprenaient notre oeuvre dans sa première année d'existence et, par suite, alors que toute chose de l'administration était, pour nous, matière à expérience, un déficit plus ou moins sérieux semblait probable, tout au moins dans nos recettes ordinaires en espèces.
Nous devons donc nous féliciter des résultats obtenus, et si peu sonore que soit notre solde en bénéfice, et bien qu'il soit loin de nous permettre de prononcer encore le mot de prospèrité, nous y trouvons, cependant, non seulement le plus grand encouragement à la persévérance, mais encore, aussi, les plus sérieux motifs d'une confiance absolue dans l'avenir de notre oeuvre. Faut-il en conclure que nous ne rencontrerons pas désormais de plus grandes difficultés et qu'en tous cas il nous sera toujours aussi aisé d'en sortir ? Ce serait commettre une grave erreur dont nous devons avant tout nous préserver. Effectivement, nous n'entrevoyons, d'ici quelques années du moins, aucune probabilité d'accroissement pour le chiffre actuel de nos ressources ordinaires; tout au plus avons-nous le droit d'espérer le voir se maintenir, et encore même pour cela devons-nous admettre le prompt retour dune situation agricole moins désastreuse que celle dont nous ressentons encore le rude contre-coup. Déjà, heureusement, la vente toute récente d'une mauvaise vache, d'une génisse défectueuse et de quatre jeunes taureaux des plus médiocres produit une somme nette de 1,145 Fr., ce qui nous permet de compter pour cette année, si les cours actuels se maintiennent, sur une recette de 4 à 5,000 fr. provenant de la vente seule des bêtes à cornes. Quoi qu'il en soit, nous ne pouvons également, d'ici à deux ou trois ans, compter sur une augmentation sérieusement rémunératrice des produits agricoles; l'étendue de la propriété, mise à la disposition de l'Orphelinat exigerait, pour atteindre ce résultat, un trop grand nombre d'ouvriers à gages, nos enfants n'étant pas encore en état de prendre part aux travaux de la culture. En ce qui concerne, enfin, nos recettes extraordinaires, il est à peine utile de vous dire que nous ne devons pas y compter. Or, si d'un côté nos recettes ordinaires ne peuvent que. diminuer -ou, tout au moins, rester stationnaires, nos dépenses de même nature ne peuvent qu'augmenter plus ou moins chaque année. Déjà les nouvelles lois scolaires nous ont mis dans l'obligation onéreuse de prendre, pour titulaire de notre internat, un instituteur laïque dont d'ailleurs et soit dit en passant nous avons lieu d'être jusqu'ici satisfaits.
Mais voici maintenant qu'afin d'exécuter fidèlement, ainsi que nous l'avons tous à coeur, le programme que nous-nous sommes tracés, nous allons être obligés, dans l'intérêt de l'instruction agricole de nos enfants autant que pour les intérêts matériels de l'établissement, de leur donner, sinon un savant professeur, du moins un nouveau chef de culture possédant certaines qualités de caractère et certaines connaissances spéciales qui, vous le savez par expérience, se rencontrent rarement réunies chez nos régisseurs habituels. Nous devons donc, encore de ce côté, , nous attendre à un surcroît de charges, si modestes que puissent être les prétentions du rare sujet que nous cherchons.
D'autre part, enfin, notre budget restera en outre grevé par l'emploi indispensable d'un certain nombre d'ouvriers à gages, et cela jusqu'au moment où nos élèves ayant grandi en âge et en force pourront se charger eux-mêmes de l'exécution de tous les grands travaux de culture et, par suite, en retirer pour eux seuls tous les bénéfices. L'horizon n'est donc pas absolument sans nuages, et s'il nous est impossible de les dissiper tous aujourd'hui même, nous pouvons du moins et nous devons dès à présent faire tous nos efforts pour en diminuer le nombre et en atténuer le plus possible les effets. Pour cela, le seul moyen qui s'offre à nous, pour l'instant, quelque pénible il doive nous paraitre, consiste à rentrer dans la stricte observation de nos règlements.
Ceux qui, comme nous, ont eu et ont encore constamment de fréquents rapports avec un grand nombre de fondateurs et directeurs d'orphelinats agricoles, savent parfaitement que la gratuit est aujourd'hui considérée par eux, et après expérience, comme devant fatalement entrainer avec elle la ruine complète de l'oeuvre qui en fait sa base. Aussi, n'est-il besoin que de parcourir le recueil des oeuvres pour s'assurer que tous les orphelinats agricoles exigent une pension parfois considérable et en tous cas toujours très supérieure à celle que nous avons fixée; certaines s'élèvent jusqu'à 480 fr. et un trousseau; les moins fortes ne descendent pas au-dessous de 250 fr. avec 50 ou 60fr. d'entrée, plus le trousseau; et, enfin, si l'on pénètre plus avant dans la partie administrative de ces établissements, on constate que chez la plupart le nombre des enfants admis gratuitement dépasse rarement le cinquième de la totalité des admissions. Sans être aussi excessifs en sagesse, nous vous demanderons simplement de vouloir bien décider qu'à dater de ce jour il ne sera plus admis d'enfants à titre gratuit dans l'Orphelinat de Sédières jusqu'à ce que le nombre des pensionnaires ait atteint une sage proportion. En nous associant pour la création de l'Orphelinat agricole de Sédières, nous avons eu tous un même et unique but, celui de concourir tous ensemble et dans la mesure de nos forces au soulagement de la misère dans notre département et de venir en aide, en même temps, à son agriculture souffrante sinon mourante, en lui fournissant, après les avoir formés, des bras solides, honnêtes et habiles dont le désolant fléau de l'émigration tend chaque jour davantage à la priver.
En conséquence, à la session du mois d'août dernier, nous avons informé M. le Préfet et MM. les Conseillers généraux que l'orphelinat agricole de Sédièrcs était mis d'ores et déjà à la disposition des enfants de l'Assistance publique départementale. Nous avons appris depuis par le compte rendu des séances que la commission chargée d'étudier cette proposition avait émis un avit favorable. Nous avons donc tout lieu d'espérer que la session prochaine du mois d'avril nous apportera une heureuse solution à nos désirs. Dans le cas où contrairement à notre attente cet espoir viendrait à être déçu, il ne nous resterait plus alors qu'à donner suite aux demandes qui nous étaient déjà, et nous seront encore certainement, adressées tant par des administrations d'assistance départementales voisines que par des bienfaiteurs et oeuvres de bienfaisance de Paris et des départements.
Ce rapport, quoique déjà trop étendu peut-être, serait cependant incomplet si nous n'ajoutions ici quelques mots concernant plus spécialement nos petits protégés en ce qui a trait à leur genre de vie, à leur caractère et en un mot à tous les progrés qu'ils ont pu faire tant au point de vue de leur développement moral et intellectuel qu'à celui de leur développement physique. A tous ces divers points de vue, et sauf certain trouble pénible, mais de très courte durée d'ailleurs, qui se produisit au départ du premier personnel dirigeant et enseignant, nous n'avons éprouvé depuis et constamment que les plus complètes et les plus douces satisfactions. Grâce, ainsi que nous l'avons déjà dit, au dévouement admirable de nos bonnes Soeurs, grâce aussi à notre excellent aumônier M. l'abbé Vigier qui, par son esprit large, son tact parfait et sa bonté inépuisable, a su ramener à lui les égarés et s'attirer promptement la confiante affection de tous, la discipline ne laisse rien à désirer aujourd'hui : l'entrain et la gaieté règnent dans notre petite colonie, ce qui ne nuit en rien aux études en classe, car notre intelligent et zélé instituteur M. Dillanges constate chaque jour de très réels progrès chez ses jeunes élèves et compte bien le prouver en faisant obtenir cette année à deux ou trois d'entre eux leur certificat d'études.
Il suffit, enfin, d'avoir constaté à leur arrivée l'état complet et navrant d'anémie de la plupart de ces pauvres enfants et de les revoir un mois après complètement transformés pour être entièrement rassurés à l'endroit de leur hygiène qui se compose surtout de bon air, de nourriture saine et régulière et d'exercice sagement mesuré.
Nos quatre éminents docteurs, MM. de Chammard, Maschat, Sickora et Madranges, qui composent le corps médical généreusement gratuit de l'Orphelinat de Sédières, ne s'attendaient sans doute pas à une telle sinécure; nous ne demandons qu'à la voir se perpétuer, certains que nous sommes qu'ils seront les premiers à s'en réjouir.
Enfin, Messieurs, à dater du jour où Monseigneur l'Evéque de Tulle a bien voulu prendre sous son haut patronage l'oeuvre que nous avons fondée, Sa Grandeur n'a cessé de prodiguer à nos chers pupilles et à nous-mêmes les plus grandes marques de sa plus tendre sollicitude. En daignant enfin présider cette réunion, Sa Grandeur a voulu nous témoigner une fois de plus l'intérêt qu'elle veut bien prendre à nos modestes travaux; nous sommes donc doublement heureux de cette circonstance qui nous permet de lui exprimer de vive voix et très respectueusement notre profonde et inaltérable reconnaissance".
Après ces paroles, la conversation redevient générale, et nous constatons tous quelle vitalité a déjà conquise cette maison hospitalière fondée depuis si peu de temps. Pourtant, comme toute oeuvre à son début, elle a eu à subir des épreuves. Grâce à la volonté indomptable du baron et de la baronne de Nyvenheim, grâce aussi au haut patronage de Sa Grandeur Mgr Denéchau, toutes difficultés ont été franchies. L'union absolue qui règne dans les différents services de l'Orphelinat, sous la direction éclairée de la Soeur Cécile, le zéle et l'esprit conciliant et aimable de M. l'aumônier, ont beaucoup contribué à faciliter la réorganisation de l'Etablissement.
Telles sont les réflexions que nous échangeons entre nous; mais il est l'heure de regagner les voitures; nous remercions M. et Mme de Nyvenheim de l'accueil si aimable que nous recevons toujours chez eux ; ils veulent bien nous donner rendez-vous pour une semblable réunion l'année prochaine, ajoutant que d'ici là tous leurs efforts tendront à augmenter le plus possible le nombre des orphelins recueillis,
Tel est, Monsieur, le compte rendu que le Conseil de surveillance m'a chargé de vous transmettre.
J'ai tâché de suivre cette journée pas à pas et d'être vrai sur toutes choses, sans banalités ni exagérations.
Ma conclusion sera le mot que M. de Nyvenheim nous disait à tous mardi au moment du départ : "Nous sommes nombreux cette année, faisons en sorte d'assister tous à la réunion générale de l'année prochaine".
Veuillsz agréer, Monsieur, l'expressiod de mes sentiments les plus distingués.
L. Desjobert. Secrétaire du Conseil de surveillance.
SITUATION des recettes et dépenses ordinaires et extraordinaires effectuées depuis le 9 novembre 1892 jusqu'au 1er janvier 1894, soit 14 mois.
Chapitre I.
- Des Recettes
- RECETTES ORDINAIRES
En espèces.
Cotisations annuelles ... ......... .3550.00
Pensions d'élèves ...................... 1305.55 5011.55
Intérêts Dolafont ........................ 96.00
Produits industrie ..........................60.00
Produits de la terre : 8962.55
Etables .........................................2697.00
Porcherie ........................................765.00 3951.00
Vente de tait et beurre .................111.00
2100 kiL, avoine à 18fr. les 103 kit,378.00
En nature.
Viande de 3 porcs et 2 vaches salés et 5 veaux ................1015.50
8160 litre de lait t 0fr. 10 le litre .......................................810.60
Basse-cour, oeufs et volaille ...................................................180.85 6429 25
56 setiers blé noir à 4 fr........................................................224.00
172 hectolitres seigle à 12 Fr.50 ........................................2150.00
240 hectolitres pommes de terre ..........................................960.00
20 hectolitres châtaignes ......................................................... 60.00
Légumes verts et secs ...............................................................566.00
Restant du blé de 1892 ............................................................462.30
Total des recettes .............................................................................................................................15391.80
dont 10380 fr. 23 produits de la terre (3951 fr. en espèces; 6429 fr. en nature)
et 5,011 fr. 55, produits des cotisations, pensions, etc. en espèces
- RECETTES EXTRAORDINAIRES
Dons...........................................................................................6500.00
Offrandes .................................................................................1881.00
Total ..........................................................................................8381.1 1
Chapitre II.
- Des Dépenses.
- DÉPENSES ORDINAIRES
En espèces.
Appointements de L'aumônier..................................................540.00
id. des Frères ...........................................................................1072.00
id. des Soeurs ............................................................................200.00
id. dû chef de culture et domestiques.................................. 1148.70
Frais de moissons....................................................................... 717.25
Voyages, personnel et enfants ............................................... 264.20 5734.35
Impositions ... ............................................................................ 400.00
Assurances du local de l'orphelinat .........................................34.95
Frais d'entretien général: 6567 80
éclairage, correspondance, blanchissage,
menuiserie, maréchalerie, son pour les animaux, etc. ........1357.25
Alimentaticn Achat de grains et farines............................. 1755.50
Epicerie ...................................................................................... 545.25
Achat de graisse ......................................................................... 50.70 3120.05
Vin................................................................................................. 462.35
Achat de viande ......................................................................... 307.15
En nature.
Farine et grains, récolte 1892 ................................................1189.70
Viande fournie par la ferme. ................................................... 700.00
Fournitures diverses de ferme, lait, 3446 85
fromages, bourre, légumes, ........................................................182.97
journées â 0fr. 10 et à 0fr. 15............................................... 1557.15
Total des dépenses ordinaires ..............................................12302.15
- DÉPENSES EXTRAORDINAIRES.
Frais de première installation.
Véture ..............................................................................................17.50
Ornements et orfèvrerie de chapelle ......................................616.50
Mobilier, lits de fer, tables, bancs scolaires, etc ..............1172.55
Literie, couvertures, etc ........................................................... 815.85
Lingede maison .............................................................................737.81
Batterie de cuisine, vaisselle émaillée ....................................624.30
Librairie sc-laire et religieuse ................................................438.00
Frais divers imprévus. Voyages imprévus,
emménagement du personnel ......................................................262.85
Achat d'instruments agricoles ................................................. 182.00
Achat de cinq porcelets ..............................................................151.00
Frais d'impressions et inauguration ........................................300.00
-Total des dépenses extraordinaires....................................... 5875.55 + 844.85 = 6720.35
Total des recettes ordinaires, tant en espèces qu'en nature ................................. 15391.80
Total des dépenses ordinaires, tant en espèces qu'en nature ................................ 12302.15
Excédant des recettes ordinaires ................................................................................. 3089.65
dont 107 francs 25 en espèces restant en caisse
et 2982 fr. 40, produits nature en magasin.
Total des recettes extraordinaires ................................................................................8381.00
Total des dieuses extraordinaires ..................................................................................6720.85
Excédant des recettes extraordinaires. ........................................................................1660.65
Membres du Conseil de surveillance : MM. Mgr Denéchau, président d'honneur. Baron de Neukirchen de Nyvenheim, président. Ch. Valette, vice-président pour l'arrondissement de Tulle. Baron de Jouvenel, id. pour l'arrondissement de Brive. Baron de Bélinay, id. dUssel. L. Desjobert, avocat à Tulle, secrétaire. Delafont, banquier à Egletons, trésorier. Marquis de Montaignac. J. Albier. Louis Talin, avocat. Gilot. Baron Ch. de Meynard, de la Sudrie -. Mac de Vaublanc. Coraille de Meynard, du Peuch. Comte de Salvandy. Général Duval. Charles de Braquilanges. Albert Jondot. Aumônier M. l'abbé Vier. Service de santé Docteur Alfred de Chammard, médecin à Tulle. Docteur Sickora, médecin à Egletons. Docteur Madranges, médecin à Egletons. Docteur Maschat, médecin à Tulle. Personnel enseignant Les Religieuses de l'ordre de Saint-François-d'Assises. Dillanges, instituteur breveté en retraite. Monange, chef de culture.
- 15 - Fondateurs. Nombre de parts souscrites.
1892-1893.
Mgr Denéchau, èvéqu&de Tulle 2
Albier, château de Leyrat, par Tulle 1
De Bargues, château de Saint-Victour, par Bort 1
Baron de Bélinay,château de-Marèges, par Liginiac 1
Buron de l3loma6, château de ta Grainerie, par Saion-la-Tour.2
De Braquilanges (Charles), château du Bech, par Corrèze .1
Brisset, notaire à Tulle 1
Marquis de Casteja, rue d'Anjou, Paris 1
A. du Champ, château du Verdier, par Sainte-Fortunade.1 .
Mlle de Chanal, château de Sédières, par La Roche Canillac, et Paris .1
Comte de Combarel, château du Gibanel, par Argentat .1
Coadeau, ancien régisseur du général de Chânal, â Chélles (Seine-et-Marne) .1
Delafont, banquier à Egletons 1
Desjobert, quai de Valon, Tulle 2
Général Duval, place Municipale, Tulle .1.
Detas, ingénieur civil, 6, rue du Gymnase, Périgueux 1
E. L'Ebraly, château de L'Ebraly, par Ussel. 1
S. d'Eyparsac, château du Puy-Grôlier, par Uzerche I
Genestout, château du Claud, par Terrasson .1,
1-Ieitz-Boyer, château de Faugeras, par Uzerche 1
Fronty, propriétaire, manufacturier à Donzeaac 1
L. Gay, proriètairl3, place Municipale, Tulle 1
Guillot, ancien entrepreneur. Naves . 2
Jondot (Albert), château de Puy-Mas, par Tulle 1
Baron de Jouvenel, Castel Novel. Varetz .2
Comte de Lavaur de Sainte-Fortunade, château de Sainte-Fortunade .1
Marquis de Lèvis, vice-président de la Société des Orphelinats agricoles, propriétaire à Ventadour et Paris 1
Mauriceau, château de la Roulfière (Maine-et-Loire) 1
De Meynard (Camille), le Peuch, Tulle ..1
Baron de Meynard, château de la Sudrie, par Tulle 2
Marquis de Montaignac, manoir de Montaignac, par Egletons..2
Comte de Montcabrier, Toulouse.................. 2
Vicomte H. de Montcabrier, Toulouse ...... ....... 2
Comte de Montcabrier (Henry), capitaine au 9° hussards, Marseille ..2
Mmc Mesuaer, à Tulle .1
De Montcabrier (Paul), Marseille .1
De Montcabrier (Jeanne), Marseille .1
Vicomte de Montcabrier (Xavier) lieutenant au 130è chasseurs, Beziers .2
Mrn o Mollet, rue Monthabor, 8, Paris .2
M"° d'Oméon, Toulouse 1
Rabot (Henry), château de Bity, par Corrèze . 1
Mme de Saint-Maur, née baronne de Nyvenheim, château de Varagnes (Tarn) .1
Comte de Salvandy, château du Teinchurier, par Brive. .1
Baronne de Salibert, château de Salibert (Tarn). 1
Comte de Seilhac, le Mons-Vitrac, par Corrèze 1
Spinasse, ancien conseiller général, Egletons ..1
Martial Talin, ancien avoué, Tulle . 1
Louis Talin, avocat, maire de Corrèze 1
Paul Toinot, quai Baluze, à Tulle.2 '
Talamon, château de Lafarge, par Chamberet 1
Ch. Valette, notaire honoraire à Chamboulive 1
Comte de Valon, château de Saint-Priest, par Tulle 2
R. de Vaublanc, château de Couzan. par Saignes (Cantal) .1
M. de Vaublanc, château de Maumont. par Egletons. 1
1893. Donateurs.
M. et Mmc Valette, à Chamboulive (Corrèze) 1,000 Fr
Comte et comtesse d'Aigrepont, château de Mortegoutte (Corrèze).. 600 »
M. Puckermano, de Newport (Etats-Unis d'Amèrique)...1.000
M. et Crauffon, de Tulle ... 300
M. et Mme Desjobert, château de la Morguie, Tulle.... 500 »
Mlle de Laveyrie, Paris ... 1,000
Anonyme de Paris ..300 »
M"° Souchard, château de Vals (Cantal) .1,000 »
M. Spinasse, maire, ancien conseiller génèral, et M"° Spinasse, à Egletons (Corrèze) ..300 »
M. et Mma Curtis, Boston (Etats-Unis dAmèrique) 500
TOTAL . 6,500 .
Souscripteurs. 1893
MtMme Brodin, à Laroche Canillac (Corrèze). 25 »
Mme Cary. à Cambridges (Etats-Unis d'Amérique) 127 »
M. Cessac, à Saint-Clèment (Corrèze) .........10
M"e de Chanal, à Sèdières .................... 50 »
Colonel Drappau, Tulle (souscription annuelle) 30
Mme de Froidefond des Farges, Cosne (Nièvre) 50 x
M. Lafarge, notaire à Lagraulière (Corrèze)..., 5
Baron Lafond de Saint-Mùr, sênateur, Laroche- Canillac .....................................50 »
Comte R. de Lasteyrie, conseiller général, au Saillant .. ....................... ............ 20
M. Artiges, instituteur à Gumond (Corrèze) 10 »
Mme Leubiguac,.chàteau de la Rochette et Tulle. 50
MM. Saule frères, carrossiers à Tulle .........25 »
A reporter . 452 I - 18 - Report, 452 »
Anonyme à Tulle 5 Six autres anonymes, à Tulle ........ ........ 30 » Anonyme, à Tulle............................. 10 » id.........................10 id.........................20 »
K Tuilé .......................... 100
Comtesse de Fressac, à Toulouse ............20 »
Baronne de Sirtema de Growestin, â La Haye (Hollande) ....................................20 »
Comte Pierre de Montaignac, Paris ..........20 Anonyme do Tulle ................... ...... 5
M. Malézieux de Laganne, maire à Soudaine-la- Vinadiêre (Corrèze) ....................... . .... .15
Mme Jeanne à Paris .......... . ...... ....... 40 .»
M. et M Beaune, de Nice...................20 »
Anonyme de la Corrèze .....................100 »
Vicomte de Salignac de Fénelon, de Toulouse 10 »
Comtesse et comte de Laubespin, sénateur, de Paris.......................................200
Agence d'assurance catholique, M. Guillemet, de Paris, remise..............................35 »
Agence d'assurance, M. Guillemet, de Paris, pour M. le marquis de Montaignac .........155 »
Mme Mallet. de Paris ......................100 »
M. Claverie, percepteur, et Mme Claverie, â La- roche-Canillac.. ................................ 20 »
Baron et baronne de Beauquesne, Toulouse. 20 »
Oeuvre de patronage des Orphelinats, 2, rue Casimir-Pêrier, Paris ........ . ....... ...... .... .i »
M"e Jacob. Paris ............................ .20 »
Baron T van Outerisden. de Bruxelles ...........40 »
Mme Brodin, à Laroche-Canillac .............25 »
M. .Bouysson, instituteur en retraite, à Chanac (Corrèze). . . ................................5
Anonyme .e Paris ..........................80 » id. id ...........................10
M. Delastro, de Paris........................ 100
M" Body, de Paris .......................... . 50 »
M. \Tialle , jardinier à Tulle...... .......... 4 »
M. Mons, agent d'assurance à Tulle ...........5 »
M. le curé de Saint-Clément (Corrèze) ........4
M. Leymairie, pharmacien à Tulle .............10 »
M. Neige, nègoçiant, id .. ... ......... 5 »
Min Lina Dupais. Chamboulive (Corrèze) 10 »
M. Camillo MLtas, id id .......10 »
Lavernhe . -. - ..........................10 »
Anonyme, de Tulle. ............. ........... 5 -
TOTAl. ............... 1,001 - 19 -
Dons en nature.
M° la marquise de Las Marismas, Paris, ornement d'églis drap d'or fin. M' de Lasteyrie, Paris, une aube brodée et linge d'église. Comtesse Henry de Montcabrier, Marseille, une lampe d'autel. Marquis de Moutaignac, Montaignac (Corrèze), soixante paires de sabots. M'° Pouyer d'Anfreville (Eure), un lit complet. - Anonyme de la Corrèze, trente gilets de laine. id. trente paires de bas. Mme Cuillot. de Naves (Corrèze), un ornement d'église. Mmc de Montaignac, un ornement d'église complet brodé velours rouge. M. 0llier. de Tulle, un chemin de croix. Anonyme de Montaignac-Saint-Hippolyte, un tonneau de choucroute. Anonyme de Varetz (Corrèze), paille de maïs. Anonyme de Montaignac-Saint-Hippolyte, une voiture de carottes nantaises. Anonyme de la Corrèze, une grande truie et ses dix porcelets. Anonyme de Montaignac-Saint-Hippolyte, une autre truie. M. Bonnafy, négociant, de Tulle, douze outils fer et acier pour jardinage. Baron de Bélinay, un fromage de 50 kilos de forme d'Auvergue. M' Veyre, Hôtel Notre-Dame, Tulle, une bombonne 50 kilos d'huile d'olive. M. Gras, propriétaire ft Vallauris (Alpes-Maritimes), un estagnon huile d'olives, eau de fleurs d'oranger, etc. Anonyme de Sainte-Fortunade, dix paires de bas laine. Anonyme du Mons (Corrèze), douze paires de bas laine. Marquis de Montaignac, quatre crémeuses hollandaises et. dix outils, griffes, etc. M. et M" Rouazeau, de Vallauris, une grande caisse de vaisselle, poteries (203 pièces). Anonyme de la Corrèze, dix mille liens alpha pour gerbes. id. un wagon 800 kilos chaux agricole. id. cent paires de sabots. M. Chambon, négociant en chaux et plâtres, de Tulle, une balle de paille de maïs. M. Maison, marèchal-ferrrant à Clergoux (Corrèze), divers outils pour culture. Anonyme de la Corrèze. 5,000 kilos de phosphates. id une charrue arrache pommes de terre, extirpateur et butteur. - 20 - M. Campos, coutelier à Tulle, une tondeuse et couteaux. Baron de Bélinay, deux hectolitres de cidre et un fût de vinaigre. Anonyme de Paris, une nappe d'autel brodée. Mlle de iCatendycke, de La Haye (Hollande), une nappe d'autel brodée. Mme Marinié, d'Argentat, un devant d'autel. Mme de Mazieux (Tarn-et-Garonne), un devant d'autel. Mr de,Lochner à Moulins, une nappe d'autel brodée et dentelles. Anonyme de la Corrèze, dix mille mètres de ronces artificielles pour clôture. Anonyme de la Corrèze, un wagon de 8,000 kilos chaux agricole. - Anonyme de la Corrèze, un moulin à farine mécaniqué et sa bluterie. - Anonyme de la Corrèze, 3000 plants de Myrobolan pour clôture vive. M'° Çento, de Vallauris (Alpes-Maritimes), caisse livres d'école et fournitures de bureau, une caisse savon. M. Barthélemy Gras, une bonbonne, d'huile d'olive, eau de de meuthe,fleur d'oranger, de roses. Anonyme de la Corrèze, un wagon d'engrais de Bondy.
Tulle Imp. Crauffon, 691. 1894